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Oignon : En manque de repères contre le mildiou

Avec l’évolution du pathogène et la gamme fongicide qui risque d’être remaniée, la protection des oignons contre le mildiou suscite de nombreuses interrogations. Les travaux d’expérimentation s’attachent à anticiper au mieux cette situation.

Le mildiou de l’oignon est causé par l’agent pathogène Peronospora destructor. La maladie se manifeste par l’apparition de taches allongées et pâles, qui virent ensuite au jaune. Lorsque les conditions sont favorables à la sporulation, un duvet grisâtre se forme également. Au bout de quelques jours, la zone atteinte se nécrose. Lorsque cette nécrose est suffisamment large, elle s’étend à la partie supérieure de la feuille, ce qui réduit d’autant la surface foliaire assurant la photosynthèse. L’attaque est d’autant plus grave qu’elle est précoce et le rendement peut être diminué de 70 %. Le mildiou dégrade également l’aptitude à la conservation des bulbes.

L’épidémie peut l’impacter jusqu’à la tombaison

Des modèles de prévision du risque d’apparition et de développement du mildiou (Miloni et Semiloni) ont été mis au point au début des années 2000. Ils sont utilisés pour la rédaction des Bulletins de santé du végétal. Des fournisseurs de stations météorologiques proposent également ce type d’Outils d’aide à la décision (OAD). Pour être efficaces, les traitements fongicides doivent en effet être appliqués impérativement avant les sorties de taches de mildiou, et la stratégie de protection vise à ne pas laisser la maladie s’installer dans la parcelle, faute de quoi il devient ensuite très difficile de la contrôler. Etant donné que l’oignon est sensible à partir du stade 2 feuilles vraies et que l’épidémie peut l’impacter jusqu’à la tombaison du feuillage, de nombreux traitements sont réalisés contre le mildiou. Les OAD présentent donc un intérêt évident. Pour que les prévisions soient fiables, il est indispensable que les données météorologiques le soient également. Si les capteurs de pluviométrie et de température sont généralement robustes, les capteurs d’hygrométrie sont, quant à eux, sensibles et se dérèglent vite. Il est donc essentiel de vérifier leur bon fonctionnement, au moins en début de saison, et de changer au besoin les éléments usagés.

Une gamme fongicide à renouveler

A l’heure actuelle, une dizaine de substances actives sont utilisables pour protéger les oignons du mildiou. Le mancozèbe, qu’il soit seul (Dithane M45 et équivalents) ou associé (Acrobat MDG et Trecatol), constitue le premier pilier de cette gamme : il est présent dans six à huit traitements, c’est-à-dire la moitié, voire les deux tiers des interventions. Le diméthomorphe représente le second pilier de la lutte anti-mildiou car à travers Acrobat MDG et Coach Plus, il se retrouve dans quatre à six traitements, soit un tiers à la moitié des passages. Or les premiers résultats des études conduites dans le cadre du réexamen européen de ces substances, prévu fin juillet 2020 pour le diméthomorphe et d’ici le 31 janvier 2021 pour le mancozèbe, feraient état d’un profil toxicologique défavorable pouvant conduire à leur retrait. Si cette évaluation se confirmait, toute la stratégie fongicide de l’oignon serait donc remise en cause et devrait être redéfinie. Ortiva (azoxystrobine), ré-autorisé en avril 2019, reste une valeur sûre au sein de la panoplie fongicide, quoique son interdiction d’emploi sur les sols artificiellement drainés en limite sensiblement l’utilisation. Celle-ci doit s’effectuer impérativement en conditions préventives (absence de symptômes dans la parcelle) sous peine de s’exposer à des risques de résistance. Infinito (propamocarbe + fluopicolide) est assez peu utilisé à ce jour en raison de son efficacité relativement moyenne. Mais la donne pourrait changer avec la raréfaction des solutions disponibles et aussi grâce à l’apparition du nouvel adjuvant LE 846/Oliofix (esters méthyliques d’acides gras), susceptible d’améliorer ses performances. Des essais sont en cours en 2020 pour vérifier cette possibilité. Il en est de même pour Fantic A (cuivre + bénalaxyl-M) et les produits à base de cuivre solo, autorisés fin 2018, pour lesquels il manque encore des références. RammanTop (cyazofamide) a récemment complété la gamme, suite à son autorisation en juin 2020. Son efficacité s’avère inférieure à celles de Dithane M45 et Acrobat MDG mais là aussi, l’intérêt de l’adjuvantation est à étudier. Sur le plan pratique, il faut également souligner l’importance du volume de bouillie sur la qualité de la protection lorsque les traitements sont réalisés avec des produits de contact (mancozèbe, cuivre). Dans les essais d'Unilet, la surface couverte par les gouttelettes est visuellement améliorée avec un volume de 300 l/ha par rapport à un volume de 150 l/ha, même lorsque la bouillie est adjuvantée.

Zone de turbulences en perspective

Depuis 2013, l’Unilet conduit chaque année des essais sur mildiou de l’oignon afin de préciser l’efficacité des produits autorisés, d'adapter les stratégies de protection et de contribuer à obtenir de nouvelles homologations. Plusieurs solutions fongicides sont en cours d’évaluation, avec déjà des résultats prometteurs pour certaines nouveautés. Mais leur Autorisation de mise sur le marché (AMM) prendra du temps. Au cours des prochaines années, il est ainsi probable que s'ouvre une période de transition, avec des retraits de fongicides, l’attente de nouvelles autorisations et de nouvelles références. Pour y faire face, la profession aura besoin d’être accompagnée, au travers notamment de demandes d’AMM provisoires (dérogations d’emploi de 120 jours) destinées à répondre à l’urgence de la situation. L’Unilet s’emploie à préparer au mieux cette période de turbulences.

Mickaël Legrand, Unilet

 

A lire aussi : L’alternariose, maladie secondaire de la pomme de terre

 

Moins de mildiou ces dernières années ?

Le mildiou est généralement décrit comme la principale maladie de l’oignon. Cependant, les conditions climatiques chaudes et sèches de 2018 et 2019, marquées par des épisodes caniculaires, n’ont pas vraiment confirmé cette assertion. Ces deux dernières années, la fusariose s’est révélée tout aussi préoccupante, ainsi que la bactériose, et dans une moindre mesure la pourriture blanche. Le réchauffement climatique pourrait donc contribuer à réduire l’incidence du mildiou, même s’il y a fort à parier qu'il y aura encore des années à forte pression. Notons par ailleurs que de nombreuses connaissances restent encore à acquérir au sujet du mildiou : identification et caractérisation des souches, suivi de la sensibilité aux fongicides.

Ne pas confondre mildiou de l'oignon et mildiou de la pomme de terre

Contrairement à ce qui est encore (trop) souvent entendu, le mildiou de l’oignon, causé par Peronospora destructor, n’est pas le même parasite que le mildiou de la pomme de terre, causé par Phytophthora infestans. D’ailleurs, leurs conditions de développement ne sont pas tout à fait les mêmes.

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