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Les variétés entrent en résistance

Les résistances sont un levier essentiel de la réduction d’utilisation des produits phytosanitaires. Depuis deux ans, de plus en plus de variétés offrant des résistances intéressantes sont proposées par les semenciers.

Les résistances sont depuis longtemps un axe important de sélection en melon. « L’essentiel pour le producteur est le rendement commercial, souligne Stéphane Le Caro, chef produit melon charentais chez Syngenta. Cela passe par la vigueur, la tenue de plants et de fruits, le calibre, la qualité de fruit et la résistance aux pathogènes ». Le principal problème reste la fusariose, contre laquelle il n’existe pas de traitement et qui peut affecter fortement le rendement, la qualité et les chantiers de récolte. A peu près toutes les variétés sont aujourd’hui hautement résistantes (HR) aux races 0, 1, 2 de la fusariose. Mais la résistance à la race 1-2, très virulente et responsable des cas actuels de fusariose, est plus compliquée à obtenir car basée sur plusieurs gènes. Depuis 25 ans, des variétés « résistantes intermédiaires » (IR Fom 1-2) ont cependant été créées. Jusqu’à il y a quelques années, elles présentaient souvent des défauts de forme, qualité interne, conservation ou rendement. Mais celles proposées depuis deux ans correspondent beaucoup plus aux standards du marché. « En sélection, les outils sont déterminants et ceux-ci ont beaucoup évolué », constate Lionel Juan, d’Enza Zaden.

Offrir un gradient de résistance à la fusariose

Cette résistance n’est toutefois qu’intermédiaire. Une variété est reconnue IR Fom 1-2 si elle présente en laboratoire une résistance au moins égale à celle de Lunasol. Mais de Lunasol (référence haute de la résistance) à Manta (variété sensible), la marge est grande et de grosses variations sont observées sur le terrain. Les semenciers tentent donc de clarifier leur offre en classant leurs variétés à partir de tests au champ et en identifiant les variétés IR Fom 1-2 ayant les meilleures qualités agronomiques. Syngenta, qui propose plusieurs variétés IR Fom 1-2 et ne développe plus que des variétés ayant au moins un bon comportement à la fusariose, a créé le label Qualifuz qui signale les variétés IR Fom 1-2 alliant goût et présentation. Nunhems, qui offre des variétés à haut niveau de résistance, niveau médium et de bon comportement, identifie sous le label Fus-Innov les variétés IR Fom 1-2 ou ayant un bon comportement à la fusariose. Les semenciers travaillent aussi désormais sur des variétés non IR Fom 1-2 mais à moindre sensibilité à la fusariose. « Sur des sols ayant porté une ou deux cultures de melons et donc fatigués, qui représentent une part importante des surfaces, des variétés de moindre sensibilité peuvent convenir, avec un bon compromis en terme de précocité, fruit et rendement par rapport aux variétés plus résistantes », souligne Tony Chartier, chef produit melon chez Clause. Chez Gautier Semences, l’objectif est de proposer un gradient de résistance selon le niveau de risque de la parcelle, à assortir de recommandations au producteur, avec des variétés IR Fom 1-2 pour les créneaux et bassins à risque.

Puceron et oïdium, un « plus » parfois nécessaire

Une autre résistance disponible est la résistance au puceron Aphis gossypii, responsable de dégâts affectant le rendement et vecteur potentiel de virus. Depuis 20 ans, les semenciers proposent des variétés dotées du gène VAT, qui leur donne une résistance à la colonisation par Aphis gossypii et à la transmission des virus par ce puceron. Des variétés IR Ag existent aujourd’hui sur tous les créneaux. Depuis deux-trois ans, toutes les nouveautés de Syngenta sont IR Ag. Nunhems a lancé trois variétés IR Ag depuis 2015. Enza Zaden n’inscrit plus que des variétés IR Ag, proposées aussi en graines pour l’agriculture biologique. Chez Gautier, toutes les nouveautés sont IR Ag. Chez Seminis, toutes les variétés lancées depuis 2014 sont soit IR Ag soit IR Fom 1-2, soit les deux pour les plus récentes. Sakata espère proposer rapidement des variétés IR Ag.

Autre problème : l’oïdium, champignon touchant le feuillage et les fruits, avec des conséquences sur la qualité interne du fruit et sur le rendement. La majorité des variétés est aujourd’hui résistante intermédiaire à Golovinomyces cichoracerum, souche peu virulente et désormais peu courante, ainsi qu’aux races 1, 2, 3 et 5 de Podosphaera xanthii. Mais depuis quelques années, c’est la race Px 3-5 qui cause le plus de dégâts. Les semenciers commencent donc à proposer des variétés IR Px 3-5. Nunhems offre des variétés IR Px 3-5 pour le plein champ, en développe pour tous les créneaux et classe ses variétés face à l’oïdium. Depuis 2015 Syngenta ne développe plus que des variétés IR Px 3-5, et Rijk Zwaan en propose deux. La gamme reste toutefois encore limitée. Si les priorités varient, ces trois pathogènes préoccupent tous les producteurs. De plus en plus, les semenciers s’orientent donc vers des variétés ayant au moins un bon comportement face à eux. « Avant, la priorité était la résistance fusariose, les autres problèmes pouvant se gérer par des traitements, note Denis Vève, responsable développement chez Rijk Zwaan. Aujourd’hui, pour sécuriser la production et répondre à Ecophyto ainsi qu’aux attentes des consommateurs, il faut compiler les résistances ». Syngenta propose déjà Avalonia, résistante aux quatre races de fusariose, aux cinq races d’oïdium et au puceron, et lance une nouvelle variété ayant les mêmes résistances. « Depuis 2015, chaque variété que nous développons doit présenter ces résistances, à associer à l’utilisation d’une protection adéquate et de nouveaux outils d’aide à la décision », précise Stéphane Le Caro.

Compiler les trois résistances est très compliqué

Nunhems a lancé Forterra, résistante aux quatre races de fusariose, aux cinq races d’oïdium et au puceron. Compiler les trois résistances est toutefois très compliqué. Les semenciers s’orientent donc plutôt vers des variétés présentant un « pack de résistances de base », à savoir la résistance au puceron, une bonne résistance à l’oïdium, notamment à Px 3-5, et un bon comportement à la fusariose. « On peut ainsi atteindre un bon compromis entre résistances, rendement, tenue de fruit, calibre et goût », note Jérôme Pomes, commercial melon chez Nunhems. Nunhems et Syngenta sont déjà engagés dans ce sens. Clause lance en 2017 son « pack sanitaire de base » combinant IR Ag/ Px 3-5 et sensibilité intermédiaire à la fusariose qui sera décliné à l’ensemble de sa future gamme et qu’il veut étendre avec un bon comportement à la bactériose. Gautier Semences veut développer un « package complet » avec les résistances intermédiaires puceron, oïdium et fusariose. Seminis veut proposer un « pack de base », avec aussi à plus long terme une tolérance significative au mildiou. Rijk Zwaan, qui propose des variétés IR Ag et IR Px 3-5, vise à offrir des variétés ayant les deux résistances et un comportement à la fusariose permettant de gérer le risque parcelles.

Ne pas oublier les autres maladies

Pour les autres maladies (bactériose, sclerotinia, mildiou, cladosporiose, virus), il n’y a pas de résistance identifiée. Mais des différences de comportement sont observées entre variétés. Certains semenciers développent donc des programmes pour ces maladies, notamment la bactériose. Clause a ainsi développé la variété Escobar, qui a un bon comportement à la bactériose. Nunhems a créé Forterra, de bon comportement à la bactériose et au sclerotiona. Seminis travaille la résistance mildiou et la résistance multi-virus. Enfin, quelques accessions de l’Inra présentent un bon comportement à la cladosporiose, ce qui pourrait ouvrir la voie à une résistance à cette maladie.

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