Emballage
« Le décret de la loi Agec menace de disparition toute la filière légumes botte »
L’attache étant finalement considérée comme un emballage, radis, carottes et poireaux ne pourront plus être commercialisés en botte à moins d’une solution alternative au plastique qui n’existe pas encore. Brahim El Hasnaoui, directeur commercial Fruits & Légumes chez Fleuron d’Anjou, a tenu à témoigner sur les conséquences économiques et sociales qui se profilent sont colossales et appelle les opérateurs à se mobiliser.
L’attache étant finalement considérée comme un emballage, radis, carottes et poireaux ne pourront plus être commercialisés en botte à moins d’une solution alternative au plastique qui n’existe pas encore. Brahim El Hasnaoui, directeur commercial Fruits & Légumes chez Fleuron d’Anjou, a tenu à témoigner sur les conséquences économiques et sociales qui se profilent sont colossales et appelle les opérateurs à se mobiliser.
Le décret précisant les modalités de la suppression des emballages plastiques pour les fruits et légumes dans le cadre de la loi Agec a fini par être publié le 12 octobre. Pour le meilleur et (surtout) pour le pire.
Parmi les subtilités du texte : le rajout, dans la définition d’un emballage, de « l’attache ». Selon l’article 1, définition 3, est considéré comme conditionnement « récipient, enveloppe externe ou dispositif d'attache, recouvrant entièrement ou partiellement les fruits et légumes, afin de constituer une unité de vente pour le consommateur et en assurer la présentation au point de vente ».
L’attache est un conditionnement : un ajout de dernière minute imprévu
Cette modification de dernière minute va impacter directement les légumes botte puisque le mot “attache” englobe toutes les alternatives au flowpack déjà utilisées notamment sur l’asperge, le poireau ou la carde mais surtout les attaches sur radis botte, carotte botte, etc.
Des exemptions existent mais ne concernent pas ces produits. Notamment : exemption jusqu'au 31 décembre 2024 pour asperges, carottes primeur et petites carottes, le terme primeur étant bien spécifique pour la carotte.
« Dès 2022 on ne pourra plus commercialiser de radis rose par exemple -ni en botte ni équeutés en sachet d’ailleurs- ni de carotte botte ou d’oignon botte, s’alarme Brahim El Hasnaoui, directeur commercial Fruits & Légumes chez Fleuron d’Anjou. Le mot “attache” dans la définition, enlevé dans les concertations, est réapparu de manière inattendue dans la version finale. Un véritable coup de massue ! Dans l’état actuel des choses, et sans la certitude d’avoir une alternative viable, c’est toute une filière qui va disparaître ! »
Semis en cours : moins de deux mois pour réagir et agir
« Les interprofessions ont défendu les masses et les AOPn leurs filières, mais personne n’a parlé pour les légumes botte, regrette encore Brahim El Hasnaoui. Nous les opérateurs nantais avons alerté mais nous ne pensions pas qu’on arriverait jusque-là. Il faut désormais qu’on se mobilise, qu’on mette les projecteurs sur la question. J’essaye de mobiliser mes confrères, nous parlons beaucoup avec Nantial qui est aussi très impacté. »
Interfel parle de dénoncer la loi Agec au niveau européen. « Mais nous n’avons pas le temps ! » En effet, les plannings de semi des légumes bottes pour 2022 sont en cours d’élaboration -voire déjà plantés : les oignons de printemps ont déjà été plantés, les semis de carottes sont en cours, les radis pour janvier le seront début novembre… « Les producteurs nous posent des questions, et nous ne savons pas quoi leur répondre. Il faut qu’ils puissent être sûrs de pouvoir commercialiser leurs productions ! Il y a moins de deux mois pour réagir. »
Un impact non négligeable pour les producteurs du bassin nantais
Le déficit économique pourrait en effet être énorme. Chez Fleuron d’Anjou, le légume botte représente 20 % du chiffre d’affaires de la branche légumes (5M € sur 25 M€), mais beaucoup plus chez les producteurs adhérents spécialisées (parfois 60 ou 80 % du chiffre d’affaires).
5 millions de bottes de radis chez Fleuron d’Anjou représentent 40 personnes en ETP (récolte, lavage, bottelage…) plus les producteurs, qui investissent dans les machines, les serres… « J’ai un jeune producteur de 28 ans, installé depuis 5 ans, spécialisé, qui a investi dans des serres multi-chapelles, des chaînes de lavage… qui ne sont pas encore amorties. Je réponds quoi à ses inquiétudes ? », se désole Brahim El Hasnaoui.
Pas d’alternatives au plastique, et le carton flambe
Des alternatives ? « L’attache était déjà l’alternative à l’élastique et au flowpack… Nous avons testé le fil de lin, qui coupe le produit et permet pas de le serrer assez. Le “rafia” actuel est un plastique, le rafia naturel n’est pas adapté aux environnements humides… La solution n’existe pas encore », affirme Brahim El Hasnaoui.
Et si elle existait, il faudrait la mettre en rapport avec le coût et la viabilité du process -rappelons que le bottelage se fait directement au champ. A cela s’ajoute la flambée des coûts du carton [on parle de +30 % depuis le début de l’année] et les délais de livraison face à des demandes mondiales -en particulier française- en explosion. Pas de livraison avant mars-avril 2022 pour des commandes aujourd’hui…