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« Je me suis diversifié en poire car il y avait un créneau à prendre »

Thomas, pomiculteur depuis presque 10 ans à Montech en Occitanie, a fait le choix de la coopération et de la diversification avec le groupe Blue Whale.

Thomas Delfau, 31 ans, est pomiculteur à Montech dans le Tarn-et-Garonne depuis 2014. À l’origine, il était associé au sein du Gaec familial avec son père et ses deux oncles, dans lequel les vergers ne représentaient qu’une petite partie de l’activité agricole dominée par les grandes cultures. Une structure qu’il quitte en 2019, emportant avec lui 22 hectares de vergers, majoritairement en pomme, pour rejoindre un fonctionnement coopératif. Aujourd’hui, il totalise au sein de son exploitation 30 hectares de SAU, dont 22 en propre et le reste en fermage. « Tout est planté en verger, il ne me reste que cinq hectares de libres », indique le jeune homme. Au total, il comptabilise 21 ha en pommes, répartis entre Gala, Granny, Rosy Glow, Canada, Golden, Braeburn, Candine® et quelques variétés bio (Crimson Crisp, Juliet®, Pixie Crunch, Delcored). Et désormais un hectare en poire, en deuxième feuille cette année, avec les variétés Fred® et Williams. Le choix variétal a été guidé par le calendrier, car Thomas souhaitait réserver le mois de juillet pour ses congés. « Je préserve ma vie personnelle, c’est important pour moi », justifie ce père de famille de bientôt deux enfants.

En 2018, Thomas fait une rencontre déterminante, celle de Bertrand Rehlinger, pomiculteur d’expérience et administrateur de Blue Whale. Thomas et Bertrand s’associent alors au sein d’un groupement d’employeurs, en conservant chacun leur exploitation. Ils font partie de la coopérative Stanor, dont Bertrand est président. La Stanor collecte, calibre et conditionne la production de 60 000 tonnes de pommes pour une commercialisation effectuée avec Blue Whale. Le collectif français commercialise 240 000 tonnes de fruits pour plus de 300 producteurs répartis sur cinq bassins de production, pour un total de 6 600 ha de vergers, dont Stanor est actionnaire. La collaboration entre Thomas et Bertrand leur permet de mutualiser les moyens de production.

Thomas intervient en tant que chef de culture sur les exploitations de Bertrand comme sur sa propre exploitation. Ce fonctionnement atypique permet de réaliser des économies d’échelle, et de faciliter l’installation ou la reprise d’exploitation par des jeunes agriculteurs. La transmission et le maintien du périmètre de production restent un enjeu primordial pour Thomas. La collaboration et le modèle coopératif sont très importants pour lui. « Je gère ses vergers comme les miens et on prend ensemble les grandes décisions en ce qui concerne l’éclaircissage, la taille, les traitements, la récolte… Ensemble, on va plus loin, sans aller moins vite », renchérit l’exploitant.

La problématique de la fatigue des sols

Thomas est satisfait de la taille de son exploitation qui lui permet de bien maîtriser son outil. Il souhaite se concentrer sur le renouvellement de son verger. « Avant que je n’intègre la coopérative, il me manquait l’accès à certaines variétés club comme Pink Lady®, Candine®, Pixie ou Crimson », explique Thomas. Problématique aujourd’hui résolue grâce au collectif Blue Whale qui a des droits de plantation sur des variétés club valorisées sur les marchés en tant que distributeur agréé. Reste celle de la fatigue des sols. Mais quoi mettre à la place de la pomme pour renouveler les vergers ? Historiquement, la diversification se fait en kiwi à la Stanor, mais Thomas ne se projette pas sur cette culture, dont la montée en production est trop longue. « En plus, je suis situé sur les premières terrasses de la Garonne, avec des sols qui ne sont pas propices au kiwi », renchérit le producteur.

Une diversification naturelle en poire

« En France, on importe beaucoup de poire pour satisfaire le marché intérieur, donc il y a un créneau à prendre. En plus, une grande part de la gestion du verger se fait comme la pomme, les itinéraires culturaux sont similaires », explique Thomas. La poire était donc le choix de diversification le plus naturel. Planté à une densité de 2 200 arbres par ha, ce nouveau verger a été conçu pour être conduit en verger fermé par filets pour lutter contre les ravageurs. « Ce n’est pas un problème quand c’est pensé dès le départ, mais plus complexe à mettre en œuvre sur verger déjà existant », analyse le producteur. Pour l’instant, Thomas est en phase d’observation. Son verger commencera à produire l’année prochaine. « Jusqu’ici la taille de formation s’est bien passée, même si je manque de recul », reconnaît-il. « C’est pour cela que j’ai planté seulement 1 ha avant de prévoir plus. Pour l’instant je conduis le verger comme en pomme, et je verrai dans les années à venir s’il faut changer des choses ». Pour Thomas, le fonctionnement coopératif à plusieurs niveaux de son exploitation, couplé à la diversification, le rend confiant en l’avenir. Même s’il attend des retours d’expériences sur la poire avant de développer davantage ses surfaces.

 

PARCOURS

2012 BSTA ACSE

2014 rentre dans le Gaec familial après 1 an en tant que salarié

2019 sort du Gaec familial et rentre dans la coopérative Stanor

2021 commence la diversification en plantant 1 ha en poire

Accompagner la diversification

« J’ai rejoint une coopérative adhérente Blue Whale, car cela me permettait d’appartenir à un projet collectif pour grandir ensemble. C’était aussi la possibilité d’accéder à des variétés club mieux rémunérées », raconte Thomas Delfau. « Le marché concurrentiel de la pomme nécessite de se développer sur d’autres espèces rémunératrices pour avoir des exploitations économiquement résilientes », précise-t-il. Des moyens sont mis en place à l’échelle de son collectif pour accompagner les producteurs dans cette adaptation aux contextes climatiques et économiques. Le service technique permet d’établir un plan de recommandations variétales et de bénéficier d’une vision d’ensemble de la demande mondiale et de la production globale du collectif. Le service marketing de Blue Whale travaille sur la valorisation des fruits du collectif en développant la notoriété des marques variétales. Les échanges entre adhérents sont privilégiés, avec des visites sur les vergers historiques de poires basés en Val de Loire, dont a pu bénéficier Thomas avant la plantation sur son exploitation. « Tout cela représente un réel avantage », reconnaît le producteur.

Être résilient face au changement climatique

85 % de l’exploitation est irriguée par aspersion sous frondaison par microjets, qui permet de préserver la ressource en eau. Pour la poire, Thomas Delfau a prévu dans son installation une aspersion sur frondaison pour combiner irrigation et système antigel, après deux années consécutives de gel en 2021 et 2022. « Le manque d’eau reste un point de vigilance. Il est indispensable de déployer des pratiques économes tout en préservant les performances technico-économiques de nos vergers. Pour cela, j’utilise quotidiennement des outils (OAD station météo, tarière) pour piloter au mieux l’irrigation. La poire nécessite moins d’eau du fait de sa récolte plus précoce. Par contre, je fais face à un autre risque : le vent », raconte l’exploitant. Des tempêtes en 2007 puis 2015 ont déjà mis les vergers à terre dans la région. « L’exploitation est dans l’axe d’un couloir à risque », reconnaît Thomas. Et ses vergers sont également à protéger contre la grêle qui arrive chaque année. Il a investi en 2021 dans un équipement Frostbuster (Arbo-meca) de lutte contre le gel juste avant la période de gel intense, qui lui a permis d’y faire face. « J’ai une réelle volonté de monter en compétence dans mes pratiques agroécologiques », analyse Thomas.

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