Emballages plastique pour les fruits et légumes : le Conseil d’Etat annule le décret d’application de la loi Agec
Le décret d’application du 20 juin 2023 sur les emballages plastique des fruits et légumes a été annulé le 8 novembre par le Conseil d’Etat. Une harmonisation des pratiques européennes peut enfin être envisagée.
Le décret d’application du 20 juin 2023 sur les emballages plastique des fruits et légumes a été annulé le 8 novembre par le Conseil d’Etat. Une harmonisation des pratiques européennes peut enfin être envisagée.
Cette décision était attendue par la filière fruits et légumes. Le Conseil d’Etat a annulé, vendredi 8 novembre, pour « vice substantiel », le décret d’application de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (dite loi Agec) qui prévoyait qu’« à compter du 1er janvier 2022, tout commerce de détail exposant à la vente des fruits et légumes frais non transformés est tenu de les exposer sans conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique. Cette obligation n'est pas applicable aux fruits et légumes conditionnés par lots de 1,5 kilogramme ou plus ainsi qu'aux fruits et légumes présentant un risque de détérioration lors de leur vente en vrac dont la liste est fixée par décret ». Après un feuilleton juridique, et un premier décret d’application annulé fin 2022 par le Conseil d’État car il ne respectait pas le périmètre d’interdiction prévu par la loi, le gouvernement avait adopté à la surprise générale un nouveau décret le 20 juin 2023 sans notification à la Commission européenne. L’adoption prématurée de ce décret a entraîné une nouvelle saisie du Conseil d’Etat par les deux syndicats de fabricants d’emballages plastique Plastalliance et Elipso. Trois producteurs majeurs de pêches-abricots et un gros producteur d’haricots français avaient rejoint Plastalliance (qui avait changé ses statuts à cet effet en décembre 2023) afin de faire suspendre le décret du 20 juin 2023.
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Le 8 novembre 2024, le Conseil d’Etat a donc donné raison aux deux syndicats de l’industrie plastique en jugeant que « le gouvernement ne pouvait pas prendre le décret précisant les modalités d’interdiction des emballages plastiques pour les fruits et légumes prévu par la loi dès juin 2023. La Commission européenne avait en effet demandé à la France d’attendre jusqu’à décembre 2023 car un nouveau règlement européen sur les emballages était en cours de négociation ».
Le Conseil d’Etat conclut : « Il reviendra au gouvernement, s’il souhaite prendre un nouveau décret d’application de la loi, de notifier préalablement son projet à la Commission européenne et de respecter les délais imposés par le droit de l’Union européenne avant de l’adopter ».
Une loi à replacer dans le contexte européen
« Sur ce sujet des emballages, comme sur les modes de production et de commercialisation des fruits et légumes frais, la règle européenne doit être la même pour tous », martelait l’interprofession des fruits et légumes, Interfel.
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Une réglementation européenne est en effet actuellement en projet pour la réduction des emballages, le PPWR (pour Proposal Packaging and Packaging Waste Regulation, en français : proposition de réglementation des emballages et des déchets d'emballages). Son objectif est l’harmonisation, dans tous les États membres, de la gestion des emballages. Ce qui implique « notamment un même dispositif de restriction de mise en marché du conditionnement plastique des fruits et légumes à compter du 1er janvier 2030, sous réserve d’exemptions à déterminer », comme le rappelle le syndicat Elipso, qui invite l’administration à respecter « cette séquence européenne… pour des raisons évidentes d’équité concurrentielle et de lisibilité règlementaire ». Ce que ne contrediront pas les professionnels des fruits et légumes.
Une mise en application prématurée du décret qui a un coût
La mise en application du décret du 20 juin 2023 a engendré un coût non négligeable pour les producteurs et metteurs en marché qui en outre ne sont pas complètement satisfaits des alternatives aux emballages plastiques. Pour l'AOP Pêches et abricots de France « et ses 40 millions d’UVC (unités de vente consommateur) », notait en mars dernier Plastalliance, « la dépense totale supplémentaire atteint 10 à 12 millions d’euros pour le passage du plastique vers le carton ». Pour les trois producteurs de pêches et abricots adhérents de Plastalliance, « cela représente entre 4 % et 30 % de leur chiffre d’affaires ». Le syndicat Plastalliance entend d’ailleurs intenter un recours en justice en vue d’obtenir une indemnisation pour le préjudice causé pour certains de ses membres particulièrement lésés.