Dossier Salade : la roquette en pleine ascension
Depuis une dizaine d’années, la production de roquette se développe en France. Les tolérances au mildiou et à la montaison sont des critères essentiels.
Depuis une dizaine d’années, la production de roquette se développe en France. Les tolérances au mildiou et à la montaison sont des critères essentiels.
Auparavant confidentielle, cultivée surtout en Italie et dans le Sud-est, la roquette progresse en France et en Europe depuis une dizaine d’années, avec le développement des jeunes pousses, son goût poivré permettant d’apporter du piquant dans les mélanges. Aujourd’hui, 600 à 700 ha de roquette seraient cultivés en France. Outre le Sud-est, la production s’est développée autour des usines de 4e gamme. Les principales zones aujourd’hui sont la région nantaise, la Normandie, le Nord et, dans une moindre mesure, la Bretagne. Deux types variétaux sont cultivés : la roquette sauvage (Diplotaxis tenuifolia), au goût très poivré et aux feuilles étroites très découpées, et la roquette cultivée (Eruca sativa), aux feuilles moins dentelées et au goût moins marqué. « Par le passé, la roquette cultivée était la plus répandue du fait de ses graines plus grosses, plus faciles à semer que celles de la roquette sauvage, et d’un cycle plus rapide qui la rendait plus facile à gérer pour le marché du frais, explique Stéphane Pavy, responsable jeunes pousses chez Enza Zaden. Aujourd’hui, l’essentiel du marché porte sur la roquette sauvage, qui répond mieux aux attentes des industriels en termes de goût et de découpe de feuille. »
Production en plein champ et sous abri
La roquette aimant la chaleur, l’essentiel de la production en France a lieu en été, sous petits tunnels pour les semis de février-mars, puis en plein champ pour ceux d’avril à octobre, éventuellement sous ombrière l’été dans le Sud. Comme les jeunes pousses de salade, les graines sont semées en planches, à forte densité (3 000 à 3 500 gr/m²) pour assurer le rendement et obtenir des feuilles assez érigées pour être récoltées mécaniquement. Les principales difficultés sur cette période sont le mildiou, les altises et le risque de montée à graines. Les tolérances au mildiou et à la montaison sont donc des axes essentiels de la sélection pour les variétés d’été et, depuis quelques années, les semenciers commencent à proposer des variétés présentant des résistances intermédiaires au mildiou. Contre les altises, la protection repose sur des bassinages réguliers, des insecticides et désormais sur des filets anti-insectes, notamment pour la production biologique qui se développe depuis deux ans. Le cycle sur cette période est en moyenne de 25 jours. La culture est récoltée en une fois, avec une récolteuse à jeunes pousses, avec un rendement d’environ 1,2 kg/m². L’hiver, la production (5 % des surfaces environ) est réalisée sous grands abris plastiques. La roquette ayant besoin de chaleur pour germer et se développer, l’essentiel des semis est réalisé en début d’automne et donne lieu à quatre ou cinq coupes successives. Selon la température, les délais entre deux coupes varient de trois semaines à un mois et demi. Un bon taux de germination, la vigueur et une bonne aptitude à la recoupe sont donc des critères variétaux essentiels sur cette période. Pour faciliter la germination et une levée homogène, essentielle en jeunes pousses, Enza Zaden propose pour les créneaux d’automne et de printemps des graines prégermées. « Outre une meilleure germination en sol froid, ces graines, qui ont une durée de vie réduite, ne se retrouvent donc pas dans la culture suivante si elles n’ont pas germé après le semis », souligne Stéphane Pavy. Du matériel spécifique a aussi été développé pour nettoyer la culture après chaque coupe et permettre une repousse homogène. Outre les qualités agronomiques (rendement, tolérance au mildiou et à la montaison en été, vigueur et capacité de repousse en hiver), les principaux critères variétaux recherchés pour répondre au marché sont une feuille bien découpée dès la première paire de feuilles, d’un vert foncé, au goût poivré marqué et assez épaisse pour une bonne conservation.
Tolérance au mildiou et feuilles épaisses
Leader en France sur le marché de la roquette, Enza Zaden propose une variété de roquette sauvage pour l’hiver, Tricia, de bonne vigueur et qui redémarre facilement après une coupe, et quatre variétés de roquette sauvage pour l’été, toutes tolérantes au mildiou : Letizia, la plus vigoureuse, pour le printemps, Anastasia, très tolérante à la montaison, pour l’été, et Jolizia, nouveauté 2018 pour fin de printemps, été, début automne, au feuillage très découpé dès la première feuille. Vilmorin-Mikado, entré récemment sur le marché des jeunes pousses et de la roquette avec le rachat en 2013 du semencier américain Shamrock, propose des variétés de roquette cultivée, dont Balboa et Daytona, aux feuilles découpées proches d’une roquette sauvage, et plusieurs variétés de roquette sauvage comme la Standard Wild Rocket (pleine saison), Nature (hiver, printemps), Wasabi, aux feuilles peu découpées mais au goût très épicé, et depuis peu la WRX-8, variété tolérante au mildiou sur le créneau pleine saison. « Nous travaillons sur une nouvelle gamme de variétés de roquette sauvage tolérantes au mildiou », indique Xavier Etchebarne, Crop Specialist Jeunes Pousses. Enfin, Rijk Zwaan lance cette année ses premières variétés de roquette. Le semencier propose deux variétés de roquette sauvage tolérantes au mildiou : Sinope RZ, aux feuilles bien découpées, adaptée aux récoltes en jours croissants et longs, et Themisto RZ, au feuillage épais, utilisable toute l’année. Il lance aussi Sparkle RZ, variété de roquette cultivée à feuilles rondes et épaisses, de bonne vigueur.
L’Italie, premier fournisseur des 4es gammistes européens
L’essentiel de la roquette produite en Europe est destiné à la 4e gamme, principalement pour les mélanges de jeunes pousses mais aussi désormais en sachets mono-produit ou en mélange avec de la mâche. Une offre de roquette biologique se développe également depuis deux ans, en 4e gamme ou barquettes 1re gamme. Les pays les plus consommateurs sont la France, l’Italie, l’Angleterre et l’Allemagne. Le premier pays producteur reste l’Italie, où la consommation de roquette est traditionnelle et où la production s’est fortement développée l’hiver depuis dix ans pour approvisionner les 4es gammistes d’Europe du nord. L’Espagne produit également de la roquette, pour son marché intérieur et pour l’export. En Angleterre et en Allemagne, une production existe aussi désormais en été. En France, si les approvisionnements de la 4e gamme sont majoritairement français en été, l’hiver, ils proviennent surtout d’Italie. Depuis peu toutefois, dans l’optique d’une « origine France », la production tend également à se développer en hiver. La production et la consommation de roquette sauvage sont en forte croissance aux Etats-Unis, la production se faisant notamment en Californie et Arizona. En Amérique latine, Australie et Afrique du Sud, la production de roquette cultivée est également assez développée.
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Les jeunes pousses toujours en croissance