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Dossier Fraise : la fraise entre dans le système

Le biocontrôle, la biodiversité, la lumière, la fertilisation et le matériel végétal sont les nouveaux leviers du projet FragaSyst pour réduire l’utilisation des produits phytosanitaires sur fraisier. L’objectif est de tendre vers le zéro pesticide de synthèse en garantissant la rentabilité de la culture.

Le projet FragaSyst combine les acquis de la protection intégrée, dont les apports d’auxiliaires (photo) et cinq nouveaux leviers : le biocontrôle, la biodiversité, la lumière, la fertilisation et le matériel végétal.
© RFL

Un premier projet DEPHY Expé Fraises I qui s’est déroulé de 2013 à 2018 a permis de travailler les solutions de biocontrôle (apports d’auxiliaires et produits de biocontrôle) dans l’objectif de réduction de 50 % des IFT. Depuis septembre 2018, le projet DEPHY Expé FragaSyst prend le relais pour cinq ans en ajoutant de nouveaux leviers. Ainsi, FragaSyst, Fraga pour Fraise et Syst pour essai système, a un double objectif : viser le zéro pesticide de synthèse et garantir la rentabilité économique des exploitations de fraises.

 

 

Présenté lors des journées GIS PICleg à Auray en septembre dernier, FragaSyst se focalise sur la culture de fraises de printemps en hors-sol. « Ce choix est lié à l’importance économique de ce créneau de production qui représente 80 % des volumes français de fraise, soit 45 000 tonnes et est le créneau le plus rémunérateur », commente Marion Turquet, Invenio, responsable du projet. En effet, ces productions sont confrontées à un contexte sanitaire particulier où les pucerons représentent le « point noir ». Ces ravageurs sont représentés par cinq espèces qui chacune nécessite un ou des parasitoïdes spécifiques et ont des réactions différenciées face à l’utilisation des produits de traitement. Les thrips et les acariens sont également à surveiller mais disposent de solution de biocontrôle. L’oïdium est la principale maladie dans ce créneau de production. « Le projet combine les acquis du projet DEPHY Expé Fraises I menés de 2013 à 2018 avec cinq nouveaux de leviers : le biocontrôle, la biodiversité, la lumière, la fertilisation et le matériel végétal », mentionne-t-elle. Ainsi, les nouveaux leviers travaillés au sein de Fragasyst sont variés.

Le nouveau levier de la biodiversité

Les acquis du projet DEPHY Expé 2013-2018 portent notamment sur les « solutions de biocontrôle » et ont permis de valider l’efficacité des apports d’auxiliaires. Des acariens prédateurs (Neoseiulus cucumeris et/ou Amblyseius swirskii) vis-à-vis des thrips, les larves de chrysopes sur foyers de pucerons et les acariens prédateurs (Phytoseiulus persimilis et/ou Neoseiulus californicus) contre les acariens tétranyques sont ainsi utilisables. L’application de produits de biocontrôle fait également partie des « solutions de biocontrôle ». Celle-ci requiert l’homologation et l’inscription, parfois longues et coûteuses, dans la liste des produits phytopharmaceutiques de biocontrôle. Ces produits peuvent présenter une action physique ou peu sélective, ils seront préférentiellement appliqués avant installation des auxiliaires (indigènes ou introduits). « Le levier biodiversité, qui fait partie des nouveaux leviers de FragaSyst, a comme objectif de favoriser la présence, précoce et permanente, d’auxiliaires indigènes et de créer des conditions climatiques favorables au développement des auxiliaires et champignons entomopathogènes introduits », précise la spécialiste. Ce levier concerne les aménagements dans les serres comme l’enherbement du sol des serres afin d’améliorer l’hygrométrie et la présence des auxiliaires indigènes, mais aussi la mise en place de plantes relais vis-à-vis des pucerons.

La lumière UV-C sera le troisième levier travaillé car celle-ci peut intervenir dans deux mécanismes distincts. D’une part, elle stimule des défenses naturelles de la plante, d’autre part elle peut intervenir dans la destruction ou l’inhibition des mécanismes de développement des bioagresseurs, notamment les champignons. Les premières années, des essais spécifiques sur l’utilisation de la lumière UV-C permettront d’évaluer son impact sur l’état sanitaire de la culture, ses rendements et sur l’installation des auxiliaires. Le but est notamment d’adapter la fréquence d’application, les longueurs d’onde, la densité et le type de lampes… « D’autres projets travaillent également ce sujet et leurs résultats viendront alimenter le projet FragaSyst afin d’intégrer ce levier dans les systèmes », commente Marion Turquet. FragaSyst pourra également prendre en compte et intégrer dans ses parcelles FragaSyst des leviers travaillés dans d’autres projets comme celui concernant les “Stratégies de protection alternatives contre les pucerons du Fraisier” nommé PALPuF (1) dans le cadre de l’appel à projet « Protection durable des cultures sans néonicotinoïdes ».

Le choix de la variété est un point capital

Il a également été montré que la qualité d’alimentation d’une plante impacte sa sensibilité aux divers bioagresseurs et influence le développement et la reproduction des ravageurs. De fait, le levier fertigation doit permettre de trouver un compromis entre le rendement et l’état sanitaire en travaillant notamment sur la cadence d’arrosage et les apports d’éléments nutritifs. « Ce travail sur l’alimentation hydrique et minérale de la plante est lié au levier “matériel végétal” notamment l’adaptation différenciée des besoins selon la variété », précise Marion Turquet. En effet, le choix de la variété est un point capital dans la construction de systèmes de production sans pesticide. Il existe notamment des variétés tolérantes vis-à-vis de l’oïdium qui peuvent réduire de manière conséquente la présence de cette maladie. L’objectif de FragaSyst est donc de trouver des variétés apportant un compromis entre le rendement, les niveaux de tolérance à un ou plusieurs bioagresseurs et les attentes du marché en matière de qualité de fruit. Les années 1 et 2 vont permettre une évaluation variétale en station d’expérimentation. A partir de la troisième année, ces nouvelles variétés seront intégrées dans les systèmes de production étudiés. Leur évaluation portera principalement sur l’oïdium. « Mais la fraise est connue par ses variétés, il faut donc trouver un compromis entre attente de la production, de la distribution et des consommateurs », conclut Marion Turquet.

(1) PALPuf : Exploitation des leviers biocontrôle et fertilisation pour la proposition de stratégies de Protection ALternatives contre les PUcerons du Fraisier (2018-2019)

 

Avis d’expert : Marion Turquet, responsable de projet à Invenio

Comment voyez-vous le déploiement du projet FragaSyst chez les producteurs et l’implication de l’aval ?

Trois des six systèmes suivis dans le cadre du projet FragaSyst sont chez des producteurs et deux des cinq partenaires sont des organisations de producteurs. Ce projet est donc bien implanté en mobilisant l’ensemble de la filière fraise de la production à la commercialisation.

Qu’attendez-vous de ce projet ? Quels résultats sont espérés ?

Il s’agit d’un travail sur des leviers innovants, divers qui devrait permettre, au bout de six ans, d’identifier la combinaison de leviers la plus adaptée à chaque système étudié pour répondre aux objectifs du projet. Ces objectifs atteints, la filière fraise aura alors des solutions respectant l’environnement et la santé humaine et répondant aux attentes des consommateurs et des producteurs de fraises.

 

FragaSyst et ses partenaires

Ce projet rassemble cinq partenaires, trois stations d’expérimentation régionale (Invenio, Aprel, LCA) et deux organisations de producteurs (CMO et Rougeline). Ces partenaires sont complémentaires et représentatifs des principales régions de production de fraises en France. Six systèmes seront suivis par ces cinq partenaires. Au sein de chaque système, une combinaison de leviers agronomiques et environnementaux innovants sera mise en place pour répondre aux objectifs.

 

 

 

 

DEPHY Expé Fraises I : le bilan

Le projet DEPHY Expé Fraises I qui avait pour intitulé « Vers une protection biologique intégrée des cultures de fraises sous abris » s’est déroulé de 2013 à 2018. Cinq sites, deux créneaux de production (Gariguette – Remontante) et quatre partenaires : Aprel, CMO (Savéol), LCA et Invenio étaient porteurs du projet en étudiant une parcelle stratégie alternative et une parcelle de référence sur chaque site. Au bout de cinq années d’expérimentation, l’objectif donné de réduction de 50 % de l’utilisation des produits phytosanitaires a été atteint dans 70 % des situations sur Gariguette. Celui concernant les propositions de stratégies alternatives globales, fiables et réalistes sur le plan technico-économique, a permis d’évaluer des apports d’auxiliaires adaptés selon les créneaux de production et les régions, a montré les difficultés de contrôle des pucerons notamment dues à l’inefficacité des apports de parasitoïdes. Sur un plan économique, les stratégies PBI s’avèrent cinq à neuf fois plus chères qu’une stratégie de référence.

 

La lumière UV-C

Les rayonnements UV-C sont utilisés pour stimuler les défenses des plantes. Des travaux de recherche menés à l’Université d’Avignon ont montré un effet stimulateur avec des doses faibles et répétées d’UV-C (inférieur à 1,70 kJ/m2) pour la laitue et la tomate contre Botrytis cinerea ainsi que contre l’oïdium du fraisier. Cette stimulation est associée au renforcement de la paroi cellulaire, à l’augmentation des composés phénoliques et à l’augmentation de l’activité de certaines enzymes antioxydantes.

 

 

Rédaction Réussir

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