Dossier Asperge : planter sans se planter
L’implantation d’une aspergeraie se réalise pour plusieurs années. Elle conditionne la reprise des plants, la rapidité d’entrée en production puis la longévité de la culture. Des règles sont donc à suivre.
L’implantation d’une aspergeraie se réalise pour plusieurs années. Elle conditionne la reprise des plants, la rapidité d’entrée en production puis la longévité de la culture. Des règles sont donc à suivre.
L’asperge est une plante pluriannuelle de la famille des Liliacées. Sa production correspond à une culture pérenne pour une durée de huit à dix ans, voire plus, chose rare dans le secteur légumier. De fait, sa mise en culture suit un itinéraire technique particulier, proche de l’arboriculture, avec des précautions particulières notamment lors de la préparation du sol.
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Deux ans avant la mise en place des griffes
La culture d’asperge exige un sol léger ne présentant pas de risque d’asphyxie et se réchauffant facilement. Il ne doit pas être battant (sol sableux, sablo-limoneux, sablo-argileux) sans horizon imperméable ou remontée de la nappe phréatique. Le sol doit être drainant même en profondeur. Pour l’asperge blanche, éviter les sols caillouteux qui empêchent d’avoir des turions droits. Les asperges vertes supportent des terres plus lourdes et plus caillouteuses. Le pH idéal est de 6 à 7,5. Une rotation de dix ans sans retour de l’aspergeraie sur la même parcelle est conseillée. Toutefois, les contraintes de rotation, de disponibilité de terrain et la spécialisation des exploitations conduisent parfois à planter asperge sur asperge (voir article plantation replantation). L’implantation d’une aspergeraie s’envisage deux ans avant la mise en place des griffes, année N-2 avec le nivellement du sol et le drainage de la parcelle si nécessaire afin de favoriser l’écoulement de l’eau. Il convient d’éviter les précédents défavorables, notamment ceux favorisant le risque de Rhizoctonia violacea comme la luzerne, le trèfle, la betterave, le peuplier, la carotte, la pomme de terre. En revanche, le seigle, le colza, la moutarde ou les céréales à paille permettent de nettoyer la parcelle et d’assurer un décompactage du sol favorable à l’asperge. Un test PNR du sol (Potentiel nécrotique racinaire) peut être effectué pour vérifier que la parcelle ne présente pas de risque de la fusariose (voir encadré). Au cours de l’année N-1, la parcelle doit être travaillée au préalable pour éliminer les mauvaises herbes et notamment les vivaces : chiendent, liseron, chardon… Il est conseillé de faire des faux semis, de désherber avant la montée à graines des mauvaises herbes, d’implanter un engrais vert.
Ne pas endommager les jeunes tiges
L’année N de la plantation. Le sol doit être aéré en profondeur par un défonçage (charrue) puis un sous-solage à 80 cm en deux passages, le premier en travers du rang, le second dans le sens du rang. Actuellement la tendance est à un travail profond du sol, à 60 cm et jusqu’à 1,20 de profondeur, uniquement sur le rang à l’aide d’une rotobêche afin de fabriquer un nouveau profil de sol plus profond, homogène et surtout plus aéré. L’objectif est de faciliter le développement racinaire, en volume et en profondeur, par une bonne oxygénation du sol, sans semelle de compactage et une mise à disposition des éléments nutritifs sur grande amplitude du profil (voir encadré). Avant la plantation (quand le sol est bien ressuyé), réaliser des tranchées d’environ 30 cm de large dans lesquelles seront positionnées les griffes. Attention, il ne doit pas y avoir de mottes au fond. Préférer la plantation machine car plus homogène. Elle permet de mieux maîtriser la densité choisie et la profondeur.
Ces tranchées doivent être profondes de 20 à 25 cm pour l’asperge blanche et de 15 cm pour l’asperge verte. Les lignes de plantation doivent être positionnées en priorité dans le sens de la pente afin d’obtenir un bon écoulement de l’eau et ensuite du vent afin de ne pas endommager les jeunes tiges et de limiter l’envol des plastiques par forts vents. De plus, par la suite, le vent assainit la parcelle en la séchant. Il est également possible d’envisager des plantations sur billon pour obtenir plus de masse radiculaire et limiter les situations d’asphyxie racinaire dans le cas d’inondations. L’enherbement de l’entre rangs dès la première année de plantation avec une céréale (blé, seigle) est également possible afin de créer un microclimat favorable aux jeunes plantations.
Des apports au moment du développement végétatif
Un amendement organique (fumier composté, compost de déchets verts…), conseillé pour améliorer la structure du sol (aération, sol plus meuble), est apporté de préférence en août de l’année précédant la plantation. L’amendement organique sera complété par un engrais minéral, apporté avant la plantation, en fonction des résultats de l’analyse de sol. Avant la plantation, une analyse de sol entre 10 et 30 cm de profondeur et une seconde entre 40 et 80 cm (zone d’exploration des racines) est fortement conseillée pour connaître les réserves du sol et déterminer la fertilisation de fond. Préférer une analyse en bases échangeables avec granulométrie. Les apports d’engrais dépendent de l’âge de la culture. En première année, les besoins sont modérés, c’est en deuxième année que les besoins sont plus importants. Les apports sont à réaliser au moment du développement végétatif de la plante pendant qu’elle constitue ses réserves. Après mi-juillet, un apport d’azote sera néfaste car il y a risque de départ en végétation (voir tableau).
Le goutte-à-goutte enterré, très développé il y a encore quelques années, a laissé sa place au goutte-à-goutte de surface avec des gaines jetables ou pas. Celui-ci permet de s’assurer une bonne humidité sur le plateau qui favorisera de nouvelles pousses. La surveillance du colmatage et des ruptures sera facilitée. Cette méthode, d’une ligne de goutteurs les six premières années puis deux lignes de gaines quand le plateau s’élargit, permet de s’assurer des apports hydriques nécessaires à la production des pousses et du volume de végétation. La première année de plantation, il convient de maintenir une bonne humidité du sol mais pas excessive afin d’attirer les racines en profondeur. Suivant le type de sol et la météo, faire une irrigation d’environ 80 % de l’ETP tous les trois jours durant un mois et ensuite de 90 % de l’ETP tous les quatre ou cinq jours. L’irrigation par aspersion est possible mais les risques de développement de maladies fongiques sont plus importants ainsi que de mauvaises herbes. La protection sanitaire doit veiller à lutter contre les mouches et surtout les criocères qui arrivent un à deux mois plus tôt que sur les plantations de deux ans et plus encore en récolte.
Source : Fiche Culture de l’asperge blanche et verte Chambre d’agriculture 13
Tester le potentiel nécrotique de votre sol
Un test PNR du sol (Potentiel nécrotique racinaire) peut être effectué avant la mise en place d’une culture d’asperge pour vérifier que la parcelle ne présente pas de risque élevé vis-à-vis de la fusariose. Le prélèvement de terre s’effectue en quadrillant la parcelle de manière assez serrée (environ 100 prélèvements par hectare). Après avoir dégagé les premiers centimètres de terre, prélever environ un quart de litre de terre sur une quinzaine de centimètres. Les échantillons, entre cinq et vingt, sont regroupés dans des sacs plastiques, puis mis dans des cartons (éviter de percer les sacs), stocker à l’abri de la lumière et envoyer à la Fredon région Centre qui pourra réaliser un test à partir des plantes sensibles à la fusariose permettant de déterminer un indice nécrotique. (Fredon Centre, Clinique du végétal, 13, avenue des Droits de l’Homme, 45921 Orléans Cedex 9, Tél. : 02 38 71 95 73, cliniqueduvegetal@fredon-centre.com)
Planter dans un sol profond
L’utilisation de la rotobêche et de plantation dans un sol profond est une technique assez récente. L’objectif est d’amener le plus possible de bonne terre en profondeur et d’oxygéner le sol afin d’y attirer un maximum de racines. Certains matériels permettent de travailler le sol jusqu’à plus d’un mètre de profondeur. Toutefois il est impératif d’adapter le travail à la profondeur du sol et de la couche-mère en évitant la remontée de pierres, argile, craie etc. Pour que le sol soit travaillable sur tout le profil que l’on désire, effectuer les travaux en été ou à l’automne plutôt qu’au printemps. Avant le passage de la rotobêche, il est nécessaire de faire un décompactage de la parcelle en travers du champ sur toute la surface puis un second passage uniquement sur le rang. « La remontée de la terre pauvre en surface n’est pas un problème car la bonne terre en surface ne sert à rien si ce n’est de cantonner les racines à l’horizontale. A ces profondeurs, on mélange trois fois plus de volume de terre qu’auparavant. Le sol que l’on va chercher en profondeur est généralement moins riche que le superficiel. Il faut donc fabriquer un nouveau sol en apportant au minimum trois fois plus de matière organique et trois fois plus d’acide phosphorique à l’hectare concentré sur le rang qu’avec les méthodes sans rotobêche », mentionne Christian Befve, consultant spécialisé en asperge.