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Arboriculture : qu'apportent les couverts végétaux dans les vergers ?

L’agrostis et l’achillée millefeuille ont assuré un taux de recouvrement satisfaisant, après cinq années d’observation de vingt plantes couvre-sol réalisées par le Grab.

Les couverts végétaux sur le rang peuvent avoir différents bénéfices : apporter le gîte et le couvert à certains auxiliaires, favoriser le fonctionnement biologique du sol, être source d’azote… Certains inconvénients ne sont toutefois pas à négliger, comme la concurrence hydrique et la fourniture d’un espace favorable aux campagnols par exemple.

Un taux de recouvrement très variable

Afin d’évaluer l’intérêt de différents couverts, vingt plantes couvre-sol ont été suivies dans un verger de pommier en condition subméditerranéenne, dans le cadre des projets Placohb et BioHortitech. Les critères de choix des espèces ont porté sur plusieurs caractéristiques : attractivité pour les auxiliaires, facilité et/ou rapidité d’installation, faible concurrence, effets allélopathiques et/ou répulsifs d’insectes... Sur cinq années d’observation, le taux de recouvrement moyen au sol varie entre 0 et 77 %, et traduit la très forte variabilité observée dans le verger. Les espèces qui ont les recouvrements les plus élevés sont l’agrostis stolonifère, l’achillée millefeuille, la centaurée jacée, la petite pimprenelle, l’absinthe et la marguerite.

L’alysson maritime s’est très bien développé après son semis au printemps : il recouvrait 70 % durant l’été. En revanche, il a complètement disparu au cours de l’année suivante. L’intérêt de pérenniser ce couvert, potentiellement intéressant pour accueillir des auxiliaires, ne s’est donc pas concrétisé dans notre situation. Il peut par contre être intégré dans un mélange avec des espèces vivaces. Le sainfoin est une légumineuse dont la durée de vie moyenne est habituellement de 2 à 4 ans, et il est connu pour avoir un système racinaire profond. Dans le verger suivi, son installation a été progressive et elle a atteint un recouvrement maximum après la deuxième année, occupant 40 % du rang. Sa pérennité est limitée : elle n’était plus présente dès la troisième année.

Agrostis et achillée millefeuille sur le podium

L’agrostis stolonifère, graminée connue pour former des tapis végétaux denses, s’est rapidement développée après semis pour former un couvert très homogène. Pendant 5 ans, celle-ci a occupé 60 à 95 % du rang selon la saison jusqu’en 2022. Cependant, depuis 2023, la présence d’agrostis sur le rang a chuté à 40 %. Comme cette espèce est peu adaptée à des épisodes de sécheresse, cette diminution pourrait être liée aux conditions sèches au cours de l’été 2022, malgré l’irrigation estivale.

L’achillée millefeuille s’est progressivement installée sur le rang après son semis, jusqu’à atteindre 70 % à la fin de son premier été (photo mars 2022).

L’achillée millefeuille s’est progressivement installée sur le rang après son semis, jusqu’à atteindre 70 % à la fin de son premier été. Parmi les vingt espèces implantées, c’est la seule dont le recouvrement au sol a constamment augmenté, jusqu’à atteindre près de 100 %. Cette espèce s’est révélée très compétitive par rapport aux autres espèces, occupant l’espace jusqu’à ne plus leur laisser de place.

La marguerite s’est développée rapidement pour couvrir 70 % du rang dès la première année, et occuper 60 à 80 % du rang pendant trois ans. En revanche, son recouvrement au sol est bien plus hétérogène que l’achillée millefeuille et l’agrostis, et son taux de recouvrement a chuté sous les 20 % depuis l’automne 2022, soit cinq ans après implantation. Pendant la floraison qui est très étalée, de juin à septembre, le couvert accueille une importante diversité d’insectes auxiliaires (voir encadré).

Les espèces qui se sont « réveillées »

Bien que l’absinthe se soit maintenue discrète pendant trois ans, avec moins de 20 % d’occupation du sol, elle s’est intensément développée au cours du quatrième été, pour s’étendre depuis 60 à 90 % de la surface du rang. La faible présence d’adventices dans le couvert d’absinthe semble témoigner de son effet allélopathique. En effet, le genre Artemisia produit du cinéole, un terpène inhibant le développement de certaines plantes. La croissance de cette plante thermophile jusqu’à 1,4 m de hauteur est à noter : elle rejoint les branches basses des arbres, ce qui ne facilite pas l’entretien du verger lorsqu’elle est implantée sur le rang. La centaurée jacée s’est développée progressivement pour recouvrir 20 % du rang en première année, puis 80 à 100 % du rang en quatrième et cinquième années, respectivement.

La floraison étalée, de juin à août, lui confère un intérêt pour accueillir des auxiliaires qui ont besoin de nectar en plein été. Le couvert atteint fréquemment une hauteur de 1 m. Après trois années de quasi-absence, la menthe poivrée, le serpolet et la tanaisie se sont progressivement développés, pour atteindre au maximum 40 % de recouvrement du rang, par petits îlots de végétation. Durant cinq années, certaines espèces n’ont jamais dépassé un recouvrement au sol de plus de 25 % : anthémis des teinturiers, camomille romaine, épervière piloselle, germandrée petit chêne, lierre rampant, mauve sylvestre, sarriette rampante, sauge des prés.

L’extrapolation des résultats est délicate : des mauvaises conditions au moment de l’implantation peuvent conduire à un mauvais développement, ce qui ne veut pas dire que l’espèce n’est pas adaptée et/ou n’a pas un intérêt en verger. Les cinq années de suivis mettent en évidence des comportements très variés. Dans nos conditions, l’achillée millefeuille apparaît comme l’espèce testée qui a le meilleur recouvrement et intérêt pour favoriser la biodiversité fonctionnelle (floraison abondante et étalée). Une faible présence de campagnols dans le verger a été observée, aucune mortalité d’arbre n’a été constatée.

Claude-Éric Parveaud, Maxime Jacquot, Johanna Brenner – Grab ; Armand Guillermin – Inrae
Source : Arbos Bio Infos - J. Démaret

Un ou deux fauchages par an sur le rang

Les observations des plantes couvre-sol ont été réalisées pendant cinq ans afin d’identifier les espèces végétales capables de s’installer durablement sur le rang de plantation. La parcelle expérimentale est située sur le domaine de Gotheron (Saint-Marcel-lès-Valence, Drôme). Les espèces ont été semées sur le rang en automne 2017 ou au printemps 2018, ou plantées en godet en automne 2017 (menthe poivrée, sarriette rampante, serpolet, épervière piloselle). L’irrigation des arbres et des plantes couvre-sol est assurée par des microjets disposés en pendulaire. Les apports d’eau sont réalisés deux fois par semaine (20 mm/semaine), soit des apports annuels compris entre 63 mm (2021, année pluvieuse) et 600 mm (2018, pour faciliter l’installation des plantes couvre-sol). Entre 2018 et 2022, les précipitations annuelles ont été comprises entre 560 mm et 900 mm. L’entretien sur le rang a été limité à un ou deux fauchages par an avec une débroussailleuse à fil au-dessus des espèces implantées, pour limiter le développement des adventices, tout en laissant exprimer la capacité des plantes testées à contrôler les adventices.

Des effets sur la biodiversité et les vers de terre

En mars 2019, l’achillée, l’agrostis stolonifère, la marguerite et la petite pimprenelle présentaient un recouvrement suffisant pour comparer les populations de vers de terre associées. Les plus grandes abondances et biomasses de vers de terre ont été observées sous la petite pimprenelle, avec plus de soixante individus dans 27 L de sol. Des abondances intermédiaires sont observées sous l’achillée et la marguerite, la plus faible abondance est observée sous l’agrostis stolonifère. En ce qui concerne l’entomofaune qui vit sur les plantes couvre-sol, les échantillonnages par aspiration en mai 2019 montrent que l’agrostis accueille le plus grand nombre de groupes différents. Les trois plantes couvre-sol étudiées abritent une plus grande diversité faunistique que la flore spontanée du verger.

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