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Des pistes pour améliorer le retour en production des complants de vigne

Utiliser des plants haute tige ou encore des substrats permet, sous certaines conditions, une entrée en production des complants plus rapide.

Les complants peuvent mettre jusqu'à sept ans pour entrer en production. Certaines pratiques permettent de favoriser une pousse rapide.
Les complants peuvent mettre jusqu'à sept ans pour entrer en production. Certaines pratiques permettent de favoriser une pousse rapide.
© X. Delbecque

En concurrence pour l’eau, les nutriments et la lumière avec des congénères adultes, les complants ont la vie dure. Au point qu’il n’est pas rare de devoir attendre sept ans pour les voir produire. Il existe pourtant des moyens pour gagner un peu de temps sur la remise en production. Par exemple, de nombreux pépiniéristes proposent aujourd’hui des plants haute tige, c’est-à-dire avec un porte-greffe long de 60 à 80 cm. Le greffon se retrouve ainsi à hauteur du fil porteur, ou presque, dès la plantation. Emeric Kreyer, viticulteur coopérateur à Rodern, dans le Haut-Rhin, utilise de tels plants depuis près de vingt ans et pour lui le constat est clair : il gagne généralement un an sur le retour en production. « La première année je les taille à deux yeux quand même, pour ne pas les épuiser, témoigne-t-il. La deuxième année les bois atteignent souvent le deuxième fil et la troisième année je suis quasiment sûr d’avoir mon arcure» Même si ces plants lui coûtent presque le double des plants classiques, le viticulteur y trouve d’autres avantages. D’une part il n’a pas besoin de manchon pour les protéger des ravageurs et des herbicides, et d’autre part il gagne du temps à l’épamprage, puisque les tiges hautes de porte-greffe sont éborgnées en pépinière. Plus rien ne pousse sous le fil porteur.

Des baguettes établies dès trois ans dans 50 % des cas

Le syndicat des Côtes-du-Rhône a réalisé des essais avec les chambres d’agriculture locales, entre 2014 et 2016, sur l’optimisation de la remise en production. Et Viviane Bécart, chargée d’expérimentation du syndicat, confirme que les plants haute tige permettent généralement de gagner un an sur l’établissement du cep. « Mais attention toutefois. Il faut que la vigueur du pied soit en cohérence avec son enracinement, prévient-elle. Il ne faut pas laisser toutes les grappes dès la troisième feuille sous peine de l’épuiser. » Ce type de plant possède davantage de réserves, mais aura peut-être plus de difficultés à alimenter le haut des tiges en conditions séchantes, analyse encore la technicienne.

Du côté de la chambre d’agriculture du Vaucluse, les résultats à la troisième année d’expérimentation ont montré que 50 % des plants haute tige avaient au moins une première baguette établie. Alors que les plants courts avaient au mieux un tronc établi, et étaient encore taillés à deux yeux dans 40 % des cas. L’IFV recommande par ailleurs de bien tuteurer et attacher ces plants hauts, qui peuvent être fragiles, et d’éviter les porte-greffes qui ont de faibles croissances en épaisseur, comme le SO4 et le Riparia.

Certains plants en motte contiennent tous ce qui est nécessaires à la croissance

Un autre moyen d’accélérer l'entrée en production est d’accompagner le jeune plant d’éléments nutritifs. La firme Angibaud propose par exemple un support de culture, Angiplant, composé de matières organiques et enrichi en guano de poisson. La nouvelle version du produit contient même des mycorhizes. « Cela fait quinze ans que nous proposons l’Angiplant et les retours de viticulteurs sont très positifs, assure Valérie Labau, conseiller agronomique dans le Vaucluse pour le groupe Perret. Ils observent un écart de développement dès la première année. Nous leurs avons fait essayer plusieurs choses, comme des engrais bouchons, et c’est ce qui marche le mieux. » Des améliorations notées sur des parcelles de garrigue sèches et caillouteuses, qui seraient peut-être moins flagrantes dans des terrains frais et profonds, remarque la conseillère. « Le seul aspect négatif c’est qu’il faut ouvrir davantage le trou de plantation et bien mettre le produit au fond, au niveau des racines, poursuit-elle. Cela prend plus de temps. » Sans compter la logistique pour apporter 2 à 4 litres de mixture par plant.

Les éléments nutritifs peuvent également être directement intégrés dans une motte de terreau, tenue autour des racines grâce à un filet biodégradable. Ces plants en motte sont tout particulièrement recommandés par les pépiniéristes dans le cadre de la complantation, pour assurer un développement plus rapide. « Nous avions testé de tels plants, qui étaient en plus mycorhizés, dans nos essais, mais nous étions sur une terre argileuse, et nous avons constaté un effet de bulle, avec du terreau sec au milieu de l’argile sèche, ce qui était pire que le témoin, relate Viviane Bécart. Il aurait éventuellement fallu émietter la motte. » Les pépinières Velletaz précisent d’ailleurs qu’il est capital de bien tasser la terre autour de la motte à la plantation, et d’arroser abondamment, dans le but de lier les deux et de chasser l’air.

Laisser passer la lumière pour aider la photosynthèse des petits plants

L’entreprise ICL propose quant à elle une petite tablette d’engrais enrobé que l’on met dans le trou de plantation, nommée Agroblen tablet. Les grains d’engrais se séparent au contact de l’humidité du sol, et l’enrobage permet une libération lente et contrôlée des éléments. « Cela évite de brûler les racines, comme ça pourrait être le cas avec des billes d’engrais classiques », explique Jacky Dumont, commercial de la firme. ICL a réalisé des essais dans des vignes de Gironde et de Charente-Maritime, et indique avoir observé entre + 10 % et + 29 % de vigueur en août de l’année de la plantation, comparé à un témoin sans engrais.

Pour finir, une voie parfois mentionnée mais peu explorée est celle des « puits de lumière ». Boris Desbourdes, vigneron au domaine de la Marinière dans le chinonais, a remarqué que les complants dans les endroits avec moins de concurrence lumineuse poussent souvent plus vite, et se demande s’il y a un effet. Il a imaginé une expérience où il viendrait tailler toutes les pousses des vignes voisines pour laisser le champ libre aux jeunes complants, dans le cadre du programme Mobilisation et innovation vigneronne (MIV) adossé au plan dépérissement. Le vigneron n’a malheureusement pas eu de temps pour lancer son expérimentation. Dommage, car des retours sur cette pratique ingénieuse seraient bienvenus !

De la réussite d’une complantation

Viviane Bécart alerte sur un point essentiel : le taux de reprise des complants et la vitesse de retour en production dépendent grandement des soins apportés à ces jeunes plants par le viticulteur. « Mettre vingt centimes de plus pour avoir une tige longue ne sert à rien si l’on ne s’en occupe pas », illustre-t-elle. Pour espérer optimiser le retour en production, il faudra veiller, en plus de ces pratiques, à arroser les complants en été et faire en sorte qu’ils ne soient pas envahis d’herbe. CQFD…

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