[Conditions de travail] Les éleveurs laitiers sont les plus insatisfaits
Une enquête réalisée dans le cadre des projets franco-belges Agreen-job et Cow Forme confirme le malaise lié au manque de temps libre. L’emploi de salariés peu qualifiés est une des voies explorées.
Une enquête réalisée dans le cadre des projets franco-belges Agreen-job et Cow Forme confirme le malaise lié au manque de temps libre. L’emploi de salariés peu qualifiés est une des voies explorées.

La problématique liée aux conditions de travail des agriculteurs et à la pénurie de main-d’œuvre est au centre des projets Agreen-job et Cow Forme (lire encadré) qui ont débuté en janvier 2020. La première étape a consisté à mener une enquête transfrontalière sur le travail et l’emploi en agriculture. Elle avait notamment pour objectif d’évaluer le ressenti d’agriculteurs engagés dans différents systèmes de production (lait, viande, culture, maraîchage…) face à leurs conditions de travail. Mais aussi d’identifier leurs besoins. Ils sont 274 à avoir répondu à l’enquête dont 109 producteurs laitiers.
Une des grandes conclusions confirme que ce sont les éleveurs laitiers qui vivent le plus mal leur métier. La problématique manque de temps libre ressort très fortement dans cette catégorie (78 %), suivie de la charge mentale (67 %) et de la pénibilité du travail (56 %) explique Emmanuel Béguin, de l’Institut de l’élevage. Ces pourcentages sont systématiquement supérieurs à ceux enregistrés dans les autres productions.
Manque de formations dédiées à l'embauche d'un salarié
Parmi les solutions recherchées pour améliorer les conditions de travail, plus de la moitié (55 %) des éleveurs laitiers ont exprimé le souhait de s’équiper, contre un tiers seulement en moyenne pour l’ensemble des agriculteurs enquêtés. L’embauche d’un salarié est envisagée par 25 % des producteurs laitiers. Mais cette stratégie se heurte à plusieurs écueils : les difficultés pour trouver un salarié correspondant à ses besoins, le coût financier, la réglementation (surtout en France)… Au final, bon nombre d’agriculteurs n’osent pas franchir le pas, constate Pascal Turquier, de la chambre d’agriculture des Ardennes.
Cette difficulté est accentuée par l’insuffisance des conseils et des formations dédiés à l’embauche d’un salarié. « Le conseil est très centré sur la gestion technique et économique des exploitations, mais rarement sur les relations humaines et le management », expose Pascal Turquier.
« Globalement, les éleveurs laitiers ont peu d’expérience dans le recrutement de salariés. Mais avec l’agrandissement des exploitations, ils ont de plus en plus besoin d’embaucher. Ils ont par conséquent besoin d’accompagnement. C’est un des objectifs de Cow Forme », souligne Emmanuel Béguin.
Six groupes d'éleveurs vont se pencher sur des solutions
Ce projet va se poursuivre avec la création de groupes d’éleveurs laitiers (Focus Farms). Animés par des conseillers, les 48 éleveurs concernés vont se pencher durant les prochains mois sur les moyens d’améliorer l’organisation du travail dans leurs exploitations mais aussi l’attractivité du métier de salarié en élevage.
Ce dernier point est un autre gros défi à relever. L’enquête a en effet confirmé que l’agriculture pâtit d’un déficit d’image et d’une méconnaissance chez les demandeurs d’emplois. L’embauche de salariés peu qualifiés est un levier envisagé pour faire face à la pénurie en main-d’œuvre. Mais pour inverser la tendance, il va falloir faire des efforts de formation et de communication à destination des demandeurs d’emploi.
Deux projets franco-belges dédiés à la problématique travail
Le projet Cow Forme est centré sur le travail en élevage laitier. Il bénéficie de fonds européens dans le cadre du programme Interreg. De son côté, le projet Agreen-job vise à trouver des solutions pour faciliter l’emploi en agriculture en général (exploitations, abattoirs…). Il bénéficie également de fonds européen, mais aussi régionaux et du département des Ardennes. Ces deux projets s’inscrivent dans le cadre du programme de coopération territoriale européenne Interreg France-Wallonie-Vlaanderen. Ce programme a pour objectif de favoriser les échanges économiques et sociaux entre quatre régions frontalières : les régions Hauts-de-France et Grand Est en France ; la Wallonie, la Flandre occidentale et orientale en Belgique.