Suivre la courbe d’acidification de ses fabrications de fromages de chèvre lactiques
L’acidification joue un rôle essentiel dans la transformation et la qualité finale des fromages. C’est un paramètre important à suivre lors des fabrications pour les producteurs fermiers.
L’acidification joue un rôle essentiel dans la transformation et la qualité finale des fromages. C’est un paramètre important à suivre lors des fabrications pour les producteurs fermiers.
Au cours de la fabrication de fromages lactiques, l’acidification, c’est-à-dire la consommation du lactose par les bactéries lactiques, joue un rôle central et doit être maîtrisée. Pour bien la piloter, il est indispensable de suivre son évolution au cours et au fil des fabrications.
Quatre points de mesures
Le profil d’acidification est la courbe de suivi de l’évolution de l’acidité Dornic (A°D) ou du pH au cours du caillage. Pour établir une courbe, il est nécessaire de prendre au moins quatre points de mesure : sur lait de départ, sur lait à l’emprésurage, sur sérum 19 heures après emprésurage et sur sérum 24 heures de caillage après emprésurage.
Il existe une courbe «objectif» à laquelle se référer. Elle indique les zones d’acidité Dornic ou pH à atteindre. Selon ces données, l’intervalle à viser est de 15 à 25 A°D à l’emprésurage, entre 25 et 40 10 heures après emprésurage, entre 50 et 65 au moulage, soit 24 heures après emprésurage. Il est important avec l’acidité Dornic de raisonner en gain d’acidité et de modifier ses repères en fonction de l’acidité initiale de son lait, donc de sa richesse en protéines. Pour le pH, avec un lait à 6,6 à l’emprésurage, viser entre 5 et 6,1 10 heures après emprésurage, et un pH de 4,4 au moulage, 24 heures après emprésurage.
Un lait de départ sain
À partir de ces courbes, deux profils ont été définis : un lent et un plus rapide. Pour le premier, l’acidification est lente durant les huit premières heures et très rapide entre 8 et 24 heures : ce profil est obtenu avec un stockage du lait du soir à 4-8 °C et le mélange des deux traites. L’emprésurage est réalisé à 18-20 °C. Ce profil ne permet pas une protection acide dans les premières heures, donc la maîtrise sanitaire est limitée, d’où la nécessité d’avoir un lait sain. Le second traduit une acidification rapide dans les huit premières heures, l’acidité optimale est pratiquement atteinte et on constate un ralentissement de l’acidification : ce profil est obtenu avec une fabrication de type prématuration.
Attention à ne pas dériver et à ne pas aller encore plus vite : les caillés obtenus présenteront des problèmes technologiques (granuleux, mauvais égouttage, implantation de flore aléatoire) et surtout la pérennité des bactéries lactiques est mise en péril en les fragilisant.
Les leviers d’action sur la courbe sont la température, la dose d’ensemencement, le temps et le type de préparation du lait. Si on agit sur la dose d’ensemencement, plus la dose est importante, plus le temps de latence en début d’acidification est court. À l’inverse, plus la température de caillage est élevée, plus la pente de la courbe est inclinée, on accélère l’acidification.
Article réalisé d’après les fiches du Pep Caprin Rhône-Alpes, à retrouver sur le site de la ferme expérimentale caprine du Pradel, Cap’Pradel
Pourquoi suivre l’acidification ?
Des mesures régulières permettent en premier lieu de connaître les paramètres de fabrication qui fonctionnent bien et ainsi les reproduire plus facilement. C’est aussi important si plusieurs personnes travaillent en fromagerie pour assurer la transmission des consignes et méthodes. Autre intérêt, le suivi de la campagne de fabrication pour anticiper les changements de saison, d’alimentation… Cela permet également de détecter rapidement des dérives et d’intervenir avant une détérioration forte de la situation. Enfin, avoir des informations précises sur ses paramètres de fabrication facilite les échanges entre éleveurs et avec son conseiller, que ce soit pour se comparer ou diagnostiquer un problème de transformation.
Acidité Dornic ou pH, quelle différence ?
Deux unités existent pour mesurer l’acidification : l’acidité Dornic et le pH. À chacun de choisir la méthode qui lui convient le mieux.
La maîtrise des fabrications de fromages lactiques passe par l’utilisation d’outils de mesure : thermomètre, acidimètre Dornic ou pH-mètre ou bandelette de papier pH, calculette et flacon doseur. Plus précisément sur l’acidification, il existe deux mesures : l’acidité Dornic (A°D) et le pH.
L’acidité Dornic correspond à la quantité d’acide lactique contenue dans 1 litre de solution, 1°D = 0,1 gramme d’acide lactique. Par exemple, 15°D correspond à 1,5 gramme d’acide lactique par litre de lait. L’acidité initiale du lait est liée à sa composition en protéines et minéraux. Comme il n’y a pas de bactéries lactiques dans la mamelle, il ne s’y déroule ni fermentation ni production d’acide lactique. Selon la méthode Dornic, le titrage s’effectue à l’aide d’une solution de soude à N/9 (0,111 mol/l) et de phénolphtaléine.
Ne pas comparer les deux mesures
Le pH, ou potentiel hydrogène, est la mesure de l’acidité ou de la basicité d’une solution. Il traduit une mesure de l’activité chimique des ions hydrogènes H+ (appelés aussi couramment protons) ou la concentration en ions H+ dans un produit. Plus un produit est acide, plus il contient d’ions H+ et plus son pH est bas. Le pH varie de 0 à 14.
Comme l’acidité Dornic et le pH ne mesurent pas la même chose (des ions ou de l’acide lactique), on ne peut jamais affirmer que telle acidité Dornic est égale à tel pH.