Avis d'éleveur : Laurent Balmelle, éleveur caprin et fromager fermier en Ardèche
« L’image du lait cru est durement impactée »
« J’ai été vraiment surpris et déçu par la réaction du ministère de l’Agriculture suite à la crise du saint-marcellin. Nous (la Fnec, ndlr) travaillons depuis longtemps avec la Direction générale de l’alimentation (DGAl) pour aller vers toujours plus de sécurité alimentaire et là, il n’y a eu aucune concertation avec la profession. La note de service du ministère et l’infographie qui a été diffusée dans les mairies et les collectivités vont faire beaucoup de tort que nous avons du mal à évaluer pour l’instant. Il y a bien sûr en effet direct, les pertes de marchés pour certains d’entre nous qui livraient des cantines scolaires. Je suis concerné car je fournissais 200 fromages par an à l’école d’une commune voisine. Cela n’est pas forcément le plus grave, c’est une goutte d’eau dans notre activité, nous allons rebondir et trouver d’autres débouchés. Ce qui est plus inquiétant, c’est qu’à moyen et long terme, les enfants d’aujourd’hui se seront déshabitués à consommer des fromages au lait cru et de fait, risquent de ne pas en être les consommateurs de demain.
Il faut relativiser sur le nombre de décès dus au lait cru
De plus, les producteurs travaillent depuis longtemps pour créer des synergies avec les politiques locales pour développer la consommation dans les écoles, tout ça va être dur à regagner. On manque de données et d’études sur les bienfaits du lait, mais quand je vois aujourd’hui les discussions qu’il y a sur l’importance du microbiote intestinal, je me dis que quelqu’un qui ne mange jamais de lait cru sera moins protégé que quelqu’un qui en consomme. Nous sommes en train de partir en marche arrière par rapport à la logique ! Sans minimiser les accidents qu’il y a chaque année avec le lait cru, un à deux décès par an, il faut aussi relativiser… quand je vois les chiffres de la pollution, de l’alcool ou du tabac, je trouve la réaction du ministère inappropriée et disproportionnée. Nous travaillons avec du vivant et le risque zéro n’existe pas, mais il faut garder en tête que les bienfaits du lait cru sont très nombreux et cela devrait prendre le dessus dans les esprits de nos dirigeants ! »