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"J’ai mis au point des techniques pour gagner en productivité "

Éleveur dans le Maine-et-Loire, Loïc Brunellière engraisse 30 à 40 000 chevreaux par an. Parce que les marges sont minimes, il a mis au point plusieurs techniques pour améliorer la productivité.

Installé en 1987, Loïc Brunellière s’est spécialisé en 2000 dans l’engraissement de chevreaux. Avec sa femme Myriam, il engraisse 30 à 40 000 chevreaux par an, collectés dans le Grand Ouest et vendus après engraissement à Loeul et Piriot. Quatre permanents et 15 saisonniers travaillent sur l’exploitation qui compte aussi 55 hectares de céréales. La collecte se fait dans de petits camions à deux niveaux sur paille avec ventilation dynamique. L’élevage dispose de sept tunnels et trois bâtiments en dur, tous très bien isolés, chauffés au gaz et équipés d’une ventilation dynamique transversale. « Les problèmes pulmonaires sont un gros souci en engraissement, souligne Loïc Brunellière. Il faut une température de 22-23 °C et que le bâtiment soit très bien aéré, mais sans courant d’air sur les chevreaux. » Les systèmes de ventilation, avec trappes d’entrée d’air d’un côté et extracteurs de l’autre, sont les mêmes que ceux utilisés en volaille. Mais parce qu’il y a peu d’expertise en chevreau chez les fabricants, Loïc Brunellière a lui-même mis au point les paramètres de ventilation selon la largeur des bâtiments, leur forme, leur hauteur, le poids d’animaux présents…

Une louve pour 800 à 1 000 chevreaux

Les chevreaux arrivent entre 3 et 8 jours et 3,5 à 4,5 kg. Ils sont logés en cases de 200, sur paille, à raison de 4 à 4,5 animaux/m2. Les cases sont entourées de grillage. « Il ne faut pas de paroi qui arrête l’air et pas de bois pour des raisons sanitaires. » Le sol des cases est en enrobé, pour limiter les échanges thermiques et parce que le lait n’attaque pas l’enrobé, à la différence du béton. Le paillage est réalisé par un tuyau (pailleuse Dussau), avec de la paille d’orge, plus confortable, au premier paillage, puis de la paille de blé. L’allaitement, à base de poudre de lactosérum 0 %, est assuré par des louves Serval. « Ce sont de très vieilles louves, sans électronique, qui tombent peu en panne, ce qui est essentiel pour notre activité, indique Loïc Brunellière. De plus, chaque machine peut alimenter 1 000 chevreaux, ce qui limite le temps de nettoyage. » La poudre arrive du silo par un tuyau. L’eau arrive préchauffée à 48 °C grâce à une pompe à chaleur, ne nécessitant plus ainsi qu’un apport de 3-4 degrés pour atteindre 52 °C. « Nous commençons à 150-160 g par litre d’eau et finissons à 180-190 g en augmentant de 5-10 g deux fois par semaine, à chaque lavage » précise l’éleveur. Chaque louve alimente quatre cases. Depuis plusieurs années, l’élevage est équipé de tétines Milkbar. « Ces tétines, dont le débit est limité, obligent le chevreau à appuyer et aspirer en même temps, ce qui le fait beaucoup saliver, explique Samuel Malard, de Milkbar. Et la salive a un pouvoir tampon, aide à prédigérer la matière grasse, est antibactérienne et aide à construire l’immunité. » Les premiers jours, les chevreaux ont à disposition des tétines Milkbar jaunes, plus souples que les noires utilisées par la suite, et des tétines Legrain. « Les salariées leur apprennent à téter, précise Loïc Brunellière. Mais elles ne les nourrissent pas. Elles montrent au chevreau, l’enlèvent et il doit revenir pour téter. Sinon, il attendra toujours qu’on le nourrisse. » Au bout de quatre jours, 90 % des chevreaux savent téter. L’éleveur refait alors les cases en regroupant les chevreaux qui ne savent pas téter.

Système Teat Separator

Au bout de cinq à six jours, les chevreaux tètent seuls, avec des tétines Milkbar noires et le système Teat Separator, basé sur des cloisons qui isolent chaque tétine qui n’est ainsi plus accessible que par l’avant. « Quand les tétines sont accessibles de tous les côtés, les chevreaux ont tendance à les saisir sur le côté et à les mordre avec les molaires, ce qui finit par les déchirer, explique l’éleveur. La première année d’utilisation des tétines Milkbar, j’en ai eu pour plus de 10 000 €. De plus, comme les chevreaux se poussent pour accéder aux tétines, il y a beaucoup de pertes de lait. J’ai donc réfléchi à un système qui isole chaque tétine et qu’elle ne soit accessible que par l’avant, pour que le chevreau puisse téter tranquillement et pour limiter les pertes de lait. Nous avons mis au point le Teat Separator, aujourd’hui commercialisé par Milkbar. » Des cloisons en plastique rotomoulé sont insérées sur le Milkbar. Elles peuvent être enlevées pour faciliter l’apprentissage et pour le nettoyage. « Depuis que j’ai ce système, les pertes de lait ont diminué de 20 %, assure Loïc Brunellière. De plus, il n’y a pratiquement plus de tétines percées. » Au final, les chevreaux sont engraissés en trois à six semaines, à raison de 200 g de GMQ en moyenne, pour atteindre un poids de 8 à 11 kg. Le taux de mortalité est de 10 à 15 % sur la saison.

Un robot d’allaitement

Le robot vient se remplir automatiquement en poudre sous une vis.  © V. Bargain

Un bâtiment est alimenté pour partie avec un robot d’allaitement imaginé par Loïc Brunellière et mis au point par la société Legrain. Suspendu à un rail et relié à un PC qui permet de le programmer, il distribue le lait dans des bols grâce à un codeur basé sur la distance entre les bols. Il est équipé d’une trémie pour la poudre de lait et de deux trémies médicamenteuses. « Nous nettoyons le bol de fabrication chaque jour et lavons l’ensemble deux fois par semaine, comme les louves, précise Loïc Brunellière. Mais comme le robot peut alimenter 1 500 à 1 800 chevreaux, cela représente moins de travail de nettoyage par chevreau. » C’est l’éleveur qui a mis au point les bols de distribution à double paroi. De l’eau chauffée par la pompe à chaleur circule autour du bol principal qui contient 5 l de lait. Celui-ci reste ainsi toujours chaud.

"Une activité menacée"

« Le métier d’engraisseur est menacé, estime Loïc Brunellière. Les mises bas sont de plus en plus concentrées. Avant, l’engraissement s’étalait de janvier à mai. Aujourd’hui, tout est concentré sur février-mars et il manque des chevreaux à Noël. Les marges sont très faibles et toujours en baisse, avec de plus un prix de la poudre de lait très volatil et actuellement très haut. Il faudrait stimuler la consommation de la viande de chevreau avec des carcasses plus lourdes. Si les naisseurs disparaissent, il y aura un gros problème. Les éleveurs n’ont pas le temps d’engraisser les chevreaux et préfèrent s’en débarrasser rapidement pour des raisons sanitaires. »

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