Bien éduquer son chien de protection
Contre la prédation des troupeaux, les chiens de protection sont efficaces. Encore faut-il qu’ils soient bien éduqués.
Contre la prédation des troupeaux, les chiens de protection sont efficaces. Encore faut-il qu’ils soient bien éduqués.
L’éleveur qui souhaite se doter d’un chien de protection devra s’orienter, s’il préfère se charger lui-même de son éducation, vers un chiot né dans un troupeau et si possible issu de parents qui travaillent bien. Pour la protection d’un troupeau de chèvres, il vaut mieux que le chien soit issu d’un élevage caprin, afin qu’il soit familier avec l’espèce. « Il faut éviter de choisir les extrêmes, entre le chiot trop peureux et celui trop sûr de lui, qui sera difficile de garder auprès du troupeau », explique Rémi Bahadur, référent pour le réseau chien de protection de l’Institut de l’Élevage. Cependant, si l’éleveur a besoin de plusieurs chiens, il est plus intéressant de combiner des caractères différents. Le plus peureux sera très attentif à la moindre anomalie et le plus téméraire n’hésitera pas à sortir du troupeau pour pourchasser le prédateur. Le référent met en garde contre les chiens inscrits au LOF (livre des origines français), car ceux-ci ne sont jugés que sur leur esthétique et non sur leurs aptitudes au travail. Il faut compter autour de 400 euros pour un chiot de bonne origine, pucé et vacciné. Dans les zones fortement prédatées par le loup, l’État accorde une subvention de 80 %.
L’isolement fait le chien
Le chien de protection n’est pas vraiment dressé, on parle plutôt d’éducation. Celle-ci commence dès l’arrivée du chiot sur la ferme. En effet, lors de son sevrage à deux mois, le chiot est séparé de sa mère et de sa fratrie et est plongé dans un entourage qu’il ne connaît pas. Le chien étant un animal sociable, il va se rapprocher par la force des chèvres autour de lui. « C’est uniquement parce qu’il est complètement isolé que ce rapprochement va se faire, insiste Rémi Bahadur. Si l’éleveur est trop présent ou que le chiot parvient à sortir de l’enclos pour rejoindre un autre chien, il ne se fixera pas au troupeau. » Le chiot doit être placé parmi des chèvres accueillantes, de préférence des chevrettes curieuses de petit gabarit. « Si, à six mois, le chien n’est pas parfaitement conditionné et fixé au troupeau, cela ne pourra pas être rattrapé par la suite », met en garde le référent chien de troupeau, lui-même éleveur ovin dans le Jura.
Observer pour bien éduquer
À partir du moment où le chien est bien imprégné de sa mission dans le troupeau, le maître peut commencer à interagir avec lui. « Pendant longtemps, l’idée fausse qu’il fallait que le chien soit complètement maintenu à l’écart des hommes circulait. C’est notamment à cause de cela que certains chiens peuvent être agressifs envers des promeneurs », alerte Rémi Bahadur. Cependant il faut bien doser le degré de sociabilisation du chien. En effet, s’il est trop sociable, le chien n’hésitera pas à quitter le troupeau pour venir chercher des caresses. A contrario, un chien trop sauvage ne fera que difficilement la différence entre loup et randonneur. « C’est le comportement du chien, observé par l’éleveur, qui doit déterminer l’attitude de celui-ci », rappelle le formateur. La sociabilisation est évolutive dans le temps. « Lorsque le chien montre des signes d’éloignement, l’éleveur redoublera de caresses. Inversement si le chien se montre trop collant. » Le chien, à terme, doit pouvoir être approché et touché par n’importe quel humain en présence de l’éleveur. Ce dernier doit aussi pouvoir le manipuler, comme lui inspecter la mâchoire ou le faire marcher en laisse par exemple.
Pas plus de 50 % de chèvres inconnues
À quatre ou cinq mois, le chiot va faire ses premières expériences avec le monde extérieur, c’est à cette période qu’il faut lui apprendre le respect des clôtures. « Idéalement, le chien doit être placé dans un petit parc, bien électrifié, avec le lot de chèvres qu’il connaît. Il faut limiter ce nouvel espace qu’il découvre », rappelle Rémi Bahadur. Il ne faut pas lésiner sur l’électrification de la clôture, afin que le chien apprenne à garder ses distances. L’intégration du jeune chien dans le troupeau entier doit se faire progressivement. Il s’agit d’ajouter petit à petit des chèvres qui lui sont inconnues parmi le lot de chèvres connues. Ainsi, la proportion d’animaux inconnus mis avec le chien ne doit pas dépasser 50 % du lot. « Une fois que le conditionnement et l’éducation ont été bien faits, il n’y a plus vraiment de suivi à faire du chien, simplement continuer à observer l’évolution de son comportement », explique le formateur. « Au bout de quelques années, les éleveurs nous disent que leurs chèvres sont beaucoup plus sereines en présence du chien de protection que s’il n’était pas là », affirme Rémi Bahadur.