Une forte pression existe au niveau national et européen pour réduire l’usage des produits phytosanitaires. Retour sur les premiers constats issus d’un partenariat entre le réseau Dephy Ecophyto et le projet Casdar Phytoel.
Phytosanitaires : des systèmes polyculture bovins viande plus économes
L’élevage est au cœur des enjeux nationaux. Il représente en effet 64 % de la SAU nationale (15 % pour les systèmes bovins viande), 48 % des terres labourables (dont 18 % de prairies temporaires) et 54 % des exploitations. « D’après les bases de données des réseaux Dephy Ecophyto et Inosys des enseignements, face aux enjeux phytosanitaires, ont pu être tirés », commence Philippe Tresch de l’Institut de l’élevage lors du Sommet de l’élevage avant de poursuivre « on constate que les systèmes de cultures associées à l’élevage disposent d’un indicateur de fréquence de traitement (IFT) en moyenne inférieur de 40 % à celui des systèmes en polyculture dont l’IFT moyen s’élève à 3,7 contre 2,3 pour les premiers. » Et cet écart est d’autant plus grand pour les surfaces labourables des systèmes bovins viande. En effet, l’IFT moyen par hectare de ces systèmes est 80 % inférieur à celui des systèmes en grandes cultures (IFT moyen bovins viande : 0,69). Les systèmes bovins viande disposent ainsi d’un gradient nettement plus bas. Cependant, on distingue deux classes, les naisseurs-engraisseurs et engraisseurs de jeunes bovins souvent accompagnés d’un système polyculture important avec un IFT supérieur à 1,36 et les naisseurs ou naisseurs engraisseurs de veaux et/ou de bœufs avec un IFT inférieur à 1. Ces derniers étant principalement herbagers.
Des systèmes de cultures associés à l’élevage plus économes
« On peut alors se demander pourquoi ces systèmes de cultures (SDC) associés à l’élevage sont plus économes. On s’est ainsi penché sur leurs spécificités. On s’est rendu compte qu’il existait une corrélation entre le pourcentage de cultures autoconsommées dans le système et l’IFT. En effet, plus le pourcentage de cultures autoconsommées est important, plus l’IFT est bas. » Le constat est identique avec l’augmentation de la part de fourrages autoconsommés (IFT de 1,07) avec un avantage encore plus grand pour les fourrages pluriannuels (IFT de 0,17) par rapport aux fourrages annuels (IFT de 1,51). A l’opposé, plus la part de cultures de vente augmente dans le système, plus l’IFT est important (IFT de 3,45 contre 2,79 pour les cultures autoconsommées et ce, pour les mêmes cultures).
Ainsi, les systèmes d’élevage représentent un enjeu national important car plus économes en produits phytosanitaires, grâce à la présence de cultures fourragères et à des pratiques culturales plus économes. « On s’est alors demandé si des marges de progrès sont encore possibles et quelles seraient les conséquences pour ces systèmes déjà économes. En se basant sur les suivis du réseau Dephy au cours des années, on a constaté que les SDC associés à l’élevage avaient réduit plus rapidement leur IFT entre 2010 et 2013 (baisse des IFT de 17 %) que les SDC non associés à l’élevage (baisse des IFT de 8 %). Un travail a été engagé sur les impacts de la mise en place de leviers pour réduire l’usage des produits phytosanitaires en jouant sur les pratiques agronomiques. Toutefois, on peut d’ores et déjà mettre en avant la complémentarité des systèmes cultures-élevages sur le volet de la réduction des phytosanitaires. Les systèmes de polyculture-élevage amènent un réel plus car ils s’ouvrent à des leviers dont on ne dispose pas en polyculture », conclut Philippe Tresch.
Résultats issus du réseau Dephy Ecophyto et du réseau d’élevages Inosys, dans le cadre d’un partenariat Dephy Ecophyto et projet Casdar Phytoel (références et outils pour optimiser l’utilisation de phytosanitaires en systèmes de polycultures-élevage).Le réseau Dephy
Action majeure du plan Ecophyto, le dispositif Dephy (Démonstration, expérimentation et production de références sur les systèmes économes en produits phytosanitaires), lancé en 2010, a pour finalité d'éprouver, valoriser et déployer les techniques et systèmes agricoles réduisant l’usage des produits phytosanitaires, tout en promouvant des techniques économiquement, environnementalement et socialement performantes. Le dispositif repose sur un réseau national de plus de 1 200 systèmes en polycultures dont 600 en polycultures élevage couvrant l'ensemble des filières de production et mobilisant les partenaires de la recherche, du développement et du transfert.