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Au Gaec des mille collines, dans l’Aveyron
« Nous ne savons pas vendre une vache maigre »

Le Gaec engraisse toutes ses vaches de réforme « à la toque ». L’aliment est fabriqué avec les céréales de la ferme et les vaches sont régulièrement pesées pour suivre leurs performances.

La saison de printemps des concours de bœufs gras approche. Cette année, le Gaec des mille collines, à Boussac dans l'Aveyron, ne présentera qu’une bête au concours de Baraqueville. Beaucoup moins que d’habitude, faute d’animaux au top de la conformation qui sied à ces compétitions. Ces dix dernières années, Christian et Jean-Marc Soulié ont présenté 52 vaches dans trois concours du département et obtenu 35 plaques. C’est dire leur intérêt pour les bêtes engraissées et bien finies : « nous ne savons pas vendre une vache maigre ou à demi finie ». Un fait assez rare chez les producteurs de veau d’Aveyron et du Ségala label rouge. L’étalement de la production pour répondre aux besoins du marché — le Gaec est dans la filière SA4R - Auchan — ne facilite pas la constitution de lots ni pour l’élevage des génisses, ni pour l’engraissement des vaches. Le Gaec des mille collines assure son renouvellement. La moitié du cheptel (130 Limousines) est inséminée avec des taureaux mixtes, mais plutôt viande, car "on vend des kilos de viande, pas des centimètres de hauteur ! ", notent les éleveurs. Et, à quelques exceptions près, toutes les femelles d’IA sont élevées. C’est donc autant de vaches de réforme, de 25 à 30, qui sont engraissées tous les ans.

Une fabrique avec aplatisseur et mélangeuse

Dès le moindre souci de reproduction, quelle que soit leur valeur génétique, les vaches passent dans la case engraissement. Parfois avec leur veau, notamment les plus vieilles. Pas de temps perdu donc : la durée moyenne entre le vêlage et l’abattage est de 275 jours (dont environ 150 jours d’engraissement). Il y en a une dizaine en permanence dans le box. Environ les deux tiers partent en label Blason prestige (pour celles de moins de 10 ans), principalement dans une boucherie haut de gamme de Toulouse. L’âge moyen d’abattage se situe entre 7 et 8 ans.

Le Gaec exploite 125 hectares dont 30 hectares sont consacrés aux céréales (blé et orge). L’exploitation est largement autonome en céréales et paille. Elle produit entre 150 et 180 tonnes, et le cheptel en consomme 90 à 100 tonnes. Les éleveurs sont équipés d’une fabrique d’aliment, avec aplatisseur et mélangeuse horizontale de 500 kilos. Pour simplifier le travail, ils fabriquent un aliment unique, qui comprend 75 % de céréales (moitié blé, moitié orge), 23,5 % de complémentaire azoté à 40 % (tourteaux de soja, tournesol, colza et lin), et enfin 1,5 % de minéraux. Un aliment qui dose 18 % de MAT (matières azotées totales). Il sert à la fois pour la complémentation des veaux et pour l’engraissement des vaches. Le complémentaire est sans OGM, comme l’exige le label veau d’Aveyron et du Ségala.

En moyenne, les vaches s’arrêtent à 12 ou 13 kg d’aliment par jour

Avant de démarrer l’engraissement, les vaches sont pesées et vermifugées contre les strongles. Elles sont également tondues pour leur amener plus de confort. Pendant quinze jours à trois semaines, la quantité d’aliment est augmentée progressivement pour l’ajuster à la capacité d’ingestion de chaque vache. « Nous partons de 2 à 3 kilos, nous montons assez rapidement au début, puis plus doucement. Pendant cette période de transition, nous alimentons individuellement au cornadis parce que certaines bêtes vont plus vite que d’autres. Certaines saturent à 10 kilos, d’autres vont jusqu’à 15 kilos. En moyenne, elles s’arrêtent à 12 ou 13 kilos par jour », détaillent les éleveurs. L’aliment est distribué deux fois par jour. Quand elles ont trouvé leur niveau, elles passent dans le box d’engraissent avec du concentré à volonté. La fibre est apportée par du foin de dactyle grossier, mais de bonne qualité et appétent. Il est mis à disposition des vaches au râtelier. « Il vaudrait mieux le distribuer tous les jours pour le remuer. L’été, quand on a davantage de place dans la stabulation, on essaye de le faire. » En moyenne, les vaches en consomment près de 6 kilos par jour. Elles ont également des blocs de sel en permanence.

Les vaches sont pesées tous les mois. La bascule est un des points clés de la bonne conduite de l’engraissement et de la maîtrise du coût. Aussi bien au début qu’à la fin. « C’est surtout pendant les trois premiers mois qu’elles prennent des kilos, explique Sylvie Ferrier, technicienne à la chambre d’agriculture de l'Aveyron. Il faut s’assurer qu’elles font de bonnes croissances. » La pesée permet de déterminer aussi la fin de l’engraissement. « Quand les vaches prennent moins de poids, on refait une pesée rapprochée, tous les quinze jours, précise la technicienne. Si la bête ne profite plus, c’est qu’elle est prête pour l’abattoir. C’est vraiment très important de peser tous les mois. »

Une bonne minéralisation favorise la croissance

On pourrait se demander s’il est judicieux d’engraisser du début jusqu’à la fin avec un aliment à 18 % de MAT, qui plus est non OGM ? En début d’année, il coûtait 470 euros la tonne, ce qui génère un coût supplémentaire d’environ 1 000 euros pour les douze tonnes consommées par les vaches. « Idéalement, il faudrait un peu moins de protéines à la fin », note Sylvie Ferrier. Pour autant, les vaches se finissent bien. Elles tombent en catégorie 3 à 3,5 en état d’engraissement. Quant un lot un peu plus important de vaches (5 ou 6) est mis en engraissement, les éleveurs fabriquent un aliment avec un peu plus de protéines (20 à 25 kg de plus dans la mélangeuse de 500 kg) pour favoriser le muscle. Cet aliment, prévu pour les veaux, est surminéralisé : à la quantité distribuée, il apporte l’équivalent de 180 grammes de minéraux par vache et par jour. Gaspillage ? « Non, considère la technicienne. Une bonne minéralisation favorise la croissance et diminue les problèmes d’aplombs, surtout avec des animaux aussi poussés et donc fragiles. » Au final, avec une céréale qui aurait pu être vendue 150 euros la tonne, le prix de l’aliment reste tout à fait raisonnable, à un peu moins de 240 euros la tonne. « L’engraissement des vaches permet de valoriser les céréales et cela ne demande pas beaucoup de boulot, observent les éleveurs. Il faut attendre cinq mois. On surveille qu’il y ait de l’aliment dans le nourrisseur et du foin dans le râtelier... »

Avis d’expert

Sylvie Ferrier, technicienne Bovins croissance

« Faire de bonnes transitions alimentaires »

« Au-delà des indicateurs alimentaires, quelques points clés ne doivent pas être perdus de vue pour mener à bien l’engraissement des vaches. Les indicateurs doivent être particulièrement respectés en début d’engraissement, en veillant à ne pas dépasser 25 à 30 % d’amidon rapide. Il faut faire de bonnes transitions alimentaires. Le choix et la distribution du grossier sont très importants également : donner de la bonne paille et de bons foins fibreux, changer si possible le grossier tous les jours et le remuer deux fois par jour. Le but est d’apporter de la fibre efficace et appétente. Les apports de concentré doivent être fractionnés (deux fois par jour s’il n’est pas mélangé au fourrage). Faire attention également au concentré trop fin ou aux grains entiers. L’idéal, ce sont des céréales aplaties. Ne pas oublier le sel, qui doit être propre et toujours accessible : il fait boire et saliver. C’est du bicarbonate gratuit. Et enfin, vérifier et nettoyer les abreuvoirs tous les jours, ainsi que les nourrisseurs afin de proposer aux animaux de l’eau et de l’aliment de bonne qualité et en quantité suffisante. »

Chiffres clés

En 2016

142 jours d’engraissement
693 kg vif à l’entrée
881 kg vif à la sortie
1,3 kg de gain moyen quotidien
1,8 t d’aliment et 850 kg de foin par vache
570 € de coût alimentaire et traitements par vache (4 € par jour).

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