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« Nous faisons naître 360 veaux dans l’hiver sous un même bâtiment »

Le Gaec Gauthé, dans la Nièvre, a choisi il y a une vingtaine d’années de faire vêler dans un grand bâtiment les vaches charolaises. Associés et salariés assurent des gardes à heure fixe toutes les nuits.

À Vandenesse, dans la Nièvre, le troupeau charolais de sélection du Gaec Gauthé compte 480 vêlages. Quatre associés et cinq salariés travaillent sur l’exploitation, ce qui représente un ratio de 55 vaches par unité de main-d’œuvre à temps plein. « Cela permet d’avoir une vie correcte », considère François Gauthé. Le grand nombre n’entache en rien la fibre des éleveurs : « C’est toujours la même émotion à la naissance d’un veau », reprend-il.

L’élevage sort d’une phase de transmission. François Gauthé et son frère Guy sont, en effet, jeunes retraités. Corentin Panier a pris le relais en 2021 en tant qu’associé auprès de Dominique Millerot et Thierry Bonnet. Les cinq salariés sont Hubert, frère de Dominique, Florian, Laurent, Jérôme et Loïc. Le Gaec a récemment associé un jeune, Jordan Regerat, ancien apprenti.

Les vaches vêlent en liberté dans l'aire paillée puis passent plusieurs jours avec leur veau dans un box au fond de leur case.

Les vêlages se déroulent sur deux des sites de l’exploitation. Sur le site principal, un grand bâtiment loge 308 vaches et une extension, 52 autres. Les mises bas démarrent au 20 novembre, et en cinq à six semaines, avant la fin de l’année, naissent environ 260 veaux. « Il arrive que 70 ou 80 veaux naissent la même semaine », observe Thierry. Certains jours sont fastes. « Cette année par exemple, le 4 décembre, 17 veaux sont nés, et 10 autres le 5 décembre. » Puis les 220 veaux suivants se présentent de façon plus étalée jusqu’à fin mars. Les éleveurs ne cherchent pas à concentrer davantage les naissances, afin de garantir le confort des vaches et la qualité des soins.

Les vaches logées dans le bâtiment principal sont conduites en monte naturelle et allotées par rapport au choix du taureau avec lequel elles seront accouplées en fin d’hiver. La centaine de vaches qui sont inséminées sont groupées sur le second site de l’élevage. Les 120 génisses (taux de renouvellement de 25 %) sont allotées du même côté du bâtiment pour recevoir une ration plus riche avec trois multipares par case. De l’avis des éleveurs, elles sont moins stressées avec les vaches expérimentées autour d’elles, et cela évite de concentrer les problèmes potentiels au vêlage dans une même case. Le premier vêlage intervient à l’âge de trois ans pour ne pas brider le gabarit des futures reproductrices dans leurs premières années. Au final, dans un même parc, les veaux ont un écart d’âge d’au maximum un mois.

Surveillance des vêlages avec une caméra unique

Pour la surveillance des vêlages, associés et salariés font des gardes fixes toutes les nuits. Il est moins perturbant pour le sommeil de se réveiller toujours aux mêmes heures, que de faire des nuits entières de garde à tour de rôle. « On a organisé trois équipes avec un principal, et un second qu’on réveille en cas de besoin : de vingt et une heures à minuit trente, de minuit trente à trois heures trente, et de trois heures trente à sept heures », explique Guy Gauthé.

« On ne peut pas prendre la température pour détecter les vêlages. Ça serait trop exigeant en temps de travail. On dispose des dates présumées de vêlage, et en monte naturelle, c’est à sept à dix jours près. » Les éleveurs surveillent les vaches avec une caméra unique qui circule sur l’allée centrale du bâtiment. La caméra est tout simplement positionnée sur la case surveillée au moment du changement d’équipe. Les cases sont aussi numérotées. Les informations classiques de déclaration de naissance (date, numéros d’identification, conditions de naissance, poids de naissance…) sont notées sur un cahier en papier commun à tous, puis saisies sur Boviclic par Corentin.

Plusieurs jours en box avec le veau nouveau-né

Les vaches vêlent en liberté sur l’aire paillée, et la philosophie du Gaec est de les laisser au maximum se débrouiller seules. Chacune des vingt cases de 15 ou 16 vaches dispose à l’arrière de trois box où elles sont conduites au cas où il faudrait intervenir pour le vêlage. Les vaches y sont toutes isolées avec leur nouveau-né au minimum plusieurs jours, et si possible jusqu’à une semaine après le vêlage. Cela permet de faire les soins et de sécuriser le démarrage de l’allaitement. Pour l’estimation du poids de naissance, le Gaec Gauthé utilise un mètre ruban. Ces box servent ensuite de cases à veau.

À côté du bâtiment, un ancien entravé a été aménagé avec douze box, où sont élevés les couples vache et veau nécessitant des soins (adoptions, jumeaux, suites de césarienne…). « L’infirmerie se situe dans ce bâtiment avec une case dédiée aux césariennes. Les vétérinaires n’interviennent pas dans le bâtiment d’élevage de sorte à limiter au maximum le risque de contamination », explique Corentin.

veaux charolais stabulation

Les taureaux rejoignent les vaches dans le bâtiment pour la Saint-Valentin, mi-février, à raison d’un par case. Le 1er avril, ils sortent au pâturage avec ces mêmes vaches et des femelles supplémentaires leur sont attribuées (lots de 25 vaches et un taureau). Une trentaine de taureaux sont présents au total sur l’élevage, entre les jeunes qui ne saillissent pas encore ou moins de vaches et ceux qui sont en voie de réforme. Cela permet d’en avoir plusieurs de secours en cas de défaillance.

Une trentaine de taureaux présents

Les taureaux sont retirés le 15 ou 20 juin. « On note en semaine les saillies observées et ensuite les retours en chaleurs au pré, explique Jordan. Chacun gère ses lots, soit pour les soins, soit pour l’alimentation, et en profite pour les observer. » À partir de juillet août, un diagnostic de gestation est réalisé par échographie, et les premières vaches détectées vides sont vendues maigres en été dès que leur veau est sevré. La deuxième moitié des vaches vides sont engraissées. Toutes sont échographiées à la rentrée à l’étable, et les plus retardées sont dirigées dans le second site de vêlage.

Chiffres clés

4 associés et 5 salariés
930 ha de SAU au total dont 260 de cultures et 610 ha de prairies (150 ha inondables et 60 ha de luzerne)
5 sites, les plus distants étant à 12 km l’un de l’autre
480 vêlages
70 reproducteurs génotypés
150 broutards de dix mois environ pour un poids moyen de 472 kg vendus 1 645 € soit 3,48 €/kg

Un bâtiment de grande largeur à l’ambiance excellente

À l’occasion de la mise aux normes en 2003, les éleveurs ont décidé de regrouper les vaches qui étaient jusqu’alors réparties sur quatre sites de vêlage. Les conseillers craignaient que tous les veaux tombent malades avec un tel effectif sous un même toit et que les éleveurs auraient du mal à bien surveiller les vaches. Il n’en est rien. « On a choisi un système de ventilation innovant adapté pour un bâtiment de grande largeur, un concept connu en Irlande », se rappelle François Gauthé. Les tôles du toit ne se joignent pas et libèrent un espace de 8 mm entre elles. Il n’y a pas d’ouverture à la faîtière. Chaque tôle fait aussi office d’éclairage. Les entrées d’air sur les grands côtés sont assurées par des ventelles. « On a aussi soigné l’intégration paysagère. »

Une préparation au vêlage soignée

Avec les sécheresses des dernières années, de mi-août à la rentrée en bâtiment, les vaches gestantes reçoivent au pré une ration foin et enrubannage distribuée au sol, sous un fil de clôture, distribuée avec le bol mélangeur. L’objectif de la préparation est que les vaches arrivent au vêlage en bonne santé, ni trop maigres ni trop grasses. Après vêlage est introduit du maïs ensilage (6 kilos bruts). Seules les génisses reçoivent un aliment minéral de préparation au vêlage. Les veaux sont complémentés avec un aliment produit à façon sous contrat à partir des céréales de l’exploitation.

L’élevage est autonome en fourrages, et les vaches ne reçoivent pas de concentré. Un nutritionniste intervient pour caler les rations. « Toutes les distributions sont rationnées. Sur ces effectifs, les stocks peuvent vite déraper », précise Corentin.

Le protocole sanitaire est très cadré et donne la part belle à la prévention. Les vaches sont vaccinées contre les entérites néonatales et la BVD, les veaux reçoivent un vaccin contre les maladies respiratoires en intranasal à deux ou trois jours de vie.

Vente de reproducteurs, race et sélection

Cette année à la mi-février, 360 veaux étaient nés et seulement trois d’entre eux par césarienne. « Il y a dix ans, on faisait une quarantaine de césariennes chaque année. On a réformé systématiquement les vaches à leur deuxième césarienne, et on s’est séparés pour la reproduction des petites femelles nées par césarienne », racontent les éleveurs. Le choix des taureaux intervient aussi dans cet acquis, en faisant le bon compromis sur le poids de naissance des veaux et la visée de vente des veaux en reproducteurs : une morphologie mixte avec des animaux racés. « Il est important de se fixer des objectifs d’amélioration et de rester constant dans ses choix de taureaux : facilité de naissance, qualités maternelles et qualités laitières. »

Le troupeau a été créé sur la base d’animaux inscrits par les parents de Guy et François Gauthé dans les années cinquante, et s’est construit une très solide réputation dans la sélection de la race charolaise.

Environ 20 % des femelles sont inséminées et des taureaux issus de souche d’insémination sont aussi utilisés en monte naturelle. « Le partenariat avec Gènes Diffusion nous aide beaucoup pour l’évolution de la sélection du cheptel, filiation et génotypages des reproducteurs mâles sont indispensables. Partenariat efficace pour un coup raisonnable et conseils de qualité ! »

Aujourd’hui, cinq ou six taureaux de monte naturelle sans cornes sont en service. 20 à 25 % des vaches sont porteuses du gène et il naît maintenant régulièrement des veaux homozygotes sans cornes.

« On sélectionne des vaches qui s’engraissent facilement, en 70 jours, et donnent un poids de carcasse dans une plage de 470 à 520 kg de carcasse », explique François Gauthé. Une collaboration étroite avec la Sicafome permet aux éleveurs de valoriser un maximum leurs ventes par des innovations telles que la mise aux enchères et l’animation en vidéo, où ces derniers ont pu proposer deux lots de 50 broutards.

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