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Marine Druesne ou la passion du métier de chevilleur

Dans le cadre des journées Made in Viande 2022, Marine Druesne a ouvert les portes de l’entreprise Outrebon, dans le Pas-de-Calais, qu’elle s’apprête à reprendre. Avec son équipe, elle achète et prépare la viande pour sa clientèle d’artisans bouchers.

Chevillard ou chevilleur ? Le premier est plus usité en France mais les deux figurent au dictionnaire et Marine Druesne emploie le terme de chevilleur.

Les installations des établissements Outrebon, à Aix-Noulette dans le Pas-de-Calais, ne sont pas bien grandes : c’est une salle de découpe où travaillent une dizaine de personnes à la fois, un frigo d’environ 60 m2 et une salle d’expédition, avec une flotte de cinq camions. Mais l’activité y est très intense.

"Nous sommes une trentaine de salariés au total. On travaille en deux équipes, de 4 heures jusqu’à parfois 20 ou 21 heures pour réceptionner et préparer les commandes. Le lundi et le mercredi, nous préparons les commandes de nos clients pour que les chauffeurs partent tôt le lendemain. Nos clients sont toujours livrés le matin. Le premier camion part d’ailleurs à 3 heures du matin pour pouvoir circuler à Lille avant les embouteillages, explique Marine Druesne. Le mardi, on est en clientèle. Et le jeudi en abattoir, où on va voir tous nos abattages."

Chaque semaine, l’équivalent d’une trentaine de gros bovins, et au moins autant en volume en viande de veau, porc et agneau sont travaillés et transitent par l’entreprise. Il y a beaucoup de travail. Le métier est exigeant avec le froid et les horaires décalés. Marine Druesne, 29 ans, l’a choisi et s’y épanouit pleinement.

Une reprise de l’entreprise en tandem

"C’est mon premier job. J’ai fait mon apprentissage ici, sur le terrain, avec Monsieur Philippe Outrebon, dans le cadre d’une licence en conseil agricole, raconte Marine Druesne. Je suis revenue dans l’entreprise après une autre expérience dans le milieu agricole. Le travail de la viande, c’est vraiment ce qui me plaît, et je voulais aussi m’investir dans une ambiance familiale."

La maison Outrebon existe depuis deux générations. Elle a été créée par le père de l’actuel gérant Philippe Outrebon, qui s’apprête à passer le relais au tandem constitué par Marine Druesne à la cheville et Cyrielle Mallevay à la gestion administrative. "On se complète, on se fait confiance, et on ne s’inquiète pas du tout", commentent en souriant les deux jeunes femmes.

La cheville fonctionne avec un réseau construit de longue date entre négociants et éleveurs sur la région Hauts-de-France. Confiance et respect dans le travail sont les valeurs de base. "On travaille ensemble, avec tous les maillons, pour tirer la filière vers le haut. C’est pourquoi aussi nous participons à un évènement comme Made in Viande." Toutes espèces confondues, 50 à 100 éleveurs installés dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais commercent avec les établissements Outrebon.

Une partie d’achat en direct pour les bovins

Pour les gros bovins, une partie des animaux sont achetés en direct auprès des éleveurs, et le reste à des négociants. "Nous n’avons jamais rechigné à payer un bon prix pour la qualité, et toujours rémunéré les éleveurs par rapport au coût de production." Bovins et veaux sont abattus par les établissements Malvoisin, à L’Arbret dans le Pas-de-Calais - une entreprise familiale elle aussi. Tous les animaux sont étourdis au matador.

"Je connais les conditions d’élevage et d’abattage des produits que je vends. Nous n’achetons que des bêtes engraissées en alimentation sèche, sans ensilage." Marine Druesne sait choisir les bêtes sur pied aussi. Elle en achète aux concours d’animaux de boucherie de Valenciennes, Le Cateau, Cambrais et Arras (qui malheureusement va s’arrêter en même temps que le marché). Il arrive qu’elle y soit juge aussi.

La Blanc Bleu est la locale, et une partie des artisans bouchers ne travaillent qu’elle. La blonde, la charolaise et la limousine se partagent les autres créneaux. "Les bouchers sont maintenant moins attachés à une race donnée. Certains en travaillent plusieurs alternativement, remarque Marine Druesne. Par contre ils commencent tous à tiquer sur les bêtes très lourdes de 600 kilos. D’ailleurs, je recherche plutôt des bêtes coquettes, en petites pommes, pas très lourdes mais qui passent partout."

L’entreprise se fait livrer la carcasse entière et la travaille. Elle se réapprovisionne en piécé auprès d’abattoirs. Pour le porc, l’entreprise est engagée dans la filière Porc des hauts pays (200 à 250 animaux par semaine).

Les yeux de l’artisan boucher

Le métier de chevilleur consiste à faire du sur-mesure pour servir les clients. "Nous sommes les yeux de l’artisan boucher : on choisit la viande pour lui, et il ne faut pas se tromper. Notre satisfaction, c’est quand ils nous disent "c’est exactement ce que je voulais."

L’entreprise vend soit en demi-carcasse, soit en découpe, soit aussi pour une petite part en PAD. Dans ce dernier cas, ce choix est fait faute de main-d’œuvre bien souvent. "Le rayon traiteur prend de plus en plus de place dans les boucheries, et mobilise plus de temps de travail pour eux", constate aussi Marine Druesne.

Certains bouchers ne sont pas équipés pour retirer les MRS (matériaux à risque spécifié), et ce travail est fait chez Outrebon. Une personne ne fait que cela, il y a des bacs dédiés à gérer… "Nous croisons les doigts pour que la France recouvre cette année le statut à 'risque négligeable'."

La viande passe très peu de temps chez le chevilleur. La maturation se déroule dans les frigos de l’abattoir en général, et parfois chez le chevilleur quand il n’y a pas de place. Il y a aussi des bouchers qui demandent de la viande fraîche et conduisent la maturation chez eux.

"Nous travaillons très peu avec les GMS et les collectivités. Il y a encore onze chevilleurs sur notre bassin d’activité, et chacun a ses circuits."

Le saviez-vous ?

La septième édition des Rencontres Made in Viande s’est déroulée du 11 au 18 mai 2022 partout en France. Ce sont des visites, des échanges avec les hommes et les femmes de la filière élevage et viande qui ouvrent leurs portes pour partager leurs métiers, leur quotidien et leurs valeurs.

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