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Le standard davantage plébiscité que le haut de gamme

Les traditionnels concours de boucherie de Pâques n’ont pas permis une progression des tarifs similaire à ce qui est constaté pour les réformes laitières. Le très haut de gamme conserve des adeptes mais point trop n’en faut pour autant.

Les trois semaines précédant Pâques se sont comme à l’accoutumée traduites par l’organisation des traditionnels concours d’animaux de boucherie. Annulés il y a deux ans et organisés pour la plupart en accès restreint l’an dernier, ces évènements étaient particulièrement attendus par les passionnés de bêtes lourdes, conformées et bien finies.

Les apports étaient en légère baisse. Jean-Yves Renard, président de la Fédération nationale des concours d’animaux de boucherie de haute qualité fait état d’un recul de 10 à 15 % sur certains concours (Varennes, Saint-Pourçain-sur-Sioule, Montluçon, Boussac, Tonay-Boutonne…). Mais des effectifs similaires aux chiffres habituels à Mamers, Laguiole, Baraqueville, Rouen, Autun.

« On était d’abord content de se retrouver. Les concours, c’est du lien social, de la convivialité. Comme pour le Salon de l’agriculture, ces éditions 2022 sont celles des retrouvailles. Le champagne était à la fête dans les flûtes et les pavés dans les assiettes ! », reconnaît bien volontiers Jean-Yves Renard. Mais il a aussi beaucoup été question de la flambée des charges au fil des discussions et en particulier celle des carburants, des engrais et de l’aliment du bétail.

Quelques prix records

Le haut du classement s’est comme à l’accoutumée commercialisé à des tarifs élevés, déconnectés du prix de la viande en rayon. À signaler parmi les records, les 18,10 € du kilo carcasse de la championne Fleur d’Aubrac (génisse croisée charolais/aubrac) à Laguiole et 16,50 € pour une charolaise à Varennes-sur-Allier. Les taux d’invendus ont oscillé entre 0 et 10 %.

« Quand sur un concours on arrive à vendre quelques animaux très chers, cela donne le ton et sert souvent un peu de locomotive pour tirer le prix des autres. » Pour autant, en dehors de quelques exceptions les tarifs n’ont rien eu de bien mirobolant. « Quand ça se vend mieux en ferme, ça se vend moins bien en concours », ajoute Jean-Yves Renard.

Les tarifs pratiqués pour les queues de classement (entre 5 et 6 €) sont assez similaires aux chiffres des années précédentes. Les enseignes de la grande distribution auraient fait moins de folies. Certaines estimant qu’une simple plaque de participation est bien suffisante pour animer un rayon. Autre évidence, en dehors des champions et lauréats de sections forcément mieux valorisés, le prix de ces animaux haut de gamme n’évolue pas dans les mêmes proportions que celui des bêtes ordinaires et en particulier des laitières de réforme.

Un décalage qui interroge

D’après les relevés de l’Institut de l’élevage, « la cotation de la vache O est à 4,37 €/kg de carcasse en semaine 10 (+39 %/2021 et +44 %/2020). Celle de la vache P a gagné 43 centimes à 4,27 €/kg (+46 %/2021 et +59 %/2020). » Cette progression est loin d’être similaire pour les vaches mieux conformées. « La cotation de la vache U est à 5,20 €/kg de carcasse en semaine 10 (+13 %/2021 et +20 %/2020)."

Et la progression est encore plus timide pour le très haut de gamme présenté sur les concours, même s’il n’existe aucune cotation officielle réservée à ces animaux. Un décalage qui interroge et qui agace bien des participants qui estiment que la viande de qualité n’est pas reconnue et appréciée à sa juste valeur.

Mais cette évolution des tarifs est d’abord le reflet d’une évolution d’un marché avant tout tiré par le celui de la viande hachée qui concerne année après année une proportion de plus en plus importante des muscles des carcasses y compris pour les femelles bouchères issues des cheptels allaitants. « En cumul sur les huit premières semaines de 2022, les ventes de haché frais (-4 %/2021 et +12 %/2020) comme de haché surgelé (-4 %/2021 et +17 %/2020) restaient dynamiques », confirme d’ailleurs la dernière lettre de conjoncture de l’Institut de l’élevage.

Rations trop coûteuses

L’autre problématique de ces animaux à la fois très lourds et très conformés réside dans le volume et le coût des rations qu’il est nécessaire de leur donner pour les engraisser. Avec qui plus est une durée de finition très (trop ?) longue qui renchérit d’autant le coût de leur finition. C’était déjà vrai avant le déclenchement de la guerre en Ukraine. Cela l’est d’autant plus depuis que les composants de ces rations atteignent des niveaux de prix quasi prohibitifs.

 

Jean-Yves Renard

Jean-Yves Renard, président de la Fédération nationale des concours d’animaux de boucherie de haute qualité

"Renouveler les générations d’éleveurs… et de bouchers"

"Les tarifs des animaux présentés sur nos concours sont loin d’avoir évolué dans les mêmes proportions que celui des laitières de réforme. Il y a de moins en moins de différence entre le prix des vaches noires et celui des vaches ou des bœufs classés en queue de section. Et simultanément les engraisseurs de bêtes de forme ne peuvent que constater au fil des semaines la flambée du prix des rations. Si on veut qu’elle soit correctement finie, une bête de concours mange vite pour 1 000 euros d’aliment. Cela devient vraiment très compliqué quand on fait du haut de gamme.

Le problème, on le connaît. Un nombre croissant de consommateurs demande d’abord du steak haché et des muscles à griller issus de l’aloyau, mais ils boudent les rôtis. Ils ne veulent plus faire de cuisine et ne jurent que par le vite prêt, vite cuisiné. Donc les muscles de la cuisse tendent de plus en plus à passer dans les hachoirs. La seule solution est de faire progresser le prix du haché afin qu’il se rapproche peu à peu de celui de la viande à rôtir. Bien des bouchers ont du mal à s’y résoudre. Ils craignent que leur clientèle vienne moins régulièrement. Mais je ne vois pas comment faire autrement. Leur crainte est aussi que leurs clients réarbitrent leurs dépenses pour faire face à la progression du coût des carburants et du chauffage. Certains de nos compatriotes n’hésitent pas à dépenser 1 000 euros pour un téléphone portable et mettent de l’argent de côté pour leurs vacances mais vont pour cela se restreindre sur leur budget alimentation.

Sur nos concours, mon inquiétude est également liée à l’âge des participants tant dans les rangs des éleveurs, des engraisseurs que des bouchers. Beaucoup approchent ou dépassent la soixantaine. D’ici une demi-douzaine d’années il y aura des fermes à reprendre mais également des boucheries ! Les bouchers de moins de 40 ans deviennent une denrée rare ! »

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