La FCO, c’est aussi des veaux en moins
Un nouvel épisode de fièvre catarrhale ovine à sérotype 8 a débuté au cœur du bassin allaitant. Les enseignements de l’épisode précédent, tant en matière d’impact que d’intérêt de la vaccination, sont à rappeler.
La fièvre catarrhale ovine (FCO) est une maladie virale des ruminants très répandue dans le monde. Il en existe aujourd’hui 27 sérotypes connus. Le sérotype 8, responsable de l’épisode que nous connaissons actuellement, a été mis en évidence en Europe du Nord pour la première fois en 2006. Le virus est transmis aux animaux par un vecteur, un petit moucheron piqueur du genre culicoides. Il s’infecte à l’occasion de son repas de sang, puis retransmet le virus. Le culicoides en cause dans la transmission du sérotype 8, favorisé par une douceur des températures et de l’humidité, est particulièrement actif en été et en automne, ce qui explique l’aspect saisonnier des troubles liés à la FCO.
L’épisode précédent, qui a sévi en France de 2007 à 2010, a permis de collecter de nombreuses données. Leurs analyses, et les bilans qui en ont été obtenus, sont aujourd’hui très utiles pour appréhender en toute objectivité la situation actuelle.
Les enseignements du précédent épisode
Aujourd’hui, pour la plupart des éleveurs, les restrictions aux mouvements et les contraintes commerciales sont les conséquences les plus lourdes. Mais il ne faut pas oublier que la FCO est une maladie dont l’impact peut être important. Jusqu’à l’arrivée du sérotype 8 en 2006, en Europe du Nord, la FCO était considérée comme une maladie des seuls ovins, comme son nom peut le laisser penser. Mais ce principe a dû être remis en question, les élevages bovins étant également largement touchés lors des épizooties qui ont suivi en 2007 et 2008.
À cette période, le Nord-Est de la France a été particulièrement touché. C’est à partir de témoignages et d’enquêtes auprès d’éleveurs et de vétérinaires de ces zones que le tableau clinique a pu être décrit. Il est très variable, selon les espèces, les élevages et les individus. Cette variabilité s’explique essentiellement par la pression d’infection, elle-même liée au nombre de moucherons présents et à leur charge virale. L’état sanitaire des élevages, et enfin, l’immunité et le stade physiologique de l’animal interviennent également. Les différentes études et enquêtes menées ont montré que si les bovins sont finalement touchés par la FCO, les formes aigües et suraigües sont moins fréquentes que chez les ovins.
Une étude menée en 2010 par l’Institut de l’élevage a montré que dans toutes les zones touchées par la FCO en 2007 et 2008, une baisse de productivité a été observée sur la campagne suivant l’épizootie. En 2009, cela s’est traduit par une baisse du nombre de naissances de veaux de races allaitantes de l’ordre de 2,7 %, soit quelques 59 000 veaux. Il a également été observé un décalage des naissances avec une augmentation de leur nombre de mai à juillet ne compensant qu’en partie la diminution observée en hiver (cf. encadré).
Dans les troupeaux, ce sont les animaux adultes qui sont le plus souvent atteints, mais les conséquences les plus graves concernent les veaux. Le nombre d’animaux atteints dans un élevage est variable mais peut atteindre 97% des vaches et 77% des veaux. À l’inverse, le taux de mortalité des veaux est plus élevé que chez les adultes (voir tableau et graphique).
Un impact technico-économique pouvant être très important
L’impact technico-économique de la FCO en 2007 a été évalué en 2008 par une étude coordonnée par l’Institut de l’élevage, en s’appuyant sur des bases de données nationales, des enquêtes et en utilisant la modélisation. Au final, la baisse de marge brute d’un atelier allaitant a été estimée comme pouvant varier de 6% jusqu’à 43%. Cet impact économique tient compte de la mortalité et du nombre d’animaux malades. Il y a bien entendu les pertes directes liées à la mortalité et les frais supplémentaires liés aux dépenses vétérinaires, mais aussi, de manière moins immédiate des pertes de production. Par exemple, la diminution de production de lait observée intervient sur la croissance des veaux. La durée d’engraissement des veaux malades ou issus de mères malades se trouve augmentée. Les troubles de la reproduction, quant à eux, conduisent à renforcer le suivi de reproduction, ce qui a un coût. Enfin, dans les élevages touchés, cela représente du temps passé supplémentaire (estimé dans les élevages enquêtés de 1h à 4h de travail quotidien) en surveillance et manipulation pour les soins. Dans certains élevages, on a pu arriver à une situation économique et/ou psychologique critique, conduisant parfois à d’autres difficultés sanitaires. Et cela, indépendamment des restrictions de mouvements et des perturbations des circuits commerciaux générés par la FCO, elles aussi lourdes de conséquences pour les résultats économiques des élevages.
Comme pour beaucoup de maladies virales, il n’existe pas de traitement spécifique : le traitement est dit symptomatique (il vise à traiter les symptômes). La vaccination, quant à elle, reste le seul outil disponible pour lutter contre la maladie.
Les trois phases de la FCO
Trois phases sont observées sur les animaux atteints par la FCO
Dans la première phase, on observe une atteinte des muqueuses qui se traduit par des ulcères au niveau de la bouche et du nez, sale et croûteux. On observe aussi des lésions au niveau des pieds (œdème). L’animal atteint a du mal à se déplacer et à se nourrir. Des lésions oculaires (yeux exorbités, larmoyants, rouges) sont également des signes d’appel.
La seconde phase correspond à une atteinte générale des bovins qui présentent de l’hyperthermie, de l’abattement et de l’amaigrissement. Une diminution de la production de lait est également fréquemment observée.
La troisième phase se traduit par des troubles de la reproduction. Les mâles comme les femelles sont concernés. Les mâles peuvent faire l’objet d’une infertilité transitoire. Quant aux femelles, les conséquences dépendent de leur stade physiologique au moment du passage viral. Ont ainsi été constatés des avortements, des mises bas prématurées, des mauvaises préparations à la mise bas, des veaux mort-nés ou malformés, de l’anœstrus. L’intervalle vêlage-vêlage est augmenté.
Au sein de ces trois phases, la troisième s’avère la plus conséquente en élevage bovin. Pour certains sérotypes dont le 8, la transmission transplacentaire représente un mode complémentaire de contamination virale. L’issue peut être différente pour le fœtus selon le stade de gestation de la mère au moment de l’infection. Une infection dans le premier tiers de gestation peut conduire à une mortalité embryonnaire ou fœtale. Une infection dans le deuxième tiers de gestation peut être à l’origine de malformations du système nerveux. Durant le dernier tiers de gestation, le passage transplacentaire du virus induit une réponse immunitaire chez le fœtus devenu immunocompétent.
* Article ayant bénéficié de la relecture de Françoise Dion (Races de France) et Isabelle Tourette (GDS France).
Pour en savoir plus
Pour lire l'article dans son intégralité, voir Réussir Bovins Viande de novembre 2015. RBV 231, p.52 à 55.
Impact de la FCO sur les vêlages
La diminution de naissances observée intervient six à neuf mois après le pic de la maladie. Elle est liée à la forte activité vectorielle en été et à l'automne, qui correspond également à la période de mise à la reproduction ou au tout début de la gestation dans les élevages allaitants pratiquant les vêlages d’hiver. La baisse de fertilité des mâles, les retours en chaleurs et les avortements précoces dus à la FCO en sont très probablement la cause. Les conséquences en sont un déficit du nombre d’animaux sur le marché ou pour le renouvellement dans les élevages.