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Aurore et Laurent Comby, en Corrèze
Du veau de lait mené avec rigueur

Aurore et Laurent Comby se sont spécialisés sur les veaux de lait en Corrèze et conduisent leur exploitation de 90 mères avec une rigueur qui impressionne. La construction d’un nouvel atelier va leur faire gagner du temps.

Laurent Comby déteste remettre au lendemain ce qui est à faire le jour même. Éleveur à Saint-Bonnet-l’Enfantier à quelques kilomètres au nord de Brive-la-Gaillarde en Corrèze et perfectionniste dans l’âme, il a un sens du détail qui laisse peu de place au hasard. Après son BTS, bien qu’ayant l’intention de reprendre la ferme familiale, il a travaillé 13 ans à l’extérieur parce qu’il voulait que « tout soit bien calé avant de s’installer (arrangement de famille...) », tout en participant à la conduite de l’exploitation. Il est installé depuis deux ans. Cette passion pour l’élevage, il la partage avec son épouse, Aurore, salariée à mi-temps sur l’exploitation et technicienne à Créalim, l’entreprise de sélection de la Limousine, pour l’autre mi-temps. Elle prévoit de s’installer en 2020. Un nouvel atelier veaux de lait est en construction pour remplacer l’ancienne étable entravée qui n’est pas fonctionnelle.

La conduite de la reproduction est révélatrice de la rigueur au quotidien qui prévaut dans cet élevage de 90 vaches présentes et... 100 vêlages par an. Aurore et Laurent Comby sélectionnent 18 à 20 génisses par an qui naissent sur une période limitée (juillet à octobre) pour les faire vêler de manière groupée en début d’automne. Après un deuxième tri à 16-17 mois et l’achat de 2 ou 3 génisses supplémentaires, ils en conservent 15 pour le renouvellement. La majorité des vaches de réforme sont engraissées (sur 4,5 mois) pendant qu’elles allaitent et vendues le même jour que leur veau. La plupart des réformes et leurs remplaçantes mettent donc bas sur la même campagne.

« En veau de lait, les vaches ne s’épuisent pas »

Les vaches sont remises à la reproduction en monte naturelle dès le vêlage. Le nouvel atelier permettra de faire de l’insémination. « L’objectif est de les faire saillir 42 jours après le vêlage, explique Laurent Comby. En veau de lait, on ne gère pas la reproduction comme en broutard. Les vaches ne s’épuisent pas. » Les taureaux (mixtes viande et viande) sont choisis, soit à la station ABL soit en ferme mais avec des origines d’insémination (Caméos, Anecdote, Suc au May, Placide...). « Pour les femelles, on ne cherche pas de grand gabarit mais des génisses qui ont du dessus et du devant, du lait, de la facilité de naissance, de la précocité...», explique Laurent Comby. Les mères rejoignent l’atelier veaux de lait 15 jours après leur mise bas. Tant qu’elles ne sont pas gestantes (contrôlées par échographie), elles sortent tous les jours dans une parcelle où séjourne un taureau. Les évènements de reproduction sont notés dans une application smartphone. « Nous sommes très rigoureux là-dessus, assurent les éleveurs. Quand on met les génisses à la reproduction, on va les voir deux ou trois fois par jour. » Les résultats parlent d’eux-mêmes : un IVV troupeau de 353 jours en 2016-2017 (380 jours pour le quart supérieur des éleveurs corréziens). À l’avenir, le lot des génisses sera coupé en deux pour raccourcir un peu l’âge à la première mise bas (36 mois) car l’avancement des vaches (IVV inférieur à un an) les fait naître de plus en plus tôt.

Une minéralisation systématique du troupeau

Ces résultats de reproduction sont à attribuer aussi à la minéralisation du troupeau. « Dès qu’une vache rentre dans un bâtiment, elle reçoit 100 grammes d’aliment minéral par jour. Je travaille avec un complément à 6,5 % de phosphore, 21 % de calcium, 5 % de magnésium et riche en vitamines et sélénium. » Les vaches ont aussi du sel en permanence, soit dans la ration (60 g/jour) soit en bloc à lécher. « Il ne faut pas négliger la minéralisation car les sols de Corrèze sont carencés en sélénium et iode, justifie Coralie Sirieix, conseillère veau de lait à la chambre d’agriculture. Quant au sel, il permet aux vaches de mieux assimiler les minéraux et les incite à boire, donc elles produisent plus de lait. »

La faible mortalité des veaux - généralement entre 1 et 3 % - est remarquable. « Au pâturage, nous faisons des lots de 6 à 8 vaches taries avec une amplitude de vêlage de 3 semaines, détaillent Aurore et Laurent Comby. Nous les rentrons pour les faire vêler à l’intérieur et nous les équipons du système de détection de vêlages Smartvel. Depuis que nous utilisons ce système, nous n’avons pas perdu un seul veau à la naissance. »

Sur la campagne 2016/2017, la productivité globale (nombre de veaux sevrés/effectif moyen de vaches présentes) dépassait 98 % (87 % en moyenne en Corrèze), mais était en retrait par rapport à la campagne précédente (108 %) à cause d’un taux de mortalité un peu supérieur (5,4 %). La fin de la campagne et celle en cours ont été affectées par des circulations du virus Schmallenberg, qui ont quelque peu déréglé ce bel ordonnancement de la reproduction (retard de saillie des génisses, six veaux mort-nés). Un évènement « que nous n'avons pu que subir ».

Des réformes engraissées pendant qu’elles allaitent

La conduite alimentaire du troupeau est tout aussi élaborée. Le cheptel est divisé en de nombreux lots selon les stades physiologiques et la destination des veaux. Ils se répartissent dans trois bâtiments, avec un rationnement différent dans chacun d’eux. Les vaches vêlent dans la plus petite stabulation (24 places) : elles arrivent 3 semaines avant la mise bas et repartent 15 jours après. Deux lots alimentés avec foin (2/3), enrubanné et 1 kilo de céréales (maïs et triticale) pour celles qui se préparent à vêler et 2 kg d’aliment fermier (2/3 céréales, 1/3 correcteur azoté à 25 % de MAT) après la mise bas. Celles qui nourrissent les veaux de lait vont dans l’étable entravée où sont aménagés les box à veaux. Elles ne sont alimentées qu’avec du foin car l’enrubanné ne peut y être distribué. Elles reçoivent 2,5 kilos de concentré fermier, matin et soir. Celles qui vont être réformées sont davantage complémentées (2 fois 6 kg à la fin). « On démarre doucement parce qu’elles sont engraissées sur quatre mois », expliquent les éleveurs. L’engraissement pendant l’allaitement des veaux exige un certain doigté. « En veaux de lait, il faut une ration un peu déséquilibrée, avec davantage d’énergie (PDIE) que d’azote (PDIN), explique Coralie Sirieix. Sinon, l’azote soluble n’est pas bien digéré et entraine le rougissement des veaux. »

« Des bêtes en état, qui me le rendent bien »

Les vaches qui nourrissent les futures génisses de renouvellement et celles qui vêleront au printemps sont dans une autre stabulation. Elles sont alimentées avec de l’ensilage de maïs (4 - 5 kg) et du foin en râtelier. Elles reçoivent aussi 500 grammes par jour de complémentaire azoté. Les génisses de l’année sont également au maïs et au foin, plus 1 kilo de complémentaire azoté. Celles qui sont engraissées ont du maïs à volonté et du concentré fermier. Les génisses en cours de saillie restent à l’extérieur avec deux râteliers de foin et un râtelier d’enrubanné de ray-grass italien et 1,5 kilo de concentré fermier.

Cette conduite alimentaire génère des consommations de concentrés assez importantes (près d’une tonne/UGB). « J’ai des bêtes en état tout le temps, dit l’éleveur. Mais, elles me le rendent bien. » La productivité (270 kg de viande vive/UGB, 31 tonnes au total) et les résultats économiques (rémunération de 3 Smic/UMO exploitant) sont au rendez-vous. Laurent Comby a commencé à implanter de la luzerne pour la distribuer aux vaches dans le nouvel atelier veau de lait, espérant ainsi économiser du complémentaire azoté (30 t/an actuellement). L’utilisation de la luzerne en veau de lait exige un certain savoir-faire - pour les mêmes raisons d’azote soluble -, mais on peut faire confiance au jeune couple pour s’en débrouiller.

Un assolement diversifié

La sole en maïs oscille de 7 à 9 ha. « Je prévois 3,5 ha de maïs grain tous les ans et 3 à 4 ha d’ensilage de maïs, voire un peu plus, selon le stock de fourrage restant en sortie d’hiver, explique Laurent Comby.  C’est le grain qui m’intéresse le plus. J’utilise des variétés assez précoces (indice 275) pour pouvoir faire une céréale derrière le grain. » Pour ne pas laisser de sol nu en hiver, il sème du ray-grass italien derrière des céréales, qui sera enrubanné avant d’être remplacé par du maïs. Dans l’alimentation, le maïs grain est mélangé avec du triticale. Outre les prairies temporaires de longue durée (dactyle, fétuque, ray-grass anglais, trèfle blanc) récoltées en enrubannage, l’éleveur a installé près des bâtiments des prairies de festulolium (hybride fétuque ray-grass) et trèfle violet (10 ha) pour le pâturage des vaches qui nourrissent les veaux de lait, conduites en pâturage tournant (6 parcelles). À terme, il prévoit d’implanter 5 à 6 ha de luzerne pour améliorer l’autonomie en azote. Les deux tiers de la surface sont chaulés tous les ans (200 kg/ha sur prairies à 250 kg sur céréales), alternativement avec de la chaux vive et de la chaux magnésienne.

Chiffres clés

Surface 111 ha de SAU dont 10 ha triticale et blé, 3,5 ha de maïs grain, 3,5 ha de maïs ensilage, 26 ha de prairies temporaires et 68 ha de prairies permanentes.
Cheptel 92 Limousines dont 13 primipares (102 vêlages)
Chargement 1,2 UGB/ha SFP
Main d’œuvre 1,5 UMO dont 0,5 salariée (Aurore) et l’aide bénévole des parents

« Tout est bien maîtrisé »

« L’élevage est dans le haut du panier à tous points de vue. Tout est bien maîtrisé, à commencer par la reproduction. Douze jours d’IVV en moins par rapport à l’objectif de 365 jours, cela représente 3 veaux de plus par an. Et, c’est encore mieux sur l’IVV entre premier et deuxième vêlage (343 jours). L’élevage produit 31 tonnes de viande vive alors que les éleveurs de veaux de lait sont à 15 tonnes en moyenne. Les vêlages sont bien maîtrisés et la mortalité est au plus bas. Le sanitaire est bien géré également. C’est d’autant plus remarquable que le bâtiment veau de lait est ancien. Le choix de placer le nouvel atelier assez loin du bâtiment où ont lieu les vêlages va dans ce sens. Il y a enfin une bonne maîtrise des cultures. Il résulte de tout cela une bonne situation financière : avec un l’EBE de 93 000 euros pour 1,5 UMO, on est largement au-dessus de la moyenne des élevages veaux de lait (52 000 € d’EBE/1,5 UMO). Le coût du concentré est le point principal qui peut être amélioré. L’introduction de la luzerne dans l’assolement devrait y contribuer. »

Coralie Sirieix, conseillère veau de lait à la chambre d’agriculture

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