Fourragères prairiales
Avec les progrès génétiques actuels et à venir, le portefeuille variétal s´étoffe
Fourragères prairiales
L´offre variétale s´est bien diversifiée ces dernières années. C´est la résistance aux maladies qui anime le plus aujourd´hui les débats sur les variétés fourragères.
La démarche AOC « Fin Gras du Mézenc » qui a obtenu de l´Inao le principe de reconnaissance en juillet 2002, a franchi une autre étape : l´enquête publique est terminée. A l´intérieur de l´aire géographique d´abattage a été définie une aire de production où devront naître, être élevés et engraissés les bovins. L´AOC porte sur 28 communes sur la Haute-Loire et l´Ardèche.
Le progrès génétique parvient mieux aux éleveurs
Aujourd´hui, le progrès génétique parvient mieux aux éleveurs comme le prouve le rajeunissement des variétés présentes au catalogue. « L´âge moyen des trois premières variétés de ray grass anglais commercialisées en France est passé de dix-sept ans sur la campagne 96-97 à six ans et demi en 2002-2003, avance le Gnis. D´autre part, si l´on compare la moyenne des résultats des variétés de ray grass anglais tardif inscrites après 2000 à celle des variétés inscrites avant 2000, on se rend compte que tous les critères ont été améliorés. »
Il n´y a pas que le ray grass qui a profité de cette tendance. Pour le dactyle, par exemple, la souplesse d´exploitation (nombre de jours entre le démarrage au printemps et la montaison) a considérablement augmenté. « En trente ans, on a gagné une vingtaine de jours. » L´éleveur dispose ainsi de trois semaines de plus pour faire pâturer de l´herbe feuillue. La résistance aux maladies et le rendement ont également bien progressé. « Entre une variété de dactyle inscrite il y a une quinzaine d´années et une variété récente, les écarts de production peuvent atteindre 16 % en été-automne et 35 % au printemps. » De son côté, la fétuque élevée, a surtout bénéficié d´une amélioration de la souplesse des feuilles, la rendant plus appétible pour les animaux. Ce progrès, facilement repérable à l´oeil, a d´ailleurs permis une nette accélération des ventes depuis 2000 (+30 % en volume).
La luzerne a quant à elle progressé sur le critère grosseur des tiges, passant de huit à cinq millimètres en moyenne. Et l´on pourrait ainsi multiplier les exemples.
Les prairies semées représentent environ 30 % des surfaces en prairie. ©F. d´Alteroche |
Des efforts aboutis sur la résistance aux maladies
Le rendement, et plutôt la répartition dans l´année de la production, restent des objectifs importants de la sélection au sens que les nouveautés ne doivent pas être plus faibles que les variétés de référence sur ce plan. Mais aujourd´hui, c´est sur la résistance aux maladies des différentes espèces que la sélection récolte le fruit de son travail des dix dernières années. « Ce sont des qualités très importantes pour les utilisateurs », explique Christian Huyghe, directeur de l´unité d´amélioration des plantes fourragères de l´Inra à Lusignan, président du CTPS(2) et de l´AFPF(3). « Des prairies résistantes aux maladies ont l´avantage de flatter l´oeil de l´éleveur, mais surtout elles produisent plus, sont mieux pâturées. Et le plus intéressant est que leur pérennité est améliorée. » La résistance aux maladies occupe ainsi le coeur des débats des réunions du CTPS pour l´inscription des nouvelles variétés, ces dernières années. Les efforts portent sur la rouille pour les RG, la scolécotrichose pour les dactyles ou encore le xanthomonas pour les RGI. « Des progrès gigantesques de résistance aux nématodes ont été faits en luzerne. »
En revanche, les programmes français ne prennent pas en compte les maladies pour l´instant absentes du territoire national mais qui font des ravages à l´étranger, comme la bactériose de la luzerne par exemple. Et ces dernières années, avec des étés particulièrement chauds, l´anthracnose a fait des dégâts chez nous. « La résistance à cette maladie n´est pas à part entière un critère retenu dans la procédure d´inscription des nouveautés, mais on prend quand même en compte le comportement des variétés face à cette maladie sous la forme d´une information complémentaire dans le barême de cotation. Cette information participe donc à l´appréciation de l´intérêt des différentes variétés. » Autre facteur jouant sur ce tableau, les souches d´agents pathogènes comme par exemple les souches de rouille, évoluent avec le temps. Une variété qui résistait à la rouille il y a quelques années ne le fera peut être plus aujourd´hui et la création variétale « court » toujours derrière les souches.
La préférence animale, au sens des quantités ingérées, a été assez longuement étudiée, mais elle est aujourd´hui un peu mise de côté car ce critère conduisait à forcément classer en tête des génotypes tardifs, qui du coup ne faisaient pas le poids sur le plan de la productivité. Aujourd´hui, c´est par le biais de la sélection contre la remontaison que les généticiens, sur des RGA notamment de type intermédiaire, cherchent à améliorer l´aptitude au pâturage des variétés. Sur la luzerne, à partir de l´année prochaine, la digestibilité des variétés estimée par la teneur en parois sera prise en compte pour l´inscription des variétés. Des critères semblables pourraient apparaître aussi pour les graminées. A l´Inra, des recherches plus fondamentales portent sur la compréhension de l´évolution dans le temps de la productivité d´une prairie. Le but est de pouvoir à terme sélectionner des variétés dont la productivité baisse moins au bout de plusieurs années d´exploitation. Car cette baisse de productivité entraîne la décision de retourner la prairie avec à la clé un impact négatif important sur l´environnement.
Les premiers festulolium sont très prisés par les éleveurs
Et puis, une toute autre voie de progrès génétique est travaillée activement aussi ces dernières années : ce sont les hybridations entre espèces. Les premiers festulolium, issus d´un ray-grass et d´une fétuque, font un tabac auprès des éleveurs. L´obtention de variétés intermédiaires à la fois stables et fertiles n´est pas complètement maîtrisée pour l´instant, mais leurs performances sont très intéressantes. La liste des variétés disponibles devrait s´allonger dans les prochaines années et un catalogue français pourrait être créé pour les festulolium (qui sont pour l´instant au catalogue de l´OCDE(4) ou de l´UE).
Enfin, il existe dans la nature 10 000 espèces de graminées et près de 15 000 espèces de légumineuses, de quoi imaginer beaucoup de nouvelles façons de produire du fourrage dans les prairies.
(1) Groupement national interprofessionnel des semences et plants
(2) Comité technique permanent de la Sélection des plantes cultivées
(3) Association française pour la production fourragère.
(4) Organisation de coopération et de développement économique.
Pour en savoir plus
Voir dossier complet « Sélection des fourragères : les variétés collent au terrain » dans Réussir Bovins Viande de mars 2005 (nº114). Ces 16 pages sont destinées à aider l´éleveur à s´y retrouver dans l´offre variétale qui s´est diversifiée ces dernières années, en lui donnant des éléments pour choisir la variété qui lui convient en fonction du contexte pédo-climatique et du système d´élevage de son exploitation.