Comment les abattoirs de votre fédération ont traversé la crise de l’énergie que nous connaissons ?
André Éloi - Je vais dire sans détour que c’est compliqué. Sur l’ensemble de la France et pas seulement au sein de notre fédération des abattoirs prestataires de services et de proximité, cinq ou six établissements ont fermé pour des problèmes économiques ou techniques ces derniers mois. Et la crise est loin d’être achevée, cette contrainte fait toujours souffrir les abattoirs. Et d’autres voient le jour, je pense en particulier à l’eau. Certaines préfectures ont commencé à envoyer des questionnaires aux abattoirs pour mieux connaître et faire évoluer les consommations d’eau… Et on peut ajouter les contraintes réglementaires, en particulier celles liées au bien-être animal dont l’Europe s’est de nouveau emparé dans le cadre de la révision de la législation. C’est un sujet que nous suivons avec attention. Pour en revenir à votre question sur l’énergie, il y a fort à parier que cela aura encore des répercussions au deuxième semestre de cette année.
Est-ce de nature à remettre en cause le maillage des abattoirs de proximité sur le territoire français ?
A. É. - Il est difficile d’avoir une vision précise de cette problématique. Pour le moment, avec cinq ou six abattoirs fermés, mais qui pourront peut-être reprendre leur activité, j’aurai tendance à dire non. En revanche, si le nombre de fermeture augmente, si on dépasse la dizaine alors là oui, cela risque de poser problème dans certaines régions.
Votre secteur a-t-il pu bénéficier des aides de l’État pour pallier en partie la hausse des coûts de l’énergie ?
A. É. - Il n’y en pas eu ou presque puisque nos abattoirs ont très rarement été éligibles à cause des critères, notamment sur les contrats de fourniture en énergie, élaborés par le gouvernement.
Comment les collectivités locales ou territoriales investies dans la gestion des abattoirs se positionnent aujourd’hui ?
A. É. - Elles peuvent en effet se poser la question de l’intérêt qu’elles ont à s’impliquer et assumer une partie de la gestion d’un tel outil, si cela relève réellement de leurs compétences d’être confrontés possiblement à des déficits, des problèmes techniques et industriels… La tendance aujourd’hui, c’est la création de sociétés coopératives d’intérêt collectif autour des abattoirs, qui permettent d’impliquer tous les acteurs, des salariés aux utilisateurs en passant par les collectivités.
Et pour répondre aux enjeux économiques actuels et à venir ?
A. É. - Ce que nous verrons peut-être poindre, ce sont des rapprochements entre abattoirs, des organisations communes de gestion et de gouvernance comme cela est en train de se mettre en place en Occitanie. Ces rapprochements pourront prendre également la forme de partage de fonctionnement avec une répartition nouvelle des animaux en fonction de la géographie ou des caractéristiques des outils. L’autre piste suivie, c’est l’adjonction d’un atelier de transformation à la sortie de l’abattoir, à leur échelle, pour augmenter un peu les marges réalisées sur les prestations et mieux supporter les investissements très lourds à consentir.
(1) La Fédération Nationale Exploitants Abattoirs Publics rassemble 115 abattoirs de proximité pour 370 000 tonnes annuelles, toutes espèces confondues.