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Bio N’Days
Être bio seul ne suffit plus

Le “bio augmenté’, le “bio +”… Derrière ces nouvelles expressions, une réalité : aujourd’hui, être bio ne suffit plus. A la demande du Cluster Bio Auvergne-Rhône-Alpes, OpinionWay a interrogé les Français et en particulier les consommateurs de bio sur leurs préférences en termes de produits labellisés ou porteurs de solutions responsables.

« Enfin, le bio ne répond plus à toutes les préoccupations. Pour la qualité, il n’y a pas de perception de modification de l’état de santé ou de meilleures qualités gustatives, il n’y a pas de lien direct entre bio et solidarité, et l’emballage plastique réduit la perception positive du bio sur l’environnement. A l’inverse, on note un engouement pour le local qui répond, lui, à ces trois attentes de qualité, de solidarité et d’environnement. » C’est ce qu’il ressort de la dernière étude d’OpinionWay pour le Cluster Bio Auvergne-Rhône-Alpes présentée aux Bio N’Days.
© Julia Commandeur - FLD

Avec la crise sanitaire, les préoccupations des Français se sont accélérées : des préoccupations d’environnement et de solidarité, ce dernier point ayant vu une forte accélération en 2020, et surtout de qualité, qualité étant synonyme de produit santé et avec du goût. Ils sont aussi en quête d’informations sur ce qu’ils achètent et ont besoin de preuve et de transparence. Avec toutes ces attentes, le bio est et reste une valeur sûre et son capital confiance reste très fort.

Lire aussi : La 6e édition des Bio N’Days a mis en débat les défis du bio

Trois facteurs viennent néanmoins fragiliser le bio : les scandales ; un niveau de confiance qui s’amenuit avec le taux de transformation (85 % pour les fruits et légumes bruts contre 51 % pour des cordons bleus bio) et l’éloignement de la production (88 % de confiance pour l’origine France, 62 % pour UE et 37 % hors Europe). « Enfin, le bio ne répond pas à toutes les préoccupations, explique Delphine Michaut (directrice Conseil Marketing Grande Consommation chez OpinionWay). Pour la qualité, il n’y a pas de perception de modification de l’état de santé ou de meilleures qualités gustatives, il n’y a pas de lien direct entre bio et solidarité, et l’emballage plastique réduit la perception positive du bio sur l’environnement. A l’inverse, on note un engouement pour le local qui répond, lui, à ces trois attentes de qualité, de solidarité et d’environnement. »

 

Dans ce contexte, à choisir entre bio et local, la préférence va clairement au local (67 % des consommateurs choisiraient le local au bio). C’est ce qui ressort de la dernière étude OpinionWay* pour le Cluster Bio Auvergne-Rhône-Alpes, présentée en exclusivité le 10 juin lors des Bio N’Days (lire aussi La 6e édition des Bio N’Days a mis en débat les défis du bio).

*étude d’OpinionWay pour le Cluster Bio Auvergne-Rhône-Alpes sur la priorisation des attentes des consommateurs entre le bio et les autres solutions responsables complémentaires ou concurrentes. Celle-ci a porté sur deux volets : qualitatif via la communauté GreenLab (75 membres actifs) en mars 2021 puis quantitative via une enquête online en mai 2021 auprès de 1 000 consommateurs de bio.

Une plus forte intention d’achat pour du bio augmenté … et une acceptation à payer plus cher

Cette étude révèle que l’intention d’achat est plus forte dès lors que le bio est associé à une production Française (+8 points pour le frais, +6 points pour l’épicerie, + 8 points pour les boissons) voire locale (+ 8, +7 et + 10 points respectivement) ou à une entreprise familiale ou TPE (+7, + 6 et + 8 respectivement). « En revanche, un emballage écologique, l’équitable ou le vrac ne permettent pas ou peu de gagner en intention d’achat, car ce sont déjà des prérequis, des attendus du bio », analyse Marie Chedeville (chargée d’études qualitatives chez OpinionWay).

De même, les acheteurs de bio seraient prêts à payer 20 à 30 % de plus pour un produit bio+ local ou un produit bio+petite entreprise quelle que soit la catégorie de produit évaluée. A l’inverse, l’emballage écologique et le vrac ne justifient pas une hausse de prix par rapport à un produit bio standard.

 

« Ce qui nous a étonnés et qu’il faut noter, c’est l’émergence de l’appétence pour la petite entreprise familiale, qui bénéficie d’un fort capital sympathie et qui répond à un imaginaire de savoir-faire historique et amélioré, modernisés de génération en génération, concluent Marie Chedeville et Delphine Michaut. Pour demain, la combinaison gagnante c’est bio + local + PME, car au final ces trois critères répondent aux préoccupations des Français de qualité, de solidarité et d’environnement, et finalement on parle de proximité à la fois relationnelle et géographique. »

La nutrition, autre levier de croissance pour le bio

« La crise Covid a sensibilisé les consommateurs français (et dans le monde) sur la relation de long terme entre la nutrition et la santé mais les a aussi préoccupés encore plus sur le prix des produits sains (51% pensent trop cher pour acheter régulièrement), précise Caroline Roux (Food & Drink Analyst chez MINTEL Global New Products Database, spécialiste mondial de l’étude de marché). Je pense que cette équité nutritionnelle va prendre de l’importance ces prochains mois, ces prochaines années. Par exemple les banques alimentaires commencent à prendre en compte la nutrition de l’alimentation distribuée car c’est un investissement sur le futur. Quelle est donc la légitmité d’un bio qui est plus cher et donc moins accessible au plus grand nombre ?

Les Français restent assez classiques dans leur recherche de produits sains et nutritionnels : ils surveillent d’abord le sucre, puis le gras, puis les additifs. Le bio arrive bien après. « Mais la caractéristique bio et nutrition est porteur. Même constat pour une alimentation végétale. Donc ne pas hésiter à renforcer les messages naturalité sur ses packagings de produits bio. »

Les historiques du bio doivent se réinventer : l’exemple de Bjorg

Laurent Huynh (directeur Général de Bjorg et Compagnie) estime : « Déjà il y a 30 ans les fondateurs de Bjorg avaient senti que le bio n’était pas suffisant et avaient inscrit la nutrition dans leur ADN. Aujourd’hui, nous avons ajouté l’alimentation végétale et la biodiversité ». Aujourd’hui, cette marque historique, première grande marque à avoir fait du bio en GSA, explique devoir se battre pour retrouver ses parts de marché face aux grandes marques nationales conventionnelles arrivées dans le bio. « Nous n’étions plus les seuls en position hégémonique, face à eux qui ont des forces marketing et de communication et une façon beaucoup plus sophistiquée d’aborder les consommateurs. » En 2020, Bjorg a donc lancé « un grand dépoussiérage » : des innovations (gamme Les petits Curieux, qui cible les enfants, pour faire la transition entre les cibles traditionnels bébé et adultes seniors), gros plan de communication (campagne Bjorg to be alive), des packagings modernisés et plus gourmands…

Les pure-players du bio doivent se réinventer : le “en conversion” a sa place en rayon

La démocratisation du bio permet l’accessibilité au plus grand nombre mais ouvre également la porte à un éloignement des valeurs d’origine. Il s’agit donc de conserver la confiance des consommateurs.

Biomonde, groupement de magasins bio indépendants sur un modèle coopératif, revendique « porter la bio autrement, c’est-à-dire la bio et tout ce qui va avec : la RSE, l’écosystème, juste valeur sur toute la chaîne, respectueux de l’environnement, de nos salariés, de nos fournisseurs, des emballages…, explique Marjorie François (vice-Présidente de Biomonde et administratrice du Synadis bio).  D’un magasin Biomonde à l’autre il y a les mêmes valeurs de spécialisés et un assortiment proche, avec du local, des produits découverte référencés très rapidement. N’opposons pas les circuits de distribution, le digital avec le physique, utilisons tous les outils pour offrir le plus de services, des offres complémentaires… » Biomonde ne fera pas de MDD car l'enseigne est là pour « porter ses fournisseurs et leurs marques ».

Lire aussi : Bio : vers un essoufflement des ventes ?

Elle estime en revanche que « les produits en conversion ont leur place dans nos rayons. Les fruits et légumes c’est facile. Mais il y a un vide dans le label AB sur les produits transformés en conversion, comme le pain. Chez Biomonde, c’est donc à la discrétion du magasin de porter ça. Chez moi, nous avons inventé un stop rayon explicatif. Les clients comprennent et soutiennent la démarche et choisissent en connaissance de cause. On commence à voir un frémissement des initiatives de petites structures, et c’est tout à fait cohérent. »

C’est le cas de BioDemain, une marque qui achète à quelque 80 agriculteurs des produits en conversion, « des produits de la vie de tous les jours pour permettre à chaque citoyen d’aider les agriculteurs à passer au bio sans changer ses habitudes d’achats, explique Maxime Durand (co-fondateur & directeur général de BioDemain). Notre rôle est aussi de montrer que les produits en conversion ont leur place dans les magasins bio. Une fois bio, le packaging des produits passera du orange au bleu, et signalera la réussite des agriculteurs. Nous les pousserons à aller plus loin, sur du bio augmenté. Encore peu de nos agriculteurs ont fini leur conversion. » BioDemain est certifié Esus, (agrément d’état Entreprise solidaire d'​utilité sociale).

Des grandes marques se positionnent aussi sur cette transition « pour joindre le club du bio et célébrer l’effort des agriculteurs, par exemple d’aucy avec ses bocaux Bien cultivés. C’est un positionnement marketing intéressant car ça humanise », illustre Caroline Roux.

Les pure-players du bio doivent se réinventer : des histoires à raconter, d’autres labels à associer

La Fnab a lancé avec Picard en mars 2020 son label BFE : Bio Equitable Français. Aujourd’hui, Stéphanie Pageot (présidente de la Fnab), estime que le label doit évoluer pour aller sur d’autres critères supplémentaires, notamment social (travailleurs saisonniers, respect du droit français et conditions d’accueil) et sur la thématique de la biodiversité, et peut -être ensuite sur le climat et le bien-être animal. Gérald Townsend (responsable Développement Durable chez Picard) précise que l’enseigne n’a pas peur de multiplier les labels dans ses bacs de congélateurs. « Bio, en conversion, sans résidus de pesticides, BFE… On commercialise déjà tout cela. Oui on va peut-être perdre des consommateurs en route, mais pas les plus jeunes, hyper sensibles à ces démarches. Et les moyens de communication digitaux permettent d’expliquer et de détailler ces labels. »

Lire aussi : Offre et demande : la juste équation du bio ? Encadré 2 : exemple de structuration de filières amont-aval : Picard et la Fnab dans les légumes locaux surgelés

Oé est une jeune marque de vin bio, vegan, zéro pesticides, zéro déchet (par la mise en place de la consigne) et B-Corp. « Nous sommes très transparents sur nos vignerons, insiste Thomas Lemasle (CEO co-fondateur de Oé). Le rayon vin bio a des histoires à raconter aux consommateurs parce qu’aujourd’hui, ça manque. Le vin en général est plein de pesticides, ma vigne représente 6 % de l’agriculture mais 20 % de l’utilisation des phytos. Les consommateurs sont aussi curieux du métier de vigneron, de ce qu’est un vin… »

Parmi les moyens d’apporter des informations aux consommateurs : les informations on pack, les QR Codes, les Scores (NutriScore, EcoScore, empreinte carbone…). Il ne faut pas négliger la blockchain pour une transparence financière, surtout pour les filières lointaines et opaques comme le cacao ou le café, estime Caroline Roux. « Car le bio est menacé par l’arrivée d’autres certifications qui renforcent la naturalité mais qui sont moins règlementées ou contrôlées, comme la HVE ou l’agriculture régénératrice. »

 

 

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