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Combien coûte une sélection massale en vigne ?

Préserver le patrimoine génétique de ses vieilles vignes a un prix. Un plant issu de sélection massale vous coûtera au bas mot 30 à 50 % plus cher qu’un clone.

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Les greffons issus de sélection massale sont confiés au pépiniériste, qui réalise une prestation de pépinière privée et se charge des démarches administratives.
© J.-C. Gutner

Depuis quelques années, la sélection massale a le vent en poupe. Que ce soit pour des raisons de diversité génétique ou bien pour jouer sur le profil des vins, de nombreux vignerons décident de reproduire les gestes de leurs anciens. À un détail près. Car tout professionnel avisé sait qu’au XXIe siècle, les règles de l’art de la sélection massale intègrent un volet d’analyses sanitaires pour ne pas disséminer les fléaux que sont le court-noué, l’enroulement et autres pathogènes. « L’étape du tri des individus est tout bonnement incontournable, estime Simon Blanchard, associé chez Derenoncourt consultants. Quand on voit le coût d’une plantation, qui est parfois plus chère que le foncier lui-même, il est impensable de planter des pieds de vigne sans s’assurer qu’ils sont sains. »

Mais quel coût cela peut-il représenter ? Quelle différence d’investissement existe-t-il entre une plantation clonale et massale ? Comme souvent, cela dépend de plusieurs facteurs. Que ce soit du côté des pépiniéristes ou des consultants, l’accompagnement pour la sélection est bien souvent à la carte. « En général, on considère qu’une rencontre sur place avec un de nos techniciens est un minimum, Laurent Hilaire, directeur commercial des pépinières Mercier. Souvent on en préconise deux. » Un déplacement facturé à la journée, représentant quelques centaines d’euros.

L’étape de sélection n’est pas fondamentalement onéreuse, mais chronophage

Mais les prestations peuvent aller beaucoup plus loin, le pépiniériste pouvant gérer le marquage des bois en hiver et même les prélèvements de sarments. Réaliser la sélection de A à Z, en somme. « Chaque déplacement étant compté comme une mise à disposition de technicien au forfait jour », précise Laurent Hilaire. Bien entendu, le vigneron peut aussi gérer lui-même l’étape de sélection dans son intégralité. « Observer tout au long de l’année la qualité de fructification, l’esthétique, la véraison, goûter les baies aux vendanges sur deux à trois millésimes, ce sont des coûts difficiles à chiffrer précisément, mais il est clair que cela représente du temps », analyse Simon Blanchard.

Un coût facile à estimer en revanche est celui des analyses de viroses par tests Élisa. Il dépend du nombre d’échantillons et des virus recherchés (court-noué, enroulement 1 et 3…), mais il faut compter généralement entre 15 et 20 euros par analyse. « Pour éviter de payer une analyse par cep et optimiser un peu les coûts, il est possible de regrouper les échantillons par lots de 10 ceps, suggère le consultant bordelais. Si le test est négatif c’est que les 10 sont bons. S’il est positif, il faudra refaire analyser ces 10 là. » Sachant que le suivi s’opère généralement sur 20 à 50 pieds.

Une fois ce travail réalisé, le passage par la pépinière s’impose. « La pépinière privée est une activité très encadrée, avec un protocole réglementaire strict », relève David Amblevert, pépiniériste en Gironde. Les spécialistes du matériel végétal s’occupent des aspects administratifs, comme les déclarations à FranceAgriMer, traitent le bois à l’eau chaude (obligation légale), multiplient les greffons qu’on leur a transmis, réalisent la greffe et conditionnent les plants comme ils le font pour les plants certifiés. Généralement, le pépiniériste facture le viticulteur au pied, en ajoutant au prix du plant classique une majoration, selon les volumes et les modalités. « Une prestation de lots pied par pied demande plus d’organisation que si on mélange les individus sélectionnés, et coûte plus cher », illustre David Amblevert.

La prestation de pépinière privée induit un surcoût du plant de 25 à 50 %

Le pépiniériste estime qu’en moyenne, un plant de vigne issu de sélection massale qui sort de chez lui coûte environ 50 % plus cher qu’un plant classique. Laurent Hilaire, quant à lui, parle de 25 à 40 % de surcoût. Ce qui n’inclut pas la sélection en amont et le coût des analyses. « Pour ceux qui souhaitent bénéficier des avantages de la massale mais à moindres frais, nous proposons également une gamme de plant nommée Unik, glisse Laurent Hilaire. Ce sont des sélections que l’on a réalisées en récupérant divers individus intéressants dans différents pays et que nous multiplions à grande échelle. Un massale qui ne vient pas de votre domaine mais du monde entier, en somme. » Ces plants coûtent entre 15 et 40 % plus cher, mais il n’y a ni travail de sélection ni analyses à ajouter. Laurent Hilaire ajoute qu’il y a un élément financier indirect à garder en tête, celui de travailler avec des plants standards et non des plants certifiés. « Ce matériel végétal sort du cadre imaginé par les instances, et n’est pas éligible aux diverses aides et subventions », prévient-il.

Témoignage : Yannick Chaudrillier, directeur technique du domaine Cassagne et Vitailles à Montpeyroux, dans l’Hérault

« Un investissement non négligeable que j’estime rentable »

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Yannick Chaudrillier, directeur technique du domaine Cassagne et Vitailles à Montpeyroux, dans l’Hérault © Y. Chaudrillier
« Dès que nous avons repris le domaine et qu’il a fallu replanter, nous nous sommes intéressés à la sélection massale. Il se fait de très belles choses en clonal, mais dans notre philosophie il nous semblait que la massale permettait de préserver la diversité génétique de nos vieilles vignes et que cela pouvait conduire à une plus grande complexité aromatique dans le vin. Nous avons confié la totalité de la prestation à notre pépiniériste, qui prélève 100 à 300 individus par hectare. N’en sélectionner que 10 se rapprocherait d’une clonale et n’aurait pas de sens ! Le coût total est non négligeable, il faut multiplier par deux voire trois par rapport à une plantation classique. Mais je suis convaincu que c’est un investissement rentable. Sur les premières parcelles, qui ont 6-7 ans, la vigne est belle et vigoureuse, plus que chez nos voisins. Et les premiers jus sont extras, à la hauteur des produits d’exception que l’on souhaite créer. Nous attendons également un effet sur la longévité des vignes. C’est véritablement une réflexion sur le long terme. »

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