Bientôt une levure de synthèse en laboratoire
La recherche en microbiologie fondamentale progresse rapidement. On annonce même des levures « Frankenstein » pour l’année prochaine dans les laboratoires de recherche. Pour l’instant le monde du vin reste lui attaché à des levures plus naturelles.
La recherche en microbiologie fondamentale progresse rapidement. On annonce même des levures « Frankenstein » pour l’année prochaine dans les laboratoires de recherche. Pour l’instant le monde du vin reste lui attaché à des levures plus naturelles.
Qu’est-ce qu’une levure de synthèse ?
La levure attendue est une Saccharomyces cerevisiae aux chromosomes dits de synthèse biologique, c’est-à-dire entièrement fabriqués par l’homme à partir de molécules et non issus d’une levure parent vivante. Saccharomyces cerevisiae possède 16 chromosomes, porteurs de 6 000 gènes.
Où en est-on ?
Un consortium de recherche international rassemblant plus de 200 chercheurs travaille à la création d’une telle levure. Les 16 chromosomes ont déjà été synthétisés avec succès. Mais pour l’heure, ils sont dans des laboratoires différents et n’ont pas encore été rassemblés. « Notre objectif est de réunir ces 16 chromosomes dans une unique cellule. Nous l’atteindrons durant l’année 2021 », a estimé le professeur Sakkie Pretorius, chercheur à l’université australienne Macquarie et membre du consortium.
Quel est l’enjeu d’une telle levure ?
L’enjeu est avant tout de faire avancer la recherche, notamment la connaissance du génome de la levure, l’expression de chacun des gènes ainsi que leurs interactions. Les chercheurs annoncent des retombées possibles dans le domaine médical et industriel. Sakkie Pretorius attend aussi des retombées pour la recherche en œnologie.
Mais pour lui, la commercialisation de telles levures n’est pas « imminente », même si la synthèse de gène permet de jouer facilement sur les performances des levures. Le chercheur avait déjà fabriqué en laboratoire une levure « semi-synthétique » dotée de quatre gènes de synthèse supplémentaires et capable d’augmenter l’arôme de framboise des vins.
La filière vin accepterait-elle ces levures ?
Difficile de prédire pour les décennies à venir. Mais actuellement en Europe, consommateurs et producteurs sont très loin d’être favorables à de telles levures. Déjà, il y a plus de dix ans, l’Europe avait tourné le dos à la levure génétiquement modifiée ML01, capable de réaliser à la fois la fermentation alcoolique et la fermentation malolactique.
Comment évolue la sélection des levures et bactéries en France ?
La très grande majorité des levures commerciales sont toujours issues de sélection de levures naturelles. Deux autres méthodes se développent : l’hybridation entre deux souches de levures, une technique naturelle qui consiste à rapprocher deux spores de souches différentes, et l’adaptation évolutive, à savoir le maintien de souches de levure dans des conditions extrêmes (par exemple des moûts carencés en azote) pour obtenir des mutations naturellement.
Côté bactéries, toutes celles commercialisées actuellement ont été obtenues par sélection de bactéries indigènes.
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