Aller au contenu principal

L’exosquelette : une assistance aux apiculteurs ?

Pour lutter contre la pénibilité et l’usure professionnelle en apiculture, une étude exploratoire a été menée en Corse sur l’usage d’un exosquelette, pendant quinze jours, chez six apiculteurs et apicultrices.

L’activité apicole nécessite de travailler dans un environnement ambiant dynamique où les efforts physiques tels que le port de charges lourdes, les gestes répétitifs et la manipulation des différents matériels entraînent une pénibilité et une usure professionnelle.

Une action collective innovante et apprenante

Une expérimentation sur la mise en place d’un dispositif d’assistance physique et d’aide à la réduction de la pénibilité du métier d’apiculteur a été portée par le syndicat AOP Miel de Corse - Mele di Corsica, avec la coordination technique de l’Aract Corse [Action régionale pour l’amélioration des conditions de travail] et financée par l’Odarc [Office de développement agricole et rural de Corse]. Celle-ci vise à identifier en situation réelle d’activité, les facteurs positifs et négatifs de l’utilisation d’un exosquelette, de comprendre les contraintes et besoins des apiculteurs qui agissent dans des environnements très différents (interne miellerie, externe ruchers) afin d’en extraire des recommandations et de tirer des enseignements pour l’ensemble de la profession.

Trois grands objectifs sont visés : diminuer la pénibilité, limiter la désinsertion professionnelle et développer la part des femmes dans ce secteur (28 % environ à ce jour). Six apiculteurs volontaires ont participé à ce test grandeur nature (trois femmes et trois hommes), sélectionnés sur la base de leur expérience dans le métier, l’envie de développer et de pérenniser leur activité.

Un diagnostic ergonomique pour la mise en place d’indicateurs

Une première phase d’observation par des ergonomes a permis de collecter les impressions des exploitants sur leur organisation et les tâches à réaliser. Elle a été dédiée au partage et à la définition des situations problématiques au sein de chaque exploitation. Plusieurs constats sont établis en amont de la phase terrain chez les apiculteurs :

Il existe des différences par rapport au genre : les femmes ressentent des douleurs plus précocement que les hommes et ont des répercussions physiques à des âges moins avancés. De plus, les femmes de l’étude ont davantage tendance à faire attention aux gestes de réalisation pour pouvoir préserver leur santé que les hommes. Ce résultat est en lien avec les douleurs perçues au cours de l’activité. Elles développent des stratégies pour préserver leur santé : travail à deux pour le port de charge, astuce pour limiter les postures contraignantes, etc.

Les apiculteurs réalisent de nombreuses postures contraignantes au cours de leur activité, et notamment dans les tâches telles que les transhumances, les récoltes ou encore le suivi des colonies. Le type d’exploitation a un impact sur les conditions de travail. En effet, les équipements, le choix des terrains ou encore l’organisation de l’activité, s’ils sont insuffisants ou inadaptés peuvent entraîner une augmentation des interventions sur les ruches favorisant le développement de pathologies (trouble musculosquelettique, lombalgie, altération du canal carpien).

Deux modèles d’exosquelettes ont été testés

L’utilisation en autonomie de l’exosquelette sur des activités ciblées a duré quinze jours consécutifs. Deux modèles, acquis par l’Aract et mis à disposition des apiculteurs, ont pu être testés par les apiculteurs. Le Hapo MS est adapté pour les travaux nécessitant une assistance des bras à hauteur de 0° à 135° et dans une amplitude horizontale de 180°, visant à réduire la pénibilité et améliorer les conditions de travail. Le Hapo diminue les efforts lombaires et préserve les disques intervertébraux. Il est destiné à toutes personnes ayant besoin d’une assistance pour le dos et/ou aux personnes dont le poste est considéré comme pénible pour le dos.

Le ressenti des apiculteurs a permis d’évaluer les bénéfices et contraintes de chaque exosquelette pour lesquels ils n’ont pas tous le même avis lors du test d’un même dispositif. En effet, il y a une forte variabilité individuelle en fonction de la singularité, de la typologie de l’exploitation et l’utilisation de matériel. De plus, les personnes ayant ou ressentant des douleurs avant le test ont mieux accepté le dispositif que les autres.

Le dispositif lombaire rencontre un meilleur succès

Le Hapo MS (bras) cumule uniquement des points négatifs : il apporte une source de douleur supplémentaire, n’est pas compatible avec les gestes du métier et contraint les mouvements lors de la réalisation des différentes tâches. Le Hapo (lombaires) quant à lui a rencontré un plus grand succès. Il a permis d’améliorer la posture de travail avec une réelle utilité lors de tâches où l’on est amené à rester penché légèrement vers l’avant (traitement des varroas, récolte et transhumance par exemple). Cela est dû à un effet « ressort » qui accompagne et aide à se repositionner suite aux flexions du tronc vers l’avant et permet de diminuer la sensation de port de charge. Il est démontable et lavable en machine. Néanmoins, il est une source de chaleur supplémentaire, n’est pas compatible avec l’utilisation d’une poche à eau dorsale et ne semble pas adapté aux tâches réalisées en miellerie. Le travail à genoux à tendance à dérégler les sangles ce qui le rend inconfortable.

Ce ne sont pas des solutions miracles

Leur utilisation peut être utile pour accompagner les apiculteurs dans la réalisation de certaines tâches de leur activité mais dans certains cas peut devenir une contrainte et une source de douleurs supplémentaires.

L’acceptabilité de ce dispositif dépend de deux variables : l’utilité et la facilité d’usage perçues. Ainsi, la mise en place doit être réalisée en étroite collaboration entre le futur utilisateur et un ergonome en tenant compte des caractéristiques physiques, de l’activité et du ressenti de l’apiculteur.

Il est également important de prendre en compte les disparités entre hommes et femmes exerçant le même métier.

Enfin, ces dispositifs semblent davantage adaptés pour effectuer du maintien en emploi que de la prévention primaire. C’est pourquoi, au vu de ces premiers éléments, il semble nécessaire de travailler collectivement sur l’amélioration de ces outils.

Qu’est-ce qu’un exosquelette ?

Il s’agit d’un système permettant de soulager les efforts et d’assister l’opérateur. Il est défini comme une « structure externe, revêtue par l’opérateur, conçue pour apporter une assistance physique dans la réalisation d’une tâche ». Il peut être motorisé (exosquelette actif) ou non.

Rédaction Réussir

Les plus lus

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 50€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir Apiculture
Consultez la revue Réussir Apiculture au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière apiculture