Porc : Moraliser le périmètre commercial de la viande de porc
Le 6 mars, la tournée régionale de la Fédération Nationale Porcine s’est arrêtée en Haute-Loire, à Espalem. L’occasion pour la filière régionale de débattre sur les perspectives d’avenir.
«La filière porcine décroche depuis les années 2000. Et depuis 2007, la perte des élevages porcins se compte à environ 15 centimes d’e du kilo par porc. Aujourd’hui, l’élevage porcin ne génère plus de résultat» a indiqué Paul Auffray, président de la Fédération Nationale Porcine (FNP), à l’occasion d’une réunion décentralisée en Haute-Loire.
Renouvellement des générations en panne
La crise du porc induit une perte de production (en têtes) de l’ordre de 2% par an et une disparition de 300 exploitations porcines par an. Autre impact négatif de la crise : le renouvellement des générations d’éleveurs est en panne ; «un signe très inquiétant» selon le président de la FNP.
«Si on ne réagit pas maintenant, dans 5 ans il n’y aura plus d’élevages porcins en Haute-Loire» atteste un conseiller de gestion de CERFRANCE Haute-Loire qui assistait à cette réunion de travail à laquelle ont participé des éleveurs de la région Auvergne et des experts de la filière.
La production porcine française souffre de la conjonction de plusieurs problèmes. La compétitivité de la filière française est inférieure à celle de l’Allemagne et de l’Espagne : «Ces deux pays ont en effet réussi à restructurer plus facilement que nous leurs élevages porcins et la filière porc française ne s’est pas suffisamment modernisée». La France est frappée de plein fouet par une distorsion de concurrence au niveau de la main d’oeuvre (moins chère dans certains pays européens). Enfin, le monopole de la distribution en France nuit véritablement à la production porcine. «La grande distribution nous confisque toute la valeur ajoutée» ont indiqué l’ensemble des acteurs de la filière qui participaient à cette réunion.
Paul Auffray a dénoncé la pratique des promotions dans les GMS. «La viande de porc en promotion est vendue moins chère que du Canigou ! Ceci est une atteinte à l’éthique de notre métier ; notre travail et notre produit ont un prix».
Malgré toutes ces difficultés, le président de la FNP ne tient pas à cultiver le pessimisme ; la fédération a engagé plusieurs réflexions et actions pour aider la filière porcine française à relever la tête.
Stopper la guerre des prix agro-alimentaires
La FNP souhaite mettre un terme à la guerre des prix agro-alimentaires en France ; pour ce faire, la fédération souhaite réunir l’ensemble des acteurs de la filière autour d’une table. «Moraliser le périmètre commercial de la viande de porc» tel est l’objectif de la FNP.
Pour la profession agricole, l’avenir de la production porcine passe aussi par une réappropriation du marché national. «En France et dans les régions, on doit se réapproprier notre marché. Les Allemands et les Espagnols se considèrent chez eux en France !». Certes la pression syndicale orientée sur la distribution et les grands groupes industriels (Herta, Fleury Michon...) commence à porter ses fruits. La profession entend poursuivre ce combat tout en conduisant une réflexion sur la notion de contractualisation et en encourageant toutes les démarches (Porc de Haute-Loire, dénomination montagne...) qui contribuent à ramener de la valeur ajoutée au producteur.
Réinvestir les rayons avec «Le Porc français»
«Nous souhaitons réinvestir les rayons avec le porc français ; fruit d’une démarche interprofessionnelle, le logo «Le Porc français» garantit l’origine française des viandes de porcs, de porcelets, de coches et des produits qui en sont issus» explique Paul Auffray.
Alors que les perspectives 2015 annoncent une baisse probable des cours du porc (voir encadré), les éleveurs pourront au moins compter sur l’ICHN porc (obtenue dans le cadre de la réforme de la PAC) ; pour le président de la section régionale porcine, Christian Guy, «même si nous ne connaissons pas encore toutes les modalités, c’est une bonne nouvelle pour les éleveurs».
La FNP entend prochainement créer un fond de développement qui permettrait de financer des projets sous forme de prêts ; ce fond serait alimenté par le gain (de 2cts d’e/porc) obtenu par la filière porc dans le cadre des négociations sur l’équarrissage.
Véronique Gruber