Mesurer pour mieux faire évoluer les pratiques agricoles
Porté par les huit chambres d’agriculture du Massif central, le projet visant à adapter les pratiques culturales au changement climatique vient de livrer ses premiers résultats.
Sensibiliser les acteurs agricoles du Massif central à la question du changement climatique et recenser les impacts qu’il pourrait avoir sur les systèmes de production, tel est l’ambition du projet AP3C (Adaptation des pratiques culturales au changement climatique), lancé, il y a un an par les chambres d’agriculture réunies autour du Sidam. « Le changement est déjà visible sur nos exploitations depuis quelques années. Nous ne pouvons éluder la question plus longtemps. Un tel projet doit permettre d’entrer dans l’ère de l’anticipation, de la pro-action et plus uniquement dans la réaction », témoigne Olivier Tourand, élu à la Chambre d’agriculture de la Creuse et référent du projet AP3C. Le travail d’analyse des données climatiques auprès de Météo-France a été le plus prenant lors de cette première année, bien que l’approche agronomique ait également été lancée. Seules les données thermiques ont été approchées jusqu’à présent. Des séries de températures minimales et maximales relevées sur environ soixante-dix stations réparties sur le Massif entre 1980 et 2015 ont ainsi été homogénéisées (gommage des erreurs de mesure, « remplissage des trous »…), étape préalable à leur projection. Ce travail d’homogénéisation a permis d’analyser les évolutions de température réellement observées sur la période 1980-2015. « Parmi les constatations marquantes, nous pouvons signaler l’élévation de la moyenne annuelle des températures maximales sur la période 1980-2015. Le rythme d’accroissement de celles-ci est compris entre +4 °C et +4,8 °C/siècle (unité équivalente à des dixièmes de °C par décennie) selon les zones du Massif », souligne Vincent Cailliez climatologue à la chambre d’Agriculture de la Creuse. L’évolution la plus sévère se produit vers le nord-est du Massif. « Elle peut être sensiblement différenciée à l’intérieur d’un seul département, ce qui condamne des approches uniformes (ou uniformistes) du changement climatique », insiste Vincent Calliez.
Déterminer des indicateurs agro‑climatiques
Concernant l’évolution de la moyenne estivale des températures minimales, nous nous trouvons face à un phénomène plus complexe à décrire. Tout d’abord, la température minimale est généralement relevée en fin de nuit et dépend de considérations topographiques (fond de vallée, type de pente, orientation…) d’échelle bien plus petite que celle de notre réseau de mesure. Les corrélations géographiques sont donc faiblement significatives et laissent une incertitude statistique importante. Ensuite, et malgré une forte élévation des températures moyennes estivales non représentées ici, les valeurs de tendances linéaires sont faibles, vraisemblablement à cause de l’assèchement progressif de l’air qui permet une chute relative plus importante des températures nocturnes. Le long d’une ligne reliant le sud de la Haute-Vienne à l’Ardèche, cet effet est maximal, induisant une élévation à la limite de détection. Ces considérations seront à confirmer et à compléter lorsque les évolutions des précipitations et des écarts de température auront été conduites, soit dans 12 à 18 mois. À la suite des projections climatiques de températures qui sont en cours de réalisation, une liste d’une douzaine d’indicateurs agro-climatiques thermiques sera projetée dans l’hiver et permettra d’aboutir aux premiers résultats exploitables au point de vue agricole au début 2017. Conduit sur quatre ans, le projet AP3C se déroulera en deux phases jusqu’en 2019.