Les producteurs de lait vont profiter d’un contexte mondial favorable
Vincent Chatellier, économiste à l’Inra, croit à une hausse de la production laitière pour répondre à une demande mondiale qui explose.

Une fin inéluctable des quotas
Car depuis 1970, la France est devenue excédentaire en tout : blé, maïs, volaille, viande bovine, lait... Une nécessaire régulation a conduit à la mise en place de quotas. Dans un contexte totalement différent, leur application ne semble plus utile. De fait, “la régulation de l’offre dans le secteur laitier ne sera donc plus assurée par les pouvoirs publics, mais par les entreprises de collecte et de transformation”, pense l’économiste qui n’imagine pas pour autant une baisse sur la feuille de paie. “Car il ne faut pas oublier l’explosion de la demande mondiale qui réclame huit milliards de litres en plus tous les ans. Soit 21 fois la production du département”, a-t-il calculé. “D’autant que l’on a sous-estimé la capacité des pays asiatiques à surenchérir. D’où la flambée des prix”, analyse-t-il, en affirmant que le litre de lait sera 40 % plus cher d’ici 2016 que sur la période 1996-2006, avec une plus- value répartie entre les différents maillons de la filière.
Après avoir décortiqué les productions des principaux pays capables de répondre à la demande (Nouvelle-Zélande, USA, Canada, Argentine, Brésil, Inde et même la Chine), Vincent Chatellier conclut que l’Europe a une carte importante à jouer, tant en termes de production que de transformation (le lait brut étant un produit qui supporte mal d’être transporté). “Nous avons des technologies de pointe, mais on exporte trop mal”, pense-t-il, en invitant les régions françaises à être réactives et à s’organiser dès maintenant en “bassins de production”. Il prévient : “Le grand Ouest appuie déjà sur le champignon”.
Enjeu social et environnemental
Evidemment, M. Chatellier sait que les exploitations laitières sont chaque année moins nombreuses (-4 % tous les ans). Elles seront donc condamnées à être plus productives. Il précise que déjà la moitié du quota national est réalisé dans des structures qui livrent plus de 300 000 litres. C’est 22 % des exploitations laitières françaises... 5 % de celles du Cantal. “Sans faire du productivisme acharné, il faut tabler sur un minimum par exploitation”, résume-t-il. En ce sens, la forme sociétaire, de type Gaec, semble être la solution idéale. “C’est par là que passe la restructuration”, affirme le spécialiste qui prédit que 75 % du lait sera produit dans des Gaec d’ici 2015. En observant que les jeunes agriculteurs livrent déjà davantage que leurs aînés, il s’avoue confiant, parlant d’un “mouvement rassurant de profesionnalisation”. Mais ce ne sera pas le seul défi. Vincent Chatellier n’oublie pas de mentionner dans son exposé la dimension sociale ; l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Il évoque aussi les notions environnementales pour lesquelles, selon lui, “la copie est bonne et mérite d’être reconnue par les pouvoirs publics”. À cet égard, l’économiste réputé qu’il est parvient à démontrer que les soutiens publics ne coûtent pas cher à la société. Toutefois, il juge le calcul des droits à paiement unique (DPU) si injuste et incompréhensible, qu’ils devront forcément être repensés bientôt.