Les matières premières arrivent à une fin de cycle
L’équipe de publication du Cyclope, sous la direction de Philippe Chalmin, vient de publier l’édition 2015. Tour de glas général.
Glas : sonnerie de cloches annonçant l’agonie, la mort ou les funérailles de quelqu’un selon Larousse. C’est aussi le titre de l’inoubliable roman d’Ernest Hemingway « Pour qui sonne le glas » publié en 1940 et réunissant les souvenirs de journaliste de l’écrivain américain sur la guerre civile d’Espagne. Mais c’est aussi une référence au poète anglais du xviie siècle John Donne : « Nul homme n’est une île, un tout en soi ; chaque homme est partie du continent, partie du large ; si une parcelle de terre est emportée par les flots, pour l’Europe c’est une perte égale à celle d’un promontoire, autant qu’à celle d’un manoir de tes amis ou du tien. La mort de tout homme me diminue parce que je suis membre du genre humain. Aussi n’envoie jamais demander pour qui sonne le glas : il sonne pour toi », tiré des « Devotions upon Emergent Occasions » en 1624. En 2015, Philippe Chalmin, professeur à l’université Paris-Dauphine, en a fait le titre de la nouvelle édition du Cyclope, la 29e, bible des matières premières mondiales. Mais qui est donc mourant au point que les cloches sonnent ? En fait, de nombreux points clés de l’organisation du monde actuel sont menacés. Et Philippe Chalmin les a énumérés en introduction de sa présentation. Le glas, c’est pour la mondialisation « heureuse », celle qui devait faire que tous les peuples se sentent mieux du simple fait de l’apparition d’un marché global. « Il n’existe pas une seule matière première qui a progressé vraiment. Les reculs sont même forts pour le fer, le fret, les métaux. Même les produits agricoles ont reculé (lait, coton, sucre…), même si la baisse est moindre que celle anticipée. On est face à une rupture qui marque une grande phase d’euphorie. Celle-ci est derrière nous en 2015 » indique le professeur. On peut aussi parler de glas pour les pays pris individuellement. Les grands émergents qui formaient les Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), et qui portaient tous les espoirs du monde, connaissent des récessions sévères. « La Chine reste l’interrogation majeure des marchés : faut-il faire le pari de la nouvelle normalité chinoise, c’est-à-dire une croissance économique à 7 % par an au lieu de 10 et plus ? En tout cas, ces 7 % sont tout à fait essentiels aux marchés mondiaux. Et n’oublions pas que la Chine est devenue le premier importateur mondial de pétrole et qu’elle va battre un record d’importations de soja en 2015. Elle va également importer de plus en plus de sucre » commente Philippe Chalmin. Pour ce dernier, l’Afrique du Sud n’a jamais émergé et l’Inde pèse finalement peu sur les marchés mondiaux. Pour revenir à la Chine, il faudra aussi s’attacher à comprendre et à s’adapter à une nouvelle donne essentielle : celle du passage d’une économie de politique des stocks volumineux (celui d’une économie en guerre) à celle d’une économie qui tend à contrôler ses circuits commerciaux d’approvisionnement et de débouchés.
La suite dans le Réveil Lozère, page 3, édition du 28 mai 2015.
Cyclope
L’ouvrage existe en version papier au prix de 139 euros aux éditions Economica (www.economica.fr). Il peut aussi être téléchargé, dans sa totalité ou par chapitre individuellement. Pour en savoir plus, www.cercle-cyclope.com.