L'eau, une problématique agricole
Dans un contexte de changement climatique, le maintien d'une agriculture compétitive appelle à anticiper les évolutions et à assurer une meilleure valorisation de la ressource en eau. Comment se préparer ? comment anticiper ? Quelles orientations prendre ? Quelles mesures adopter ? Comment économiser l'eau ? Comment rendre des exploitations agricoles quasi autonomes ?
C'est au lycée agricole d'Ahun que dernièrement a eu lieu un second séminaire sur la thématique de l'eau. Présidés par Madame Magali Debatte, préfète de la Creuse, assistée de Thierry Gaillard, vice-président du Conseil départemental chargé de l'environnement, différents acteurs du département sont intervenus pour expliquer les problématiques rencontrées.
Après une première rencontre en octobre 2018 sur le thème de « l'eau et le changement climatique », des groupes de travail se sont réunis pendant plus de 7 mois pour avancer dans la réflexion de cette problématique. Madame la préfète avait d'ailleurs pris un arrêté à la suite d'une des réunions en avril 2019, pour restreindre les consommations d'eau.
À ce jour, les problèmes restent identiques ! La profession agricole reste désemparée. Impossible de retenir l'eau lorsque celle-ci tombe en abondance et ceci dû à une réglementation et à son application draconienne. Pour exemple ce jeune agriculteur qui se morfond de ne pouvoir rendre son exploitation quasi-autonome : « la réglementation m'interdit de récupérer l'eau dans ma propriété, je ne peux pas augmenter la capacité de retenue d'eau déjà existante pour pouvoir arroser certaines de mes terres, en vue d'une production de maïs semences ! Mes projets tombent à l'eau. »
De la qualité aussi !
Au-delà de l'irrigation, le problème majeur pour les éleveurs est bien l'alimentation en eau du bétail. Des solutions peuvent exister mais restent contraignantes. La récupération des eaux de toit serait une des solutions, mais attention, la qualité sanitaire de l'abreuvement peut avoir des conséquences dramatiques sur les cheptels. L'intervention de Boris Boubet, vétérinaire conseil au GDS Creuse, démontre que cette solution est difficilement envisageable pour des raisons sanitaires « il ne faut pas stocker l'eau n'importe comment, pour l'abreuvement des bêtes la qualité est primordiale, si vous ne pouvez pas boire l'eau, vos bêtes non plus » indique-t-il.
Vif débat !
Les échanges entre la salle et les intervenants ont été houleux ! « Cette réglementation ambiguë ne permet pas aujourd'hui de réaliser des projets, d'amener une forme d'autonomie pour l'abreuvement des animaux et pour une récolte assurée dans le but d'affourager notre bétail dans des conditions pérennes. »
« Le plus bel exemple, il y a une vingtaine d'année, les espagnols venaient chercher la paille en France mais ils se sont adaptés aux évolutions climatiques en créant des retenues d'eau pour irriguer une partie de leurs cultures et aujourd'hui se sont les éleveurs creusois qui vont chercher la paille en Espagne pour nourrir les bêtes. D'autres solutions existent tels que les captages ou les forages mais sont toujours entravés par une pseudo-réglementation peut lisible pour les éleveurs. »
La séance a été conclue par Madame la Préfète, sur des éléments relativement évasifs quant à cette réglementation et son application dans notre département.
Le mot de Thierry Jamot, Président de la FDSEA
On peut saluer la démarche de la Préfète et de son administration sur les problématiques de l'eau et de la sécheresse. Ce séminaire vient bien à propos à un moment où nous subissons encore les conséquences de la sécheresse 2018 et où nous craignons fortement une nouvelle sécheresse en 2019. Depuis des mois, nous interpellons l'administration pour assouplir cette réglementation pour constituer des réserves d'eau, des forages, des points d'abreuvement pour assurer une autonomie tant au niveau de l'abreuvement que de la constitution de stock sur nos exploitations. Force est de constater qu'à ce jour, une réglementation inadaptée ne nous permet pas de conduire à bien ces projets. Nous craignons que certains agriculteurs conduisent des projets sans attendre que la réglementation s'adapte.
Nous sommes d'autant plus étonnés, qu'à différentes reprises, et notamment au congrès de la FNSEA, que les propos du ministre de l'Agriculture sont tout à fait ouverts sur une adaptation de nos exploitations vis-à-vis du changement climatique et des besoins en eau.
Il est absolument urgent et indispensable que les quelques projets pilotes que nous avons sur notre département aboutissent rapidement pour donner naissance à de nouvelles initiatives afin d'aller vers une forme d'adaptation au changement climatique.
Que l'État nous laisse travailler ! La FDSEA soutiendra, coûte que coûte, tous ces projets vitaux pour notre agriculture.