Le Préfet Nicolas de Maistre sur le Gaec La Romaine
Le 4 juin, le nouveau Préfet de Haute-Loire a visité le Gaec La Romaine à Saint Julien Chapteuil. L'occasion pour lui de découvrir les filières agricoles porcine, ovine et de recueillir les besoins qui émanent du terrain.
?"J'avais un besoin rapide de renouer avec le terrain" a confié le Préfet de Haute-Loire, Nicolas de Maistre, après la période de réserve à respecter en raison des élections européennes.
En visitant l'exploitation agricole de Dominique et Denis Chalendard, le Gaec La Romaine à St Julien Chapteuil, le représentant de l'État voulait voir les filières agricoles qui fonctionnent, celles qui ont plus de difficultés et prendre note des problématiques agricoles. Ce temps d'échanges a eu lieu en présence des responsables de la DDT, de représentants de la Chambre d'agriculture, de la FDSEA-JA, d'autres OPA, et de nombreux élus locaux.
C'est autour de la présentation de l'activité du Gaec La Romaine, une exploitation porcine (125 truies naisseur-post sevreur) et ovine (400 brebis et 80 agnelles Noires du Velay) sur 84 ha, que les échanges avec le Préfet ont démarré. Très à l'écoute et très intéressé, Nicolas de Maistre a posé de nombreuses questions pertinentes, à commencer par les choix stratégiques de cette ferme.
La contrainte foncière
La première problématique soulevée par Dominique Chalendard fut la contrainte foncière (manque de foncier et morcellement des propriétés). En 1998, ce dernier a opté pour la production porcine, peu gourmande en surface, pour rejoindre son frère installé en ovin. À la demande du Préfet, l'éleveur a décrit le modèle économique choisi sur cette ferme : la recherche d'une complémentarité entre les deux productions. Le Préfet a signalé son intention de s'intéresser de près au sujet du foncier et a soulevé la question du remembrement... "Ce qui coince dans le département, c'est un effet culturel fort. Les familles d'agriculteurs sont très attachées à leur foncier, ceci a certainement freiné le remembrement. Mais c'est un sujet que nous avons essayé de traiter par l'installation et par le biais d'échanges de foncier durant 3 ans ; malheureusement, l'aide du Département s'est arrêtée" a indiqué le président de la Chambre d'agriculture, Yannick Fialip.
"Quel ticket d'entrée pour la production porcine ?" demande le Préfet. "Il faut 1 million d'euros pour créer une unité neuve qui assure une rentabilité économique. D'où l'idée de reprendre les élevages existants qui se libèrent et ainsi maintenir les outils (des exploitations familiales) en place" souligne Dominique.
Or, la filière porcine de Haute-Loire souffre à l'heure actuelle d'un vieillissement de ses éleveurs et d'un manque d'installation ; ce qui compromet sa pérennité.
Le Préfet a ensuite lui-même soulevé la question stratégique des abattoirs de proximité. Trois abattoirs jugés essentiels pour la filière locale et les entreprises qui transforment le porc. "L'abattoir tient la filière porc et la filière tient l'abattoir" a lancé le Préfet avec l'approbation totale de la profession agricole.
La description de la SAU du Gaec, a suscité plusieurs questions de la part du Préfet : "Quel est le lieu d'épandage ?", "Avez-vous réfléchi à la méthanisation ?". L'occasion pour Dominique Chalendard d'expliquer que le Gaec est autonome en engrais et qu'une partie des effluents part sur une exploitation voisine. Quant à la méthanisation, "Ici, la capacité de matière méthanogène est insuffisante". Yannick Fialip a enchaîné sur l'investissement très élevé (1 million d'EUR) que nécessitent de telles unités, tout comme la technicité et le temps passé.
Des successeurs difficiles à trouver
Il y a quelques années, les associés de ce Gaec ont décidé de réduire leur production ovine (de 600 à 400 brebis), en vue d'obtenir un système autonome du point de vue fourrager et pour libérer du temps à Dominique engagé dans des responsabilités professionnelles. Un modèle de régulation à la baisse que le Préfet a trouvé regrettable. "C'est aussi une forme d'adaptation au changement climatique..." a signalé le président de la Chambre d'agriculture.
Pour faire face aux nouvelles normes (de bien-être animal), le Gaec a une nouvelle fois opté pour une régulation à la baisse en réduisant son cheptel porcin. Un choix qui s'explique aussi car le Gaec n'a pour l'instant aucun successeur. "Mais rien n'est figé et pour préparer la suite, peut-être qu'un jour, il faudra revenir à des niveaux de production supérieurs" admet Dominique.
L'occasion pour Yannick Fialip d'évoquer la difficulté actuelle à trouver des successeurs pour les élevages de porcs en place : "Le problème est bien sûr d'ordre financier mais il y a aussi les contraintes de travail de l'élevage (astreinte matin et soir) et la pression médiatique qui pèse sur notre métier". Ajoutons à ces difficultés, l'absence de soutien de la PAC pour le porc, une rentabilité insuffisante des élevages et l'instabilité économique.
L'agriculture recrute
Dans ce contexte : "L'agriculture recrute. Des élevages sont à reprendre, le Service de Remplacement cherche des agents, l'agro-alimentaire recrute aussi..." lance Yannick Fialip en direction du Préfet.
Même si le métier d'éleveur est prenant, "c'est un très beau métier que je ne regrette pas d'avoir choisi" confie Dominique au Préfet qui de son côté confirme que "posséder sa propre entreprise, c'est le rêve de beaucoup de personnes ! Et lorsque cette entreprise fonctionne bien, c'est une vraie satisfaction".
Capter de la valeur ajoutée avec Le Porc de Haute-Loire
Pour aider les élevages de porcs du département à capter de la valeur ajoutée, le syndicalisme majoritaire a créé, il y a 10 ans, la démarche "Le Porc de Haute-Loire" ; une petite interprofession qui réunit 20 producteurs, 4 grossistes/abatteurs et 4 outils d'abattage. En progression constante depuis 2008, ce sont entre 500 et 600 porcs qui sont transformés dans le cadre de cette filière locale.
Le département dispose aussi d'un groupement de producteurs, le GEPVA, qui réunit 19 adhérents, et de sa filiale, la SAS Porcs Velay Auvergne orientée en post sevrage et engraissement.
Après la visite de la porcherie, le groupe a pris la direction de la bergerie où d'autres problématiques ont été abordées (voir encadré).
Autres thématiques abordées
- Mitage du territoire : Le Préfet veut lutter contre le mitage de l'habitat notamment par le biais du PLU.
- Forêt : la forêt croît en Haute-Loire. Or, d'après le Préfet, les bois non exploités par leur propriétaire pourraient offrir une amélioration du foncier agricole. Les professionnels ont montré du doigt la problématique du coût du défrichement.
- Brexit : en matière ovine, Thierry Cubizolles (président FDSEA) a souligné que le problème viendra de l'Irlande (plus compétitif que la France) fournisseur du Royaume-Uni et qui deviendra le fournisseur de la France.
- Normes : "On a perdu de la compétitivité par rapport à l'Allemagne à cause des normes françaises" a indiqué Thierry Cubizolles
- Aides européennes : Yannick Fialip demande un droit à l'erreur : "LEurope le propose. L'État doit s'emparer de cette possibilité".
- PAC : Alors que la profession redoute une baisse du budget de la future PAC, pour le Préfet ce qui compte c'est de "voir comment on ventile ce budget". Quant au verdissement, pour lui, "ce n'est pas forcément une catastrophe". D'après Yannick Fialip : "On a des systèmes agricoles vertueux et la question sera de savoir si la PAC les reconnaît".
- La profession a fait un point sur le loup et les chiens errants.
- Agribashing : "La transparence (dans l'affaire des fermes usines lancée par Greenpeace) doit connaître des limites en veillant à ne pas franchir le seuil de l'individu" a indiqué le Préfet.
- Mondial Rabelais du Saucisson : Selon le Préfet, la Haute-Loire ne devrait surtout pas laisser passer cette opportunité...
- Sécheresse : la profession a demandé l'ouverture de la procédure des calamités agricoles au titre de la sécheresse de ce printemps.