L'azote, l’élément critique en trufficulture
L’apport de fumier ou d’engrais azoté sur une truffière provoque l’arrêt de la production. Ce constat paraît surprenant quand on sait que les champignons et les truffes en particulier, ont une teneur élevée en azote, teneur très supérieure à celle des végétaux. L’apport de fumier dans les truffières devrait donc leur être bénéfique.
L’apport d’azote favorise la croissance végétative du mycélium aux dépens de sa reproduction sexuée, c’est-à-dire de la formation des truffes. La chair des champignons est riche en azote. Ces derniers ont donc de gros besoins d’azote mais, comme ils sont incapables de fixer le diazote de l’atmosphère comme le font certains microorganismes, ils doivent prélever cet élément dans leur environnement. Dans le sol, l’azote se trouve sous deux formes. La première : des composés minéraux tels que nitrates et sels ammoniacaux provenant de la minéralisation de l’humus ou formés dans les racines des légumineuses ainsi que des oxydes d’azote synthétisés lors des orages. Ces composés, en général très solubles, se dissolvent dans la solution de sol et sont facilement entraînés en profondeur lors de pluies importantes, car ils ne sont pas retenus par le complexe argile-humique. La seconde : des composés organiques azotés résultant de la décomposition des matières organiques, végétales et animales par les microorganismes. La teneur d’un sol en composés azotés est très variable tout au long de l’année. Des chercheurs de l’Inra s’efforcent actuellement de déterminer l’origine de l’azote contenu dans les truffes : provient-il du sol ou de la sève de leur arbre hôte qui ne contient que très peu de composés azotés ? L’effet négatif du fumier nous laisse penser que l’azote provient du sol. Les terrains agricoles riches en nutriments et en particulier en azote, s’ils conviennent bien aux cultures traditionnelles ne sont pas adaptés à la production truffière. Comment se fait-il qu’une forte teneur du sol en azote empêche la fructification de tuber melanosporum alors que ce champignon en a un grand besoin ? En réalité, l’apport de fumier ou d’engrais azotés lui est bénéfique, mais il favorise sa croissance végétative aux dépens de sa reproduction sexuée.Les champignons ont deux façons d’assurer la survie de leur espèce. La première est la propogation végétative. Elle consiste dans le développement du mycélium et, pour les champignons symbiotiques comme la truffe, dans la formation de mycorhizes. Le thalle occupe ainsi le maximum d’espace disponible ; mais s’il est perturbé dans sa croissance végétative, si une menace pour sa survie apparaît, alors le champignon opte pour la voie sexuée avec formation de carpophores et de spores qui assureront la naissance de nouvelles générations.
La suite dans le Réveil Lozère, page 6, édition du 5 février 2015.
Travaux
Jean Demerson, conseiller scientifique auprès de la fédération régionale des syndicats de trufficulteurs du Languedoc-Roussillon a fait paraître ses travaux sur la truffe et la trufficulture, sur la période allant de 1989 à 2015 sous le titre « La truffe, la trufficulture et les Demerson » (éditions de la Fenestrelle). Informations et vente (20 euros) aurprès de de Bernard Malzac au 06 47 49 58 86.