Fermoscopie : la filière bovins viande fragilisée
En dix ans, les moyens de production ont augmenté de 20 % mais la rentabilité est, elle, en diminution de 8 %. Cerfrance Terre d’Allier fait le point sur la filière bovins viande de l’Allier.
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Chaque année, Cerfrance Terre d’Allier fait le point sur la santé financière des différents ateliers constituant la ferme bourbonnaise. Cette semaine, intéressons-nous à l’atelier bovins viande à partir d’un échantillon de 745 exploitations.
Des aléas climatiques récurrents
L’année 2020 a été, comme les deux précédentes, marquée par les aléas climatiques et, bien sûr, la sécheresse. Les éleveurs ont été particulièrement impactés. À cela s’ajoute la crise sanitaire qui ne les a pas, certes, touchés directement mais qui a fortement influencé les marchés de la viande. Les habitudes de consommation ont véritablement changé comme le précise Cécile Vitoux, conseillère d’entreprise à l’agence de Gannat de Cerfrance terre d’Allier : « La part de viande hachée a dépassé les 50 % de la consommation totale de viande bovine. Une situation qui s’est véritablement amplifiée depuis le premier confinement, au début de l’année 2020 ».
Développement de la vente directe
A la marge, les gens qui font de la vente directe ont vu leur activité se développer et leur clientèle s’étoffer. Confirmation de Cécile Vitoux : « C’est un concept qui fonctionne bien dès lors que le cout de production et la commercialisation sont maîtrisés. Des plus en plus d’éleveurs s’orientent vers ces ventes en local dans le but de sécuriser leur source de revenus mais surtout dans une démarche de satisfaction client/producteur. Le marché existe vraiment et cette orientation vers la diversification s’inscrit dans de nombreux projets d’installations ».
Effondrement des prix
des broutards
Sur l’année 2020 on distingue DEUXpériodes : un premier semestre avec des cours constants depuis 2019 en broutards et laitonnes et un prix des animaux de boucherie à la peine. Dés le début d’été la tendance s’inverse. Cécile Vitoux complétant : « Malheureusement la production en place dans le département de l’Allier ne correspond plus aux attentes des marchés. Actuellement il y a une demande forte de jeunes femelles pour de l’engraissement. Il y a lieu de s’interroger quant à l’avenir de la commercialisation des broutards face au développement de cette filière de jeunes femelles à l’export mais aussi sur l’avenir de ces tendances : vont-elles se confirmer, vont-elles évoluer dans une autre direction ? Les exploitations devront faire preuve d’une grande souplesse d’adaptation et ce n’est pas chose évidente pour elles ! ».
Des exploitations biologiques très dépendantes des aides
Le secteur de la production en viande biologique est peu développé sur notre département comme le précise Cécile Vitoux : « Nous pouvons tout de même analyser les données de ce groupe d’éleveurs : leur EBE moyen/ha est supérieur de 26 € par rapport aux conventionnels car ils bénéficient de 51 € d’aides en plus ». Des exploitations très dépendantes des subventions bio jusqu’à maintenant. Des aides qui ont tendance à diminuer progressivement. Une situation qui pourrait avoir un impact pour Cécile Vitoux : « Le niveau d’EBE risque d’évoluer avec la prochaine PAC. Au niveau de la vente des femelles, c’est 72 % qui s’écoulent sur le marché et seulement 41 % des mâles. Localement, ne sont valorisées que les bêtes finies. Il y a sans doute encore beaucoup du travail à réaliser pour se positionner sur le marché du bio ».
Fragilisation de la santé financière
Les nouveaux zonages ICHN (indemnité compensatoire de handicaps naturels) instaurés depuis la PAC 2019, ont permis une progression des revenus dans les secteurs géographiques concernés, même si, cette situation reste à la marge car les exploitations ciblées, uniquement en production bovine, sont peu nombreuses. Au cours de l’année 2020, les aides sécheresses n’ont pas été négligeables et ont limité la baisse des revenus. Par rapport à 2018, on enregistre une augmentation des aides de 66 € par hectare. Par contre, l’EBE a baissé de 25 € entre 2018 et 2020. Une santé financière des exploitations en bovins viande qui se fragilise depuis trois ans. Si les plus solides financièrement font face, elles sont de plus en plus nombreuses à glisser vers une situation risquée.
S’adapter aux marchés
Quant aux perspectives d’avenir, se pose la question de la place de l’export pour les animaux français par rapport aux demandes du marché. Comment s’adapter à des marchés qui peuvent rapidement changer avec des productions à long terme ?
La reforme de la PAC et ses objectifs restent à définir et ses incidences sur les différentes productions ne peuvent être appréciées, qu’il s’agisse des contraintes environnementales, des labels ou du bien-être animal. Les exploitations devront trouver leur équilibre par rapport à ces attentes