Esat d'Anjoigny : l'un des rares Esat avec un élevage en France
Bientôt cinquantenaire, l’Ésat d’Anjoigny dans le Cantal s’illustre par son ancrage agricole et la diversité de ses activités, mais aussi le professionnalisme de ses 80 salariés.
Bientôt cinquantenaire, l’Ésat d’Anjoigny dans le Cantal s’illustre par son ancrage agricole et la diversité de ses activités, mais aussi le professionnalisme de ses 80 salariés.
Sous-préfète de Mauriac, Célia Pouget ne compte plus le nombre de fois où, pour rallier Aurillac, elle est passée devant l’Ésat(1) d’Anjoigny à Saint-Cernin. Sans se douter de l’étendue des activités professionnelles assurées par les 80 travailleurs et travailleuses en situation de handicap qui officient dans l’un des ateliers de l’établissement, ni de la singularité de cet Ésat bientôt cinquantenaire.
Jeudi 21 novembre, dans le cadre de la Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées, la représentante de l’État, référente handicap pour le Cantal, y a donc fait étape pour découvrir l’histoire et l’évolution du domaine qui comprend un Ésat et un foyer d’hébergement récemment rénové mais aussi, beaucoup plus rare, une exploitation agricole. L’Ésat de Saint-Cernin est ainsi l’un des seuls, voire l’unique dans la région et en France, à élever des bovins dont la production est transformée sur place.
Ancrage agricole et rural
Créée en 1975 sur des terrains mis à disposition de l’ADSEA(2) par les CCAS de Saint-Cernin et Saint-Chamant, l’établissement a d’abord été un foyer d’accueil et d’hébergement avant l’ouverture en 1981 d’une section promotionnelle et l’année suivante d’un CAT agricole avec hébergement, réservé à des hommes, avant d’accueillir des femmes et d’élargir son champ d’activités avec un atelier de poules pondeuses. Il devient Ésat suite à la loi de 2005 et développe de nouveaux ateliers : blanchisserie, espaces verts, restauration collective, atelier de conditionnement et, en cours, une production maraîchère en plus de la ferme bovine originelle dont le lait est transformé sur place en tome fermière au lait cru et beurre commercialisés dans un réseau de crémiers-fromagers, en GMS et auprès de particuliers.
Le troupeau salers (une quarantaine de mères) n’est pas en reste, dont les animaux sélectionnés foulent régulièrement les rings des comices, à la grande fierté des salariés. Un petit atelier porcin s’est également adossé à la ferme, valorisant le petit lait. “L’Ésat a développé de vraies compétences, certains salariés sont à même de traire en toute autonomie.”
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Transmission des savoirs
“Ces compétences se transmettent avec beaucoup d’anciens partis à la retraite qui ont appris et donné envie aux plus jeunes”, met en avant Marie-France Forses, directrice du complexe d’Anjoigny, non sans cacher que “faire tourner une ferme en respectant les 35 heures, ça n’est pas simple !” D’ailleurs, un plan de modernisation est à l’étude, pour lequel le soutien de l’État serait le bienvenu... L’atelier blanchisserie traite lui chaque jour entre 1,5 et 2 tonnes de linge pour des hôtels, dont celui, de luxe, de Tournemire, des gîtes, Éhpad, pour les résidents du foyer, la pouponnière de l’ADSEA... L’atelier restauration, cuisine centrale de l’ADSEA, concocte 1 000 repas quotidiens, tandis que l’atelier de conditionnement œuvre en sous-traitance pour Qualipac. “Nous faisons aussi de la prestation de services avec des salariés qui vont travailler chez Isotoner, chez des agriculteurs, pour la com com du pays de Salers comme rippers ou pour l’entretien de chemins pédestres”, liste Jean-Jacques Astings, président de l’ADSEA. Ce dernier soulignant cette évolution inclusive vers un “travail hors les murs” qui nécessite un accompagnement à la carte avec beaucoup de souplesse.
Présenter des salers en concours, c'est une vraie fierté pour nos salariés", Marie-France Forces directrice du complexe d'Anjoigny
Parcours individualisés
Individualisation des besoins, souplesse, c’est ce qui prévaut également dans les formes
d’hébergement, comme a pu le découvrir Célia Pouget. Plusieurs formules sont ainsi proposées selon les profils : quatre villas de sept chambres modernes et colorées ont remplacé en 2023 l’ancien foyer d’hébergement devenu vétuste. Quinze studios sont également loués dans le bourg de Saint-Cernin, pour des personnes plus autonomes permettant une intégration dans la vie de la commune. D’autres continuent d’être hébergées dans leur famille tout en bénéficiant du service d’accompagnement à la vie sociale.
Une cinquième villa est en travaux qui accueillera des personnes plus âgées qui ne travaillent plus ou qu’à mi-temps. L’occasion pour Jean-Jacques Astings d’évoquer un vaste chantier qui reste ouvert : celui de “l’après Ésat” et de la prise en charge des personnes handicapées retraitées. “Dans le Cantal comme ailleurs, c’est un versant du handicap qui n’est pas assez structuré, jalonné. Il faut adapter l’offre avec davantage de passerelles avec les Éhpad, les Marpa(3)...”
(1) Établissement et service d’accompagnement par le travail.
(2) Association départementale de sauvegarde de l’enfant à l’adulte.
(3) Maisons d’accueil et de résidence pour l’autonomie (non médicalisées).