Comment résister au e-commerce ?
Le commerce en ligne ne cesse de progresser dans le Cantal avec près de 25 % des achats non alimentaires, selon une étude de la CCI qui veut croire à une prise de conscience des consommateurs.
Le commerce en ligne ne cesse de progresser dans le Cantal avec près de 25 % des achats non alimentaires, selon une étude de la CCI qui veut croire à une prise de conscience des consommateurs.
Opposer le commerce de centre-ville à celui de la périphérie des villes ? Le concept est dépassé, rendu obsolète par l’essor du commerce en ligne, qui, dans le Cantal, en l’espace de quatre ans seulement (2018 à 2022), a progressé de 8 points. Certes, la trajectoire a été portée par la période Covid mais elle est vouée à s’accentuer durablement. “C’est la civilisation de la voiture qui a fait le commerce de périphérie, aujourd’hui c’est la civilisation du numérique qui fait le commerce en ligne. Il paraît donc plus pertinent d’opposer le commerce physique, humain, au commerce numérique”, estime Joseph Chauvet, patron des Ets Leclerc Aurillac et vice-président de la CCI, chambre de commerce et d’industrie du Cantal qui a dévoilé mardi 29 mai les résultats de plusieurs études qu’elle a diligentées, dont la première portait sur la consommation dans le Cantal en 2022.
Cette dernière, conduite à l’échelle d’Auvergne-Rhône-Alpes (Aura) avec un focus départemental, a sondé 1 958 ménages cantaliens (sur 69 840 recensés) sur leur lieu d’achat d’un panel de 60 produits de consommation courante(1). Objectif : savoir qui achète quoi, où, comment et combien, pour évaluer le potentiel de consommation, les formes de distribution et commerces les plus fréquentés, la zone de chalandise des
commerces, les flux commerciaux : rétention, évasion, attraction.
Les Cantaliens ne boudent pas l’alimentaire
Premier enseignement : une érosion du chiffre d’affaires de l’activité commerciale dans le département, à hauteur de 2,7 % depuis 2018, soit 20 millions d’euros de moins pour un total de 782 M€ (1 % seulement de l’activité commerciale d’Aura). Érosion qui s’est accentuée depuis avec l’inflation galopante, comme en témoigne la baisse de 2,3 % des volumes consommés sur le mois d’avril 2024. “Et ça va s’amplifier au moins jusqu’à la fin d’année”, prévient Joseph Chauvet, reprenant les projections économiques de la Banque de France. Malgré cette hausse sévère des prix, l’alimentaire a réussi à tirer son épingle du jeu, avec une activité commerciale en hausse entre 2018 et 2024 (de l’ordre de 5 %), de même que le secteur du bricolage-jardinage qui a eu le vent en poupe au sortir du Covid. Tous les autres secteurs sont en retrait, marqué pour l’équipement de la maison, la culture et les loisirs. Sachant qu’au-delà du prix, les consommateurs opèrent de plus en plus d’arbitrages en termes écologiques, de santé...
Le potentiel de consommation des ménages est lui évalué à 864 M€, en hausse de 4 % depuis 2018, essentiellement sous l’effet de l’inflation, mais aussi d’une légère hausse du nombre de ménages dans le département (+ 730), malgré l’érosion démographique. Avec cependant une caractéristique pesant défavorablement sur la consommation : une population cantalienne bien plus âgée que la moyenne française et au niveau de revenu fiscal par ménage parmi les plus bas. L’indice de consommation des ménages y est de fait inférieur de 7 % à la moyenne tricolore. Plus de la moitié (53 %) des dépenses de consommation courante des Cantaliens reste fléchée sur l’alimentaire.
Le net ne cesse de gagner des parts de marchés
Et dans le paysage des acteurs commerciaux, Internet s’impose comme le format gagnant, avec un chiffre d’affaires de 89 M€ (+ 8 points/2018) réalisé par la vente en ligne et près d’un quart des dépenses non alimentaires ainsi absorbées. Le taux de pénétration du e-commerce dépasse désormais les 40 % pour les équipements TV-hifi-informatique, près de 30 % pour l’électroménager comme pour le prêt-à-porter, les chaussures, les jouets... Autres formats gagnants : les hard-discounters et supermarchés. Les grandes surfaces spécialisées, petits hypermarchés, drive et supérettes résistent, répondant à un besoin de proximité des consommateurs. Alors que les vastes hypermarchés accusent un fort recul dans le Cantal comme ailleurs.
Consommer... en responsabilité
Face à la puissance de frappe des géants de la vente en ligne, le combat pour les commerçants cantaliens, a fortiori ceux des centres-villes, est-il définitivement perdu ? Non, motive Joseph Chauvet, pour qui les commerces “physiques”, s’ils ne peuvent rivaliser par le prix, doivent “amener de l’humain, de la proximité”. Et le distributeur veut croire à une prise de conscience des consommateurs devant les Shein, Temu et autres fast-fashioners “qui exploitent les ressources minières et humaines. Lorsqu’il achète un bien, il faut que le consommateur fasse son choix en toute connaissance de cause”.
(1) Alimentation, équipement, mobilier, électroménager, bricolage, loisir, pharmacie, services...