Christophe Jardoux, FNSEA03 :Quel bilan après trois semaines de confinement ?
Voilà maintenant trois semaines que le pays est confiné. Je ne reviendrai pas sur la nécessité d’un tel dispositif pour endiguer cette pandémie.
Après la diffusion d’images et témoignages chocs d’autres pays touchés par ce virus, il me semble que les Français ont bien compris qu’il fallait suivre à la lettre cette stratégie. Pour nous les agriculteurs, pas de grands changements dans notre travail, on ne met pas la nature sur bouton pause. De plus, il est nécessaire de poursuivre notre activité pour, bien sûr, nourrir nos concitoyens. Après la frénésie des achats de la première semaine de confinement, la situation est en net recul. Cela se traduit parun ralentissement des abattages en bovins, un effondrement de la filière ovine (pas de fête de Pâques),une filière lait elle aussi impactée. Globalement, la fermeture de la restauration collective déstabilise en profondeur toutes les filières, à cela s’ajoute la crainte du contact des consommateurs qui concentrent leurs achats sur le pré-emballé et les conserves. On assiste à la fermeture des rayons de boucherie traditionnelle et à la coupe des supermarchés. En bref, ce sont les marchés les plus rémunérateurs qui sont impactés. Et de rajouter le comportement intolérable de la grande distribution,qui sous couvert de « sauvez l’agriculture française » pratique des tarifs toujours plus bas. Pour ce qui est des marchés de villages, le travail de notre syndicat et celui de la Chambre d’agriculture a permis la réouverture de certains, permettant ainsi une poursuite d’activité des producteurs. Remercions les maires et la préfecture pour cette décision. Notons aussi les démarches entreprises par la FNSEA03, et la Chambre d’agriculture pour obtenir des laissez-passer permanents de circulation pour les agriculteurs évitant ainsi une paperasse bien fastidieuse.
Avec la reprise des travaux des champs, les difficultés de logistique devraient fortement handicaper nos activités. Beaucoup de fournisseurs se plaignent des problèmes de livraisons. Bref, les soucis ne font que commencer. La durée du confinement est donnée jusqu’au 15 avril, mais pas besoin d’être devin pour comprendre que la sortie sera beaucoup plus longue. Il suffit d’observer ce qui se passe en Italie. Outre le bilan humain, que je souhaite le plus faible possible, il est évident que le bilan économique va être désastreux. Je ne sais pas dans quelle proportion nous serons touchés mais nous n’y échapperons pas. Même s’il est trop tôt pour faire le bilan de cette crise, on peut tout de même s’interroger. Quelle ironie de voir qu’il aura fallu cette pandémie pour s’apercevoir que les métiers essentiels au pays sont souvent ceux les plus mal rémunérés, que penser des choix stratégiques de notre pays de déléguer la production à des contrées lointaines et de s’apercevoir qu’en cas de problèmes, on se retrouve totalement dépourvus de médicaments, de masques… On pourrait transposer cela à notre agriculture, à qui l’on demande d’entretenir l’espace au détriment de la production. Si l’on est optimiste,certains diront qu’il y aura un avant et un après Coronavirus.
Nos dirigeants auront retenu la leçon et feront en sorte de remettre les priorités au bon endroit. Mais est-ce-que les Français sont prêts à cela ? Permettez-moi encore d’en douter ! Si nous sommes pessimistes, j’aurais tendance à penser que nos dirigeants ont la mémoire d’un poisson rouge. Après deux tours de bocal, ils auront tout oublié !! Et je dois dire que cette idée me tarabuste quand je regarde les mails de la DDT. Pendant que nous nous préparons à une année bien compliquée, notre administration préfère nous expliquer la bonne gestion des haies. Cherchez l’erreur, vraiment c’est désespérant ! En attendant, je vous souhaite à tous beaucoup de courage pour affronter ces épreuves et sachez que la FNSEA03 reste à votre service pendant cette période. J’en terminerai avec une attention toute particulière pour nos soignants.
CHRISTOPHE JARDOUX VICE-PRÉSIDENT DE LA FNSEA 03