Buron : des claies blanches contemporaines, pour se souvenir du travail des hommes
C’est avec l’idée de rendre hommage au travail des hommes de la montagne, aux vachers et buronniers qu’est né le projet d’une œuvre contemporaine qui sera inaugurée vendredi 10juin.
Ces claies-sculptures contemporaines sont en train d’être installées dans des prairies d’altitude, sur la commune de Pailherols. Cette œuvre contemporaine baptisée “Ma montagne” est composée d’un cheminement ponctué de 14 structures blanches et d’un parc de 2 hectares où seront implantées 24 autres. Soit un total de 38 structures métalliques, symbolisant le travail des vachers chargés notamment de ces “enclos mobiles”. Car il s’agit d’un hommage rendu à ces hommes qui ont habité la montagne, façonné le patrimoine et l’identité même du Cantal. “Depuis l’Antiquité, l’homme habite la montagne. C’est ainsi que sont nés des villages où l’activité était dense. Mais pas question d’enfermer ça dans un musée ou une œuvre passéiste”, justifie le comité qui a piloté ce programme(1).
Un jardin, un cheminement, un parc
Dès l’entrée du petit village, un espace livrera au visiteur des “codes de lecture”, une interprétation didactique. Cette première étape, dans ce lieu baptisé “Jardin de Marguerite”(2), présentera aussi les outils des buronniers. Selon que l’on puisse marcher ou non, les groupes de visiteurs pourtont ensuite se rendre sur le cheminement à travers les prairies ou directement à la parcelle où seront implantées ces claies, via une piste carrossable. Première révélation au public de la totalité de l’installation, vendredi 10 juin à 15 heures, lors d’une inauguration officielle. Déjà, en fin de semaine dernière, les principaux acteurs du projet étaient sur place pour une visite de l’ins- tallation. Jean-Paul Soubeyre, aussi attaché à l’agropastoralisme qu’il l’est à Pailherols, et Claude Prunet, maire de ce petit village perché à plus de 1 000 mètres, sont revenus sur la génèse de cet hommage artistique qui, évoqué pour la première fois en 2010, prend enfin forme. “Il nous fallait trouver une structure juridique. Nous avons pensé à créer une association, avant qu’on convienne que celle de Sauvegarde des burons s’y prêtait parfaitement.” Il ne leur a pas fallu longtemps pour convaincre son président, Marcel Besombes. Très vite, le cercle s’est élargi à d’autres connaissances, au rang desquelles le photographe Pierre Soissons, le restaurateur André Combourieu ou la directrice du Centre d’architecture d’urbanisme et de l’environnement, Marie-Françoise Christiaens.
Un projet qui recueille l’adhésion du ministère
Dès le début, la volonté et l’enthousiasme ne faisaient aucun doute. Mais rapidement s’est posée la question du financement. “Nous avions l’idée, mais pas le sou”, résume Marcel Besombes. C’est une rencontre avec Brigitte Liabeuf, conseillère pour les arts plastiques à la Drac Auvergne-Rhône-Alpes qui allait tout déclencher. Elle confirme : “Le projet correspondait parfaitement aux objectifs fixés par le ministère de la Culture et de la Communication : rendre accessible la création à tous les territoires.” Pour accompagner financièrement ce dossier, il a fallu le défendre à Paris, auprès d’une commission ad’hoc (voir en encadré). Parallèlement, la Fondation de France, représentée par Valérie Cudel, a été sollicitée, au titre des nouveaux commanditaires. “La Fondation venait de soutenir à Cransac en Aveyron une œuvre à la mémoire de l’industrie minière. J’ai observé que beaucoup de projets concernaient la mémoire ouvrière et qu’il y avait bien peu pour l’agriculture”, remarque Brigitte Liabeuf, dont la petite phrase a fait mouche... Il est revenu à ce tandem féminin de suggérer des artistes. Camille Henrot s’est vite imposée. L’artiste a en effet beaucoup travaillé sur l’antropologie, l’ethnologie, la collecte de patrimoine immatériel (la parole, la mémoire, etc.). En 2011 et 2012, elle est venue en immersion dans le territoire à plusieurs reprises, allant sans crainte à la rencontre des troupeaux d’estive, interrogeant quelque 40 anciens buronniers, étonnés de son intérêt et souvent très émus. De ces entretiens est née l’idée des claies, symbole de l’itinérance, et du titre “Ma montagne”, qui témoigne de l’attachement des hommes à ces terres. La claie-sculpture prend parfois la forme d’une lettre de l’alphabet. Toujours blanches immaculées, elles disparaissent sous la neige des paysages hivernaux pour mieux réapparaître le printemps revenu. Quasiment poétique.
(1) L’idée revient à Jean-Paul Soubeyre, le projet est porté par l’association de sauvegarde des burons du Cantal, la réalisation se fait en partenariat avec la commune de Pailherols, le Département et la Drac. (2) Il s’agit de l’ancien potager de Marguerite, la mère du restaurateur de l’Auberge des Montagnes, André Combourieu.
Plus d'infos à lire cette semaine dans L'Union du Cantal.
Droits de reproduction et de diffusion réservés.