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Yves Guyon expérimente l’autoconsommation électrique

À Saint-Yvi dans le Finistère, Yves Guyon a installé deux centrales photovoltaïques de 9 et 21 kWc qui alimentent en électricité ses 2200 m2 de bâtiments d’élevage de poulet lourd sexé.

Avec son esprit touche-à-tout, Yves Guyon n’est pas tout à fait un éleveur de poulets comme les autres. « J’ai commencé par mettre au point des systèmes pour mon usage personnel, que j’ai ensuite proposé à d’autres éleveurs », précise-t-il. En plus d’exploiter deux sites totalisant 4200 m2 (dont 2200 m2 à Saint-Yvi), il conçoit et commercialise des équipements de brumisation pour l’élevage et l’industrie (abattement d’odeurs, de poussières…). Et depuis une dizaine d’années, la vente et l’installation d’équipements photovoltaïque (et éolien) est devenue sa troisième activité. Mi 2016, il a profité de la rénovation complète d’un poulailler de 1000 m2 (seules les fermes en bois ont été conservées) pour se lancer dans la conception d’un bâtiment alimenté par de l’électricité photovoltaïque. L’isolation a été renforcée pour limiter la facture énergétique et il s’est équipé de ventilateurs économes. L’éleveur expérimentateur a dimensionné l’installation empiriquement. « Je suis parti du principe qu’il fallait que 80-90 % de l’électricité soit autoconsommée par les moteurs ou par l’éclairage ou alors stockée sous forme d’eau chaude qui alimente un plancher chauffant. Et pour y parvenir, j’estime que la puissance installée doit correspondre au tiers de la consommation électrique. » Avec l’atelier et les bureaux chauffés à l’électrique, le site consomme environ 60 000 kW heure par an, dont 40 à 45 000 kWh pour les 2200 m2 de poulaillers.

Stocker de l’eau chaude pour le chauffage

Le poulailler produit de l’énergie de deux manières. Six panneaux solaires mixtes thermique-photovoltaïque (6 kW de puissance thermique) sont posés sur le magasin côté sud. Ils sont reliés à un ballon d’eau de 1,5 kW. Six autres panneaux photovoltaïques sont placés à côté des précédents, et complétés par 24 panneaux sur le toit ouest du poulailler, le tout d’une capacité de 9 kWc. « L’orientation ouest permet de produire sur une plus grande plage horaire, souligne Yves Guyon, d’autant que la pente de toit est faible. » Ces trente panneaux sont reliés au circuit électrique général et à un autre ballon de 4,5 kW. Grâce à l’automate de gestion mis au point par sa société, l’eau chaude solaire thermique et photovoltaïque stockée peut être envoyée dans un troisième ballon de mélange alimenté par une chaudière à gaz (70 kW). L’eau réchauffée à moins de 40° C circule dans 4,5 km de tuyaux insérés dans la dalle béton isolée. L’an dernier, Yves a aussi monté une installation de 21 kWc sur le toit d’un atelier orienté est-ouest (pour étaler le pic journalier), qui est en marche depuis octobre 2017. Il a abandonné le projet d’éolienne qui devait couvrir l’autoconsommation de nuit. « Excepté avec les très grosses machines, l’éolien est beaucoup moins rentable que des panneaux. »

Un système énergétique appelé à évoluer

Le retour sur investissement varie selon le dispositif. Plus complexe à mettre en œuvre, l’installation mixte a coûté de l’ordre de 20 000 euros, avec un temps de retour qu’il estime entre 10 et 11 ans. Alors qu’avec celle de 21 kWc (23 000 euros investis), il évalue le retour à 8 ans. « Mon système mixte est certainement à améliorer. Les panneaux thermiques offrent moins de souplesse que les photovoltaïques. Pour profiter des calories produites, il faudrait utiliser l’eau chaude au fur et à mesure de sa production, ce qui n’est pas toujours possible par manque de demande du chauffage. » L’an dernier, ses 9 kWc ont produit 8900 kWh et les 21 kWc démarrés en octobre 2380 kWh. Tout a été autoconsommé ou valorisé en calories. Cette année, les 30 kWc devraient produire 30 à 33 000 kWh et tout ne pourra être autoconsommé faute de stockage suffisant. L’excédent sera revendu à 6 centimes le kWh. Yves Guyon espère bien que cette situation sera temporaire. Il est persuadé que des technologies de stockage seront assez vite accessibles à des prix compétitifs (telles que des batteries développées pour l’automobile électrique) ou verront le jour (production d’hydrogène à partir d’eau). Il pourra alors valoriser toute sa production.

 

Un scénario à étudier de près

Yves Guyon a souscrit un contrat avec EDF au tarif bleu réglementé (option heures creuses et 36 kVA). En 2017, le KWh acheté lui a coûté 12,4 centimes hors TVA en incluant les diverses taxes et l’abonnement (et 8,36 centimes sans). Ce niveau mérite de se poser la question de produire pour son compte. « La plupart des aviculteurs ayant un bâtiment dynamique de 1200 m2 pourraient avoir intérêt à s’équiper d’une installation de petite puissance, indépendante du réseau. » Il évalue le coût d’une installation de 9 kWc à environ 10 000 euros (prime d’autoconsommation comprise) pour une production annuelle moyenne de 10 000 kWh. Avec une valorisation du kWh à 12,4 centimes, le retour sur investissement se situerait entre 8 et 9 ans. « Cette solution pourrait aussi permettre à certains éleveurs de rester avec un tarif bleu, s’ils sont à la limite. » Car avec le nouveau compteur Linky, les dépassements de puissance ne sont plus tolérés. En détaillant sa facture, Yves Guyon a été très surpris par la hausse de 16 % du Kwh des heures pleines (passé de 8,39 à 9,74 c). Ce bond inattendu le conforte dans sa recherche d’autonomie. « Plus le tarif d’achat va augmenter et plus l’autoconsommation sera rapidement rentable. »

P. L. D.

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