« Nous épandons 10 000 mètres cubes de digestat par an avec une tonne de 11 000 litres »
Plutôt que d’investir dans une grosse tonne à lisier pour assurer le transport et l’épandage du digestat, les associés de l’unité de méthanisation Méthano, dans la Creuse, ont préféré décomposer les chantiers. Ils utilisent exclusivement au champ une petite tonne avec rampe à pendillards, qu’ils alimentent à partir d’un caisson rempli avec une citerne dédiée au transport.
Plutôt que d’investir dans une grosse tonne à lisier pour assurer le transport et l’épandage du digestat, les associés de l’unité de méthanisation Méthano, dans la Creuse, ont préféré décomposer les chantiers. Ils utilisent exclusivement au champ une petite tonne avec rampe à pendillards, qu’ils alimentent à partir d’un caisson rempli avec une citerne dédiée au transport.
« Lors de la mise en route de l’unité de méthanisation, en 2019, nous projetions, pour l’épandage du digestat, d’acheter une grosse tonne à lisier et de l’atteler à un tracteur de forte puissance. Mais à l’époque, nous avions constaté que plusieurs machines de ce type étaient disponibles sur le marché de l’occasion dans notre région. En échangeant avec les vendeurs, nous nous sommes rendu compte qu’un tel ensemble se serait avéré incompatible avec notre parcellaire et notre réseau routier », se rappelle Patrice Migaire, un des associés de Méthano. Cette structure en cogénération, située à Noth dans la Creuse, est installée à proximité d’un centre de réadaptation et rééducation fonctionnelles, ainsi que d’un château avec hôtel trois étoiles. Son activité doit donc se fondre au maximum dans la nature, comme en atteste l’insertion paysagère du site, entouré de plantations. De plus, les routes étroites et sinueuses, parfois à fort dénivelé, se révèlent peu adaptées à la circulation de grosses tonnes à lisier. Également, les parcelles vallonnées auraient imposé d’investir dans un tracteur très puissant, donc très cher.
Deux tonnes et un caisson sur le chantier
Conscients également qu’un gros ensemble aurait passé plus de temps sur la route qu’au champ, les associés décident alors de changer leur fusil d’épaule. Ils s’orientent vers le chantier décomposé et investissent dans une tonne à lisier Joskin de 11 000 litres équipée d’une rampe à pendillards de 12 mètres, d’une citerne Mauguin Citagri de 18 000 litres dédiée au transport et d’un caisson mobile Agroland de 72 000 litres. « Nous avons également acheté d’occasion un tracteur JCB Fastrac 4220 de 235 chevaux pour assurer le transfert du digestat », indique Patrice Migaire. Pour définir la capacité de la tonne dédiée à l’épandage, les éleveurs se sont appuyés sur leur expérience, car certains utilisaient déjà une tonne de 10 000 litres et se retrouvaient parfois limites dans les parcelles les plus pentues.
Les sols respectés et les routes propres
Durant les chantiers d’épandage, Arthur Gay, le salarié de Méthano, est exclusivement affecté au transport du digestat. Avec la citerne de 18 000 litres remplie, l’ensemble affiche un poids total roulant de 36,5 tonnes et respecte ainsi la réglementation routière en termes de PTRA. « Avec le Fastrac, je mets de 15 à 45 minutes par tour, selon la distance entre le site de Méthano et le lieu d’épandage, les parcelles fertilisées se trouvant dans un rayon de 10 kilomètres. Le JCB entièrement suspendu se révèle idéal pour les trajets routiers et ses quatre roues directrices permettent de rentrer partout », apprécie le chauffeur. Pour davantage de confort, une télécommande permet au conducteur d’ouvrir, sans quitter la cabine, la vanne du cône de reprise situé près de la fosse de stockage. Au champ, la vidange s’effectue via le bras de pompage frontal, qui refoule par le cône d’aspiration, afin de mélanger l’effluent dans le caisson. « Nous positionnons autant que possible le caisson tampon au plus près de la barrière, afin d’éviter de circuler dans la parcelle avec la tonne de transfert, car elle est équipée de pneus typés routiers et bien gonflés, précise Arthur Gay. D’une part, cela évite d’abîmer le sol. D’autre part, cela permet de ne pas ramener de terre sur la route. » Le chauffeur reconnaît que l’idéal serait de disposer d’un bras tourelle, qui permettrait de vider dans le caisson directement depuis la route. Avec le JCB, il assure également l’alimentation de l’unité de méthanisation en fumier frais et lisier. Il réalise ainsi 650 heures par an sur la route.
Un épandage sans interruption
La tonne à lisier Joskin est chaussée de gros pneumatiques (800/65 R32) gonflés à faible pression, qui la rendent facile à tracter et présentent l’avantage de limiter les tassements du sol. Les agriculteurs ont à charge d’y atteler leur tracteur et d’en assurer la conduite lors de l’épandage sur leurs terres. La puissance du tracteur utilisé varie de 130 à 190 chevaux selon les exploitations. « Dans les parcelles les plus pentues, le 190 chevaux n’est parfois pas de trop », reconnaît Patrice Migaire.
L’épandage des 10 000 mètres cubes de digestat se concentre sur deux périodes : la première moitié de début mars à mi-juin, et la seconde de début septembre à mi-novembre. La petite tonne à lisier équipée de la rampe à pendillards réalise de 900 à 1 000 remplissages par an. Le débit de chantier s’avère correct : « En travaillant à proximité de la fosse, nous arrivons à épandre entre 400 et 500 mètres cubes en 12 heures. Les plus grosses journées, je parcours plus de 200 kilomètres sur les petites routes avec le Fastrac pour ravitailler le caisson », indique Arthur Gay. La présence de parcellaires groupés est aussi un avantage. « Nous avons par exemple un îlot de 20 hectares qui est fertilisé sans bouger le caisson », illustre-t-il.
L’unité de méthanisation Méthano en chiffres
3 Gaec associés
770 ha cumulés de SAU
220 kW de capacité de production électrique
10 000 m3 de digestat épandus par an
500 m3 épandus par jour maxi
La chaleur de la cogénération valorisée par le centre de réadaptation et rééducation
Située à Noth dans la Creuse, l’unité de méthanisation Méthano a été créée en 2019 par trois exploitations agricoles : le Gaec de la Cazine (vaches laitières), le Gaec Dissoubray Migaire (élevage de porcs et vaches allaitantes) et le Gaec du Serrier (vaches allaitantes). Cette structure en cogénération affiche une capacité de production d’électricité de 220 kW en contrat avec EDF. La chaleur dégagée par le circuit de refroidissement du moteur thermique est valorisée par le centre de réadaptation et rééducation fonctionnelles André Lalande de Noth, distant de 200 mètres du site. Cette unité de méthanisation, qui produit 10 000 mètres cubes de digestat par an, utilise les Cive(1) produites sur les trois exploitations, leurs lisiers de vaches laitières et de porcs, ainsi que leurs fumiers. Elle collecte également les effluents de la coopérative des éleveurs de la Marche (Celmar), à La Souterraine dans la Creuse. Elle récupère aussi les tontes des pelouses de la ville de Guéret. « Le digestat est épandu sans être traité par un séparateur de phase. Il présente l’avantage d’être quasi inodore, ce qui limite considérablement les nuisances lors de l’épandage », souligne Patrice Migaire, associé de Méthano, éleveur de porcs et de vaches allaitantes.