" Nous cherchons à maximiser la valorisation de notre canard à foie gras "
Orientée à 100 % vers la vente directe, La Ferme de la patte d’oie (Gers) mise sur la pluriactivité et cherche à maximiser la valorisation du canard à foie gras, en développant des activités complémentaires autour de cette unique production.
Orientée à 100 % vers la vente directe, La Ferme de la patte d’oie (Gers) mise sur la pluriactivité et cherche à maximiser la valorisation du canard à foie gras, en développant des activités complémentaires autour de cette unique production.

À Saint-Michel dans le Gers, Marie-Laure (54 ans), ses frères jumeaux Pierre et Philippe (58 ans), ainsi que Maxime (34 ans) le fils de Pierre, élèvent 50 000 canards par an. Ils en gavent 18 000 qu’ils abattent, transforment et commercialisent intégralement.
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La famille Pérès exploite aussi 153 hectares dont 135 en maïs, soja, blé et tournesol (une année sur deux). Les bâtiments, les parcs de leurs canards gras et un méthaniseur collectif occupent les 18 hectares restants. L’arrivée de Maxime sur la ferme, en 2021, a permis un agrandissement de 36 hectares, financé par une SCI familiale.
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Prenant la suite de Georgette et Robert à la fin des années 1980, leurs enfants ont considérablement développé et diversifier l’exploitation gersoise de 36 hectares à l’époque, qui pratiquait le gavage de canards et d’oies vendus traditionnellement sur les marchés locaux.
Philippe explique comment cette petite ferme familiale est devenue une structure agricole et alimentaire générant une vingtaine d’emplois, à travers plusieurs métiers, du caneton jusqu’aux produits prêts à consommer.
Produire l’aliment à la ferme
La première pierre angulaire est de maîtriser sa production de foie gras en contrôlant un maximum de paramètres économiques. Presque tout est fait maison, hormis les canetons d’un jour et leur aliment des quinze premiers jours. La crise aviaire a sensibilisé à un approvisionnement géographique diversifié. « Les canetons proviennent des Landes (Latry), du Gers (Canibride, Mulor) et de Vendée », précise Philippe Pérès.
« Ce qui permet à la ferme, constituée en SCEA, de maîtriser son coût de revient, c’est notamment l’autoproduction de céréales et d’oléagineux et la fabrication d’aliment à la ferme », explique Sandrine Thurios leur conseillère agricole d’Exco Fiduciaire sud-ouest, réseau AgirAgri.

Depuis quinze ans, ils cultivent du soja, qu’ils cuisent eux-mêmes à l’aide d’un système mobile détenu en Cuma. « Tous les deux à trois mois, on toaste 40 tonnes. Depuis qu’on produit notre propre soja, nous n’avons plus besoin d’argile, la santé des canards s’est améliorée », constate Philippe.
Leur autonomie en matière de litière s’est cependant amoindrie ces dernières années. « Depuis la claustration obligatoire en période de grippe aviaire, il nous manque 50 hectares de blé pour assurer notre autosuffisance en paille », regrette-t-il.
Investir collectivement avec des agriculteurs

Pour réduire ses coûts d’investissements, la ferme a joué la carte du collectif avec plusieurs engagements coopératifs. Depuis 1989, l’outil de transformation était déjà en Cuma, avec quinze éleveurs de canards.
En 2021, l’agrandissement de la conserverie (2 millions d’euros d’investissement subventionné à 40 %) les a obligés à s’ouvrir à d’autres éleveurs de poulets, porcs et agneaux, suite à la cessation d’activité d’adhérents. Aujourd’hui, la ferme utilise la conserverie trois jours par semaine, les autres éleveurs jours jours. 400 canards et 1 000 poulets bio y sont abattus et transformés chaque semaine.
Valoriser tout du canard
Les 18 000 canards sous IGP Gers, gavés et transformés par la SCEA de la Patte d’oie sont vendus chaque année à la société de commercialisation, sous statut SARL. Les activités de production et de vente ont été séparées pour des raisons juridiques et commerciales (1).
« Tous produits confondus, la Sarl Famille Pérès les achète 43 euros par canard gras, résume Pierre Pérès. Ils sont écoulés en vente directe au magasin à la ferme, mais surtout sur quarante salons aux quatre coins de la France. »

La famille est bien rodée et programme d’une année sur l’autre sa présence sur des foires, salons gastronomiques et marchés de Noël, dans des régions où la concurrence est moins dure : Bretagne, Hauts-de-France, Centre-Val de Loire, Vallée du Rhône, Côte d’Azur…
La gamme, riche d’une quarantaine de références, cible plusieurs occasions de consommation : classiques et festives comme les foies gras et magrets, mais aussi plus quotidiennes. Les bas morceaux (cœurs, gésiers, manchons, carcasses) sont valorisés en fritons (25,50 euros HT le kilo), rillettes (30,20 euros HT le kilo), cous farcis (38,85 euros HT le kilo) ainsi qu’en plats cuisinés : bolognaise (18,60 euros HT le kilo), axoa (17,10 euros le kilo)…
Rationaliser la main-d’œuvre
L’entreprise salarie 16,4 équivalents temps plein, hors associés, chaque structure ayant ses propres salariés. Certains salariés ne font que du gavage ou que de la conserverie. D’autres sont polyvalents, car la moitié d’entre eux est employée par le groupement d’employeurs réunissant la SCEA d’élevage, la SARL de commercialisation et la SAS de méthanisation. Les conditions de travail à la conserverie par 12°C étant difficiles, la polyvalence permet de gérer plus facilement une grossesse, un temps partiel, la lassitude.
« La plupart de nos salariés aiment bien participer à la commercialisation, ils peuvent ainsi voir la finalité de leur travail », constate Marie-Laure Pérès, en charge de l’administratif et la comptabilité. Ils sont affectés dans l’une ou l’autre des structures, selon les jours, les saisons et la charge de travail. La charge administrative et organisationnelle a ainsi été réduite. « Le risque d’infraction au Code du travail est aussi réduit », affirme Marie-Laure Pérès. Il faut dire que la gestion des ressources humaines est devenue un enjeu aussi important pour l’entreprise que l’approvisionnement en canards engraissés.
Une mécanique commerciale bien huilée
La majorité des ventes de produits transformés est réalisée sur les salons et foires, ainsi que sur les trajets. Certaines semaines de fin d’année, la famille Pérès est simultanément présente sur quatre foires.

Pour maximiser l’impact commercial des déplacements, les Pérès ont mis au point un plan d’action. Plusieurs jours avant un départ, les clients proches de la foire sont personnellement avisés, ainsi que ceux qui se trouvent sur le trajet. Tous sont invités à commander sur le site Ferme de la patte d’oie pour économiser des frais de livraison.
En chemin, le camion frigorifique va s’arrêter à des points relais. Cette livraison, par un salarié ou un associé, maintient le lien humain et personnifié. Cette méthode nécessite d’avoir un fichier clients bien renseigné et à jour (9 000 adresses), avec une politique commerciale ciblée.
Pour entretenir le lien, Marie-Laure Pérès envoyait depuis vingt ans, les « Cancans de la ferme », un petit journal avec des nouvelles, une recette, des promotions, les dates des salons, foires… Depuis 2024, il a été remplacé par une newsletter envoyée à 90 % des clients, 10 % voulant rester à la version papier.