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« Mon temps de travail a orienté mes productions avicoles»

Une réflexion sur le temps de travail à l’aide de l’appli Aptimiz a amené Jérémy Fillon à passer tous ses poulaillers en bande unique, à arrêter la dinde au profit du poulet lourd et à déléguer le lavage.

Installé depuis dix ans à Lanouée dans le Morbihan, Jérémy Fillon exploite seul 5 500 m2 de poulaillers de chair et 32 hectares de terres agricoles. Autant dire que la gestion du temps est pour lui un paramètre essentiel. Si bien qu’en 2019, lorsqu’un conseiller agricole lui propose de tester la nouvelle application de mesure du temps de travail Aptimiz, l’éleveur accepte d’emblée. « Je souhaitais connaître plus précisément le temps passé sur chaque atelier et chaque poulailler pour mieux évaluer leur rentabilité horaire. »

 

 
Jérémy Fillon, éleveur de poulet lourd à Lanouée : « Mesurer mon temps de travail m’a permis d’évaluer la rentabilité horaire des bâtiments de dinde et de poulet ...
Jérémy Fillon, éleveur de poulet lourd à Lanouée : « Mesurer mon temps de travail m’a permis d’évaluer la rentabilité horaire des bâtiments de dinde et de poulet et d’optimiser mon système de production. » © A. Puybasset

 

Le bilan du nombre d’heures et de la répartition du temps de travail a aidé Jérémy à mûrir sa réflexion sur son organisation du travail et sur les choix stratégiques de l’exploitation, en particulier pour l’atelier volaille. La première décision a été de faire appel à un prestataire de lavage des poulaillers, afin de réduire la charge de travail durant la phase de vide. Puis rapidement, l’éleveur a décidé de spécialiser tous ses bâtiments en poulet lourd et de les conduire en bande unique.

Une rentabilité horaire plus élevée en poulet

Jusqu’à présent, il disposait d’un site en poulet lourd (deux bâtiments de 1 000 m2 en dynamique) et d’un second dédié à la dinde et conduit en Brood and Move avec une poussinière de 1 000 m2 et deux bâtiments statiques Louisiane de 1 250 m2 dédiés à l’engraissement. Ces derniers, conçus en 2017, comprenaient également un jardin d’hiver de 280 m2. Malgré l’intérêt de cette technique d’élevage de dinde, la rentabilité horaire n’était pas au rendez-vous par rapport aux autres poulaillers en poulet lourd. « Je consacrais trop de temps au repaillage (trente fois par lot à raison 1,5 heure par chacun des deux Louisiane), au transfert des dindonneaux et lors du vide des bâtiments. » Jérémy a fait le calcul. « Nous passons deux fois moins de temps à curer les deux bâtiments de 1 250 men poulet, car j’ai moins de fumier à évacuer (35 tonnes pour un bâtiment de 1 250 m2) qu’en dinde (135 tonnes). Il faut une journée à deux personnes pour les deux bâtiments contre deux journées à trois personnes en dinde. » Les bâtiments sont aussi plus faciles à laver car ils sont moins encrassés avec moins de petits matériels à nettoyer et déplacer (barrières, colerettes…). « Un bâtiment est lavé et désinfecté en une journée au lieu de deux auparavant. »

 

 
Le curage des bâtiments en dinde était chronophage, du fait des nombreux repaillages.
Le curage des bâtiments en dinde était chronophage, du fait des nombreux repaillages. © J. Fillon

 

5 500 m2 gérés en bande unique

Le gain de temps est aussi lié au passage des cinq poulaillers en bande unique. Certes, la rotation est plus rapide en poulet qu’en dinde mais les bâtiments Louisiane sont désormais vidés en même temps que les poulaillers de l’autre site (et non plus en décalé). Cela réduit de 9 à 6 la fréquence des vides sur l’année, ceux-ci représentant la plus grosse charge de travail. Tout a été réfléchi pour réduire ces pics de travail, durant lesquels Jérémy est ponctuellement aidé par son père et son ancien salarié. « La mise en place des cinq bâtiments est répartie sur une semaine. Il se passe au maximum dix à douze jours entre le moment où tous les bâtiments sont vides et l’arrivée des poussins. » Pour un poulailler de 1 000 m2, l’éleveur compte une journée pour le curage, une journée de lavage par un prestataire (plus deux heures de finition pour lui-même) et une demi-journée pour la remise en route du bâtiment (chauffage, litière…).

 

 
Les bâtiments Louisiane sont désormais spécialisés en poulet lourd, en bande unique avec les autres poulaillers.
Les bâtiments Louisiane sont désormais spécialisés en poulet lourd, en bande unique avec les autres poulaillers. © J. Fillon
« Tout doit être simplifié et rationalisé. Il faut aussi être bien équipé pour faciliter le lavage (pompes de lavage supplémentaire, télescopiques, sol béton, pipettes…). Cela a un coût mais c’est important pour gagner en efficacité tout en réduisant la pénibilité mais aussi la charge mentale. » De même, Jérémy est équipé depuis 2015 de la machine pneumatique Mécapulse de Dussau, qu’il utilise à la fois pour le primopaillage (3,5 kg de cosse de sarrasin, épandage en une heure par bâtiment) et les repaillages. Leur fréquence a fortement baissé depuis le passage en poulet des bâtiments Louisiane (densité de 17 têtes par mètre carré). Il réalise désormais entre 1 et 4 repaillages (1 heure par bâtiment, toujours à base de cosses) lui permettant de maintenir une bonne qualité de litière et d’obtenir systématiquement les primes pododermatites.

 

Jérémy estime aussi avoir gagné un peu de temps sur la surveillance du lot (plus facile une fois le lot bien démarré, moins de soucis sanitaires) mais aussi sur la partie administrative du fait de la bande unique (factures et commandes regroupées…).

Le marché de la dinde en décroissance a aussi joué dans sa décision. « Pour tenir économiquement en volaille, il faut faire le plus de tonnage possible, poursuit-il. Mon objectif en poulet lourd sexé est aujourd’hui d’atteindre 52 kg/m2/lot avec une marge poussin aliment d’au moins 12,50 euros. Un niveau nécessaire pour payer les charges en hausse (notamment celles de l’énergie), sans oublier d’intégrer la main-d’œuvre de l’exploitant. Cela pousse à être réactif et à optimiser en permanence son système d’exploitation, sans attendre 'd’être dans le rouge'. »

En parallèle, Jérémy, a démarré en 2021 un atelier de 250 places de porc en engraissement et développe une activité de vente directe à la ferme. Il a simplifié l’itinéraire technique des cultures en généralisant le semi-direct sous couvert. Il a aussi investi en 2020 dans une station de compostage et commercialise son compost. Son objectif à moyen terme est d’embaucher un salarié à temps plein ou un associé pour l’atelier volailles.

Le saviez-vous ?

L’application Aptimiz s’installe sur un smartphone. Une fois renseignées les coordonnées GPS des lieux de travail (atelier, poulaillers…), elle enregistre et localise automatiquement chaque heure travaillée.

Des essais pour limiter le temps et le coût du paillage

Depuis quelques semaines, Jérémy Fillon teste le scarificateur électrique Approdis pour l’entretien de la litière. En ciblant son passage sur les zones humides, il espère gagner encore plus de temps et économiser un ou deux repaillages par lot. L’éleveur a estimé à 225 euros le coût de chaque repaillage pour 5 500 m2, en comptant le temps passé, le matériau de litière (cosse), le fioul et l’entretien et l’amortissement de la pailleuse. Il a déjà prévu d’ajouter sur le scarificateur, une plateforme pour entreposer les seaux et du petit matériel. Très bricoleur et imaginatif, l’éleveur est en train d’adapter plusieurs équipements pour gagner en temps et en confort de travail : un caisson pour le déchargement des poussins, une centrale de lavage mobile sur une remorque de voiture ou un ancien épandeur de chaux pour le primopaillage. Il ne reste plus qu’à trouver du temps pour les finaliser !

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