Aller au contenu principal

L’œuf bio de la fourche à la fourchette

En côtes d’Armor, Denis Paturel a été un des moteurs du développement d’une production d’œufs structurée en filière, de la production des matières premières jusqu’à l’œuf conditionné et prêt à livrer.

Denis Paturel
© P. Le Douarin

Rien ne prédisposait particulièrement le costarmoricain Denis Paturel à faire une grande partie de sa carrière dans la production et la commercialisation des œufs bios. « A vingt ans, je voulais être inséminateur, mais à vingt ans mon chemin a bifurqué vers le métier de l’approvisionnement des agriculteurs en produits fertilisants et phytosanitaires », se remémore-t-il. Car avant d’être Bio, Denis a été un promoteur de l’agriculture conventionnelle, pure et dure, comme salarié dans une coopérative durant dix-huit ans. Sa lente évolution vers le Bio a commencé par un poulailler de 5000 pondeuses conventionnelles en plein air construit par son épouse Sylvie en 1987, à Pludual en Côtes d’Armor. « C’était les débuts de ce mode d’élevage et les premières années nous avons essuyé les plâtres, techniquement e économiquement. » C’est pour gagner mieux sa vie, et interpellé par la réussite de voisins agriculteurs en légumes Bio, que le couple décide de sauter le pas du Bio, en 1993 avec les poules et en 1994 avec les 13 ha de terres. « J’étais aussi un peu gêné aux entournures, car je me rendais compte des effets négatifs des produits dont je faisais la promotion. » C’est donc sans regret, et peut être avec un certain soulagement, qu’il quitte la coop en 1998. Mais il faut bien vivre et gagner sa croûte. Après que son épouse ait construit en 1997 un second poulailler de 6000 poules sur un second site, Denis crée la société Agrobio Europe en 1998, en partenariat avec le centre de conditionnement Trégor œufs de Tréglamus (22), près de Guingamp. Le centre apportait l’essentiel du capital et le débouché des œufs, Denis son expertise de la production d’œufs bio et celle de l’organisation de la production végétale acquise à la coopérative.

 

Le pied dans l’appro Bio puis la main dans le commerce

 

 « Nous avons réussi à convaincre des agriculteurs de se lancer en œuf Bio et à convertir leurs terres pour produire les céréales et des protéagineux destinés aux poules. Les fientes étaient aussi réutilisées sur les terres bio, résume Denis. C’était un modèle qui sécurisait les producteurs. Nous organisions les mises en culture et la production d’œufs avec le suivi technique et nous faisions en sorte d’ajuster l’offre et la demande. » Seul l’aliment était fabriqué à façon. Le concept convainc rapidement et en 2000, Agro Bio Europe investit dans une capacité de stockage de 5000 tonnes. Denis Paturel a été un des artisans du début de la structuration de filières longues Bio spécialisées en œuf. « Par la suite, le modèle a changé d’échelle avec l’implication des grands opérateurs coopératifs bretons » souligne -il. En effet, Agribio Europe avait un talon d’Achille, celui d’avoir un seul débouché pour le commerce de ses œufs. En 2006, le centre de conditionnement rencontre des difficultés, il change de capital et finit par être liquidé en septembre 2007. « Début 2007, le repreneur m’apprend que j’ai un an pour trouver de nouveaux débouchés », relate Denis Paturel. « Après avoir été salarié, éleveur et technicien-organisateur, il a fallu que j’apprenne vite le métier de commercial pour sauver la trentaine d’éleveurs qui m’avaient confiance. C’était ma responsabilité. » Il réussit à trouver des débouchés et à rétablir une situation saine et stable, mais la dynamique ne sera plus jamais la même. A la suite de l’arrêt du centre de conditionnement, Agribio Europe change aussi d’actionnaire majoritaire à partir de 2010. « J’étais toujours à l’opérationnel, mais je n’étais plus le maitre du jeu » relève Denis Paturel. En 2016, il quitte Agribio Europe sans regret, comme il s’y était engagé cinq ans auparavant. Aujourd’hui, il termine sa carrière en conseillant les éleveurs et les entreprises dans leur transition vers l’agriculture biologique. Il reste associé avec son fils Jérémy qui a repris l’exploitation des 12000 poules. Reconnu pour son expertise globale de la filière, Denis Paturel siège à l’Inao et au comité national de l’agriculture biologique (Cnab) comme « personnalité qualifiée » ; il représente le secteur œuf à la commission Bio du syndicat national des labels avicoles (Synalaf) ; il siège à la confédération française de l’aviculture (CFA) et à l’interprofession des œufs (CNPO). Enfin, depuis début 2019 il est le nouveau président d’Inter Bio Bretagne, la plateforme d’entreprises et acteurs bretons qui contribue au développement et la promotion de l’agriculture et des produits biologiques. Des postes qui le passionnent mais il compte bien passer le relais d’ici trois ans. « Place aux jeunes, mais ils ne sont pas légion. Nos métiers manquent d’éleveurs qui s’engagent… »

Les plus lus

<em class="placeholder">Pauline Van Maele et Aurélien Lerat : « La viabilité de notre projet d&#039;installation à deux reposait sur le maintien de l’élevage sur l’exploitation avec deux ...</em>
« Le poulet a rendu viable notre projet d’installation »

Dans l’Aisne, Pauline et son frère Aurélien Lerat ont repris l’exploitation familiale de grandes cultures en réinvestissant…

<em class="placeholder">Accessible par un unique chemin, l’entrée du site d’élevage de Nicolas Verdier est délimitée par une clôture grillagée avec un portail électrique et un grand sas ...</em>
Une biosécurité renforcée pour un site de deux poulaillers de chair neufs

Nicolas Verdier s'est installé à Mansigné dans la Sarthe avec un site de deux poulaillers neufs de 1 800 m2 équipé d'un…

<em class="placeholder">GŽraldine Mazerolle et ses poulets Label rouge de 15 jours</em>
« Nous avons renforcé l'exploitation bovine et de poules pondeuses avec deux bâtiments label »

Pour générer un revenu complémentaire et vivre à deux sur l’exploitation dans l'Allier, Géraldine et Julien Mazerolle se sont…

<em class="placeholder">Nicolas Verdier lors de la porte ouverte : « Mon site de deux bâtiments de 1 800 m2 répond à mes attentes en termes de revenu et de temps de travail.»</em>
« Je vis bien avec mon site de volailles de chair neuf de 3 600 m2 »

Nicolas Verdier s’est installé seul avec deux poulaillers de chair neufs. Grâce à des performances technico-économiques…

<em class="placeholder">Bruno Mousset travaille depuis vingt-cinq ans dans le groupe LDC et pilote le pôle Amont depuis 2020. Auparavant, il a dirigé la société Lœuf (2011-2019), a été ...</em>
« Il nous faut des éleveurs de volailles pour nos sites LDC »

La consommation de volaille a le vent en poupe et particulièrement le poulet. Pour rester dans l’assiette des consommateurs…

<em class="placeholder">Simple ou sophistiquée, la chaudière à biomasse est une bonne solution technique pour réduire la consommation de gaz, mais attention à sa rentabilité.</em>
Comment réduire les émissions de gaz à effet de serre en volailles

Bien que peu émettrices de gaz à effet de serre (GES), les filières avicoles vont participer à l’effort collectif de réduction…

Publicité
Titre
je m'abonne
Body
A partir de 96€/an
Liste à puce
Version numérique de la revue Réussir Volailles
2 ans d'archives numériques
Accès à l’intégralité du site
Newsletter Volailles
Newsletter COT’Hebdo Volailles (tendances et cotations de la semaine)