Les dommages du bréchet sous-estimés en poule pondeuse
Évaluer et comprendre l’origine des dommages du bréchet est un enjeu pour le bien-être des poules pondeuses et pour améliorer les performances d’un troupeau même si leurs impacts sont encore mal connus.
Évaluer et comprendre l’origine des dommages du bréchet est un enjeu pour le bien-être des poules pondeuses et pour améliorer les performances d’un troupeau même si leurs impacts sont encore mal connus.
Des fractures et des déviations du bréchet sont fréquemment observées en élevages de poules pondeuses, quelle que soit leur typologie (cage, plein air, volière). La plupart des études en élevages commerciaux montrent que 30 à 70 % des poules présentent des fractures du bréchet. Ces fractures impactent le comportement des poules et induisent de la douleur, ce qui en fait un problème majeur de bien-être animal.
Les volières plus propices aux fractures
Deux types de dommages sont constatés sur cet os cortical qui subit un affaiblissement squelettique progressif à partir de la maturité sexuelle : la fracture suite à un choc ou la déviation résultant d’une courbure non naturelle de l’os.
Un bréchet de poule sévèrement dévié après une fracture
L’élevage en volière est une alternative à la cage aménagée permettant de répondre aux besoins comportementaux des poules (déplacement libre, perchage, exploration…), mais il favorise aussi les fractures, suite aux collisions des poules avec le matériel.
Les limites de la palpation
La palpation consiste à passer le pouce et l’index le long de la surface ventrale du bréchet. C’est la méthode la plus simple pour savoir si une poule a subi un choc ou une déviation du bréchet, mais elle a des limites. Comme toute évaluation manuelle, la fiabilité du diagnostic nécessite un entraînement préalable. La palpation est aussi peu précise car l’évaluateur ne peut pas sentir les microfractures et les fractures récentes (car le cal osseux ne s’est pas formé). Il ne peut pas non plus détecter de fracture dans la partie caudale (non accessible) alors qu’une grande majorité des fractures y a lieu.
Des modifications de comportement de mouvement au sein des volières, dues aux fractures, ont été mises en évidence par plusieurs études. L’accès aux perchoirs et aux nids (déplacements verticaux) est réduit. Les poules atteintes de fractures du bréchet sont moins actives, passent plus de temps au sol ou en haut des volières pour limiter leurs mouvements.
Des causes multifactorielles interdépendantes
Les conséquences zootechniques des dommages du bréchet ne sont pas très documentées. Des baisses de performance de ponte peuvent être directement liées aux fractures sévères, mais le lien entre conséquence et cause n’est pas fait sur le terrain, ce qui peut s’expliquer par l’absence de surveillance régulière de la santé osseuse.
La génétique, la précocité de la ponte, les systèmes d’élevage, l’alimentation des poules et la méthode d’élevage des poulettes sont les principaux éléments pouvant impacter la santé osseuse des poules pondeuses.
Trois chiffres l’illustrent bien : pour un point supplémentaire de taux de ponte, le risque de fractures du bréchet augmente de 1,3 % ; pour des œufs pesant un gramme de plus en début de ponte, le nombre de fractures augmente de 3 % en fin de ponte ; pour un début de ponte retardé d’une semaine, le risque de développer des fractures en fin de ponte est réduit de 12 %.
Agir sur la nutrition et le matériel
Au niveau des systèmes d’élevage, des solutions d’aménagement des volières sont identifiées. Des rampes et des échelles peuvent être posées pour faciliter les déplacements des poules. Sur une poule au repos, des perchoirs en forme de champignon répartissent mieux le poids du corps. Avec les perchoirs ronds, 80 % du poids repose sur le bréchet en appui contre le perchoir, ce qui peut induire des dommages. De plus, des perchoirs mous (en polyuréthane) causent moins de déviations du bréchet que les perchoirs durs en métal.
L’élevage des poulettes est aussi une période d’apprentissage durant laquelle les poulettes doivent avoir la possibilité d’effectuer des exercices physiques diversifiés et de se percher au jeune âge pour permettre un bon développement osseux. « Les poules apprennent à estimer les distances et acquièrent les facultés de coordination nécessaires jusqu’à l’âge de huit semaines, explique le guide d’élevage MTool-Connaissances de base. Si elles ne les ont pas apprises à cette période de leur vie, elles auront plus de difficultés à se déplacer en volière par la suite. »
La nutrition constitue un levier d’action majeur. Les apports en calcium, phosphore, minéraux et vitamine D3 sont cruciaux, compte tenu de leur rôle dans la minéralisation et l’intégrité structurelle des os. Les poules doivent recevoir un mélange équilibré de particules fines et de particules grossières de carbonate de calcium en début de ponte. En fin de ponte, ce ratio doit atteindre 65 % de particules grossières et 35 % de particules fines. L’augmentation des particules grossières réduit le besoin en calcium d’origine osseuse mobilisé pour former la coquille de l’œuf (30 à 40 % des apports par la résorption osseuse). Il est également possible d’effectuer une cure de vitamine D3 sous forme active, en cours de production, pour améliorer la biodisponibilité.
Le projet PouleBreak
Disposer d’outils d’évaluation fiables et précoces en élevage est un prérequis pour aller plus loin dans la prévention de l’apparition de fracture ou de déviation du bréchet.
L’Itavi vient de lancer le projet de R & D PouleBreak pour travailler sur la douleur perçue par les poules en fonction de la gravité des dommages au bréchet. En caractérisant les douleurs sur des critères de comportement, les éleveurs pourront disposer d’indicateurs visuels annonciateurs d’une dégradation de la santé osseuse de leurs animaux.
Le deuxième objectif de ce projet est de venir compléter l’outil Ebene, avec un module spécifique pour l’évaluation des bréchets selon une évaluation basée sur l’analyse d’une image smartphone des bréchets.