Oiseaux d’exception
La triple vocation de la Fauconnerie du Puy du Fou
Au-delà de son spectacle du Bal des oiseaux fantômes, l’académie de Fauconnerie du Puy du Fou a vocation à conserver un patrimoine vivant. C’est aussi un élevage avec des règles sanitaires.
Au-delà de son spectacle du Bal des oiseaux fantômes, l’académie de Fauconnerie du Puy du Fou a vocation à conserver un patrimoine vivant. C’est aussi un élevage avec des règles sanitaires.
La fauconnerie des Epesses en Vendée fait partie de l’ADN du parc thématique d’attraction du Puy du Fou créé en 1989. C’était l’une des deux premières attractions avec, à l’origine, une quinzaine de rapaces. Depuis lors, le « cheptel » s’est constamment développé, sous la houlette de Jean-Louis Liégeois qui dirige l’académie depuis 1993, entouré de 5 permanents et 28 saisonniers. Aujourd’hui, le centre compte environ 600 oiseaux de 74 espèces répartis dans 120 volières, ainsi que dans un bâtiment d’hivernage « pour les plus frileux" (marabouts, vautours…). La quasi-totalité sont issus d’autorenouvèlement. « Certes, nous faisons partie d’une entreprise de spectacle à but lucratif, explique Jean-Louis Liégeois, mais nous menons aussi des actions qui ne le sont pas particulièrement. C’est très valorisant pour l’image du Puy du Fou. » Ces oiseaux comptent surtout par leur travail et par le patrimoine qu’ils représentent pour pérenniser l’espèce et pour la biodiversité, ainsi que pour les générations futures.
Des mois de préparation au bal
La devise de l’académie pourrait être la suivante : « Donner à voir, sensibiliser, élever et protéger ». Présenté 2 à 5 fois par jour entre juin et septembre, le bal des oiseaux fantômes est la priorité. Voir évoluer 250 à 300 oiseaux (chouettes, grands ducs, caracaras, faucons, aigles, vautours, serpentaires, milans…) au ras des 3 000 personnes est un moment inoubliable. Au fil des ans, le scénario s’est enrichi. Un ballon géant permet de relâcher les grands oiseaux de vol à 200 mètres du sol. Un ULM traverse le ciel accompagné de sa compagnie d’oies Bernache d’Hawaï. Pour monter à ce ballet de 30 minutes, l’affaitage (dressage) des oiseaux a débuté par une imprégnation à l’homme dès leur naissance. L’entraînement fréquent habitue l’oiseau à manger sur un gant, à attraper une proie en vol, à prendre peu à peu de la distance sans fuir et revenir, à reproduire le parcours du spectacle ou un comportement (le serpentaire chassant un faux serpent, les faucons attrapant un leurre). Le conditionnement par l’alimentation est indispensable. Mais être un sportif de haut niveau n’est pas compatible avec le surpoids et la suralimentation. Chaque oiseau est régulièrement pesé, ce qui permet d’anticiper des problèmes de santé.
Ne pas oublier la biosécurité des éleveurs
Après la saison de spectacle survient la récupération, notamment du plumage usé. La mue est provoquée à contre saison (septembre-décembre). Les plus fragiles sont hivernés. « Le chef d’élevage Christophe n’y était pas trop favorable, note Jean-Louis Liégeois. Mais en quatre hivers, nous n’avons eu aucune mortalité. » Cette expérience va avoir une suite avec la construction d’un bâtiment de 1 200 m2, « pour la reproduction et pour être en capacité de confiner si nécessaire. » En effet, le centre se trouve en région avicole dense. « Nous devons nous préparer à confiner le maximum d’oiseaux, au cas où. » Depuis 2006, le cheptel est vacciné tous les six mois. « Depuis l’arrêté biosécurité, nous avons renforcé les mesures, vis-à-vis du personnel et de la gestion des flux. » Les entrées de véhicules sont limitées, avec des zones inaccessibles au personnel non qualifié. La collecte de l’équarrissage est externalisée. Les véhicules rapportant l’aliment sont désinfectés au retour. Les visiteurs des ateliers pédagogiques doivent revêtir la tenue de « cosmonaute ». Un nouveau local de quarantaine, avec air filtré jusqu’à un micron, a été construit à l’écart. Les canards qui peuplaient les plans d’eau du Parc ont été retirés. « On a fait le maximum pour ne pas être une voie de sortie de virus. Pour nous, le plus grand risque d’entrée, c’est notre vétérinaire », plaisante Jean-Louis Liégeois. Malgré ces précautions, le directeur n’a aucune certitude sur l’attitude des autorités si un oiseau était décelé positif en H5 ou H7. « On se rassure en se disant qu’un centre comme le nôtre situé en zone touchée a été épargné cet hiver. Sinon, ce serait plus de 25 années d’efforts anéantis. »
Concourir au maintien de la biodiversité
En plus de la préparation des spectacles qui a lieu en fin d’hiver et au printemps, la fauconnerie pratique la reproduction. Elle fait naître en moyenne 80 à 100 oiseaux d’une quarantaine d’espèces. Elle a été la première à reproduire des vautours africains en captivité. Environ 20 % des éclos sont gardés (serpentaire, caracara, milan, vautours…), 70 % échangés avec d’autres parcs et 10 % intégrés à des programmes collaboratifs. La fauconnerie participe à des initiatives de réintroduction dans la nature (condor des Andes en Argentine, vautour fauve en Bulgarie, gypaète barbu dans les Alpes autrichiennes, vautour moine dans le causse du Verdon, pygargue à queue blanche en Israël…) ou de renforcement de population captive par des accouplements raisonnés (faucon laggar). Membre de l’association européenne des zoos et aquariums qui gère le programme européen pour les espèces menacées, le centre s’appuie aussi sur le réseau Species360.org(1), qui tient une base de données mondiale des animaux sauvages en captivité. Il sait en temps réel qui détient quoi et selon quelles caractéristiques (généalogiques notamment). Parallèlement, l’Académie sensibilise le public à la protection de l’avifaune sauvage, au cours d’ateliers pédagogiques. L’ensemble des produits sont reversés à des associations de protection de la nature, pour environ 40 000 euros par an.
(1) Zims : zoological information management system