Réduire les écarts de compétitivité
Incorporer du blé en l’état pour le poulet standard
Ajouter de la céréale entière dans la ration des poulets a un intérêt économique variable estime la firme services MiXscience qui a étudié quatre scénarios de mise en œuvre.
Ajouter de la céréale entière dans la ration des poulets a un intérêt économique variable estime la firme services MiXscience qui a étudié quatre scénarios de mise en œuvre.


Le blé est couramment employé sous sa forme entière dans les rations alimentaires des poulets standard belges, néerlandais et allemands. La firme service MiXscience a étudié sa faisabilité technique et économique en France, en l’examinant du point de vue du fournisseur d’aliment, de l’éleveur, de l’organisation de production, de l’abatteur. Techniquement, trois modes de distribution du blé sont envisageables : en simultané et libre choix mais séparément de l’aliment complémentaire, en mélange avec le complémentaire ou bien en alternance avec celui-ci.
Un itinéraire technique à adapter
Pour MiXscience, la distribution en mélange est le meilleur compromis technique. Le blé en l’état n’est pas distribué avant l’âge de 10 jours car à cette période, il provoque de l’hétérogénéité parmi les poussins. Le taux d’incorporation augmente progressivement avec l’âge : de 8 à 12 % entre 8-10 jours et 18-20 jours d’âge, de 12 à 17 % entre 20 et 27 jours, puis 18 à 22 % au-delà. « La qualité du blé (pourcentage de protéine, poids spécifique) est à adapter à chaque contexte », précise Luc Mahieu qui a conduit l’étude. Tout comme l’amélioration de performance (plus 20 à 40 g de poids vif, moins 2 à 4 points d’indice de consommation). Pour une organisation de production contrainte par un cahier des charges d’abattoir (calibre fixé), le gain d’indice de consommation passera avant le gain de poids vif. Pour avoir une miette puis un granulé qui tiennent, le taux minimum d’incorporation du blé est aux alentours de 15 %, auxquels s’ajoutent 8 à 20 % de blé en l’état. Ces taux peuvent être atteints toute l’année dans une formule pour poulet blanc, quel que soit le contexte. Par contre, si le blé est très cher ou si le maïs le concurrence (en fin d’année), le taux de blé peut tomber à 15 % en standard jaune, ce qui rend le schéma inapplicable.
Deux stratégies aléatoires sur les quatre
MiXscience a étudié quatre scénarios de mise en œuvre, selon que l’éleveur investit dans l’équipement d’incorporation ou pas (mélange blé-complémentaire livré par l’usine) et selon l’origine du blé. Évalué par la baisse du coût de la tonne de poulet vif, le bilan économique est très variable (voir tableau). Le schéma le moins intéressant concerne l’éleveur non producteur de blé qui investit dans l’équipement et qui doit l’acheter au prix du marché. Il obtient au mieux 0,20 euro de plus-value par tonne (71 euros par an pour 1 200 m2). Mais s’il achète le blé au fournisseur de complémentaire, la plus-value passe à 5,4-8,50 euros/t vif (1 900 à 3 000 euros par an pour 1 200 m2). S’il produit son blé et le stocke, la plus-value peut atteindre 1,40 €/t vif (496 euros par an pour 1 200 m2). « On pourrait croire que c’est le meilleur scénario, mais au bout du compte, on en est loin », commente Luc Mahieu. Il souligne les incertitudes d’arbitrage entre la valorisation du blé en poulet ou sur le marché, auxquelles s’ajoutent les écarts de coûts de stockage (de 7 à 18 €/t).
Sécuriser le rendement du poulet
Le scénario qui paraît le plus robuste pour la filière consisterait à réaliser le mélange à l’usine (un seul investissement). Le gain potentiel global est estimé de 10 à 15 €/t (3 500 à 5 300 euros par an pour 1 200 m2). « En valeur absolue, tous ces chiffres sont virtuels, souligne Luc Mahieu. Il faudrait plutôt comparer les ordres de grandeur. » Le nutritionniste souligne que le mélange blé-complémentaire réalisé à l’usine ne permet plus de moduler le blé en élevage et suscite moins de dialogue entre l’éleveur et le technicien. Il peut avoir la préférence de l’OP qui souhaite des lots homogènes à l’abattage. En effet, trop diluer pénalise le taux en protéines donc le rendement. Certains éleveurs incorporant eux-mêmes pourraient être tentés de moduler le blé en fonction de l’état des fientes et non d’un objectif de rendement. Luc Mahieu laisse le soin aux partenaires de décider de la répartition du gain économique entre l’abatteur, l’OP et l’éleveur. Vu d’une OP, le non-investissement pour l’éleveur et la sécurisation des performances peuvent justifier le maintien de la marge poussin-aliment. Enfin, souligne Luc Mahieu, le non-passage du blé dans le processus de fabrication demandera un renforcement du suivi de la qualité sanitaire des céréales incorporées.
Des effets scientifiquement prouvés
Les vertus du blé ingéré entier sont bien connues au plan digestif. Son temps de séjour est augmenté dans le gésier. Cela se traduit par un bol alimentaire plus acide et mieux dégradable par les enzymes digestives, d’où une meilleure digestibilité. De plus, les rejets d’eau sont diminués dans les fientes, ce qui améliore l’état de la litière, donc le bien-être de l’animal et finalement sa santé digestive. Les souches à croissance rapide abattues à 1,9 kg vers 30-35 jours sont-elles capables d’utiliser des céréales entières sans que leurs performances soient pénalisées ? À la lecture de publications scientifiques récentes et d’essais conduits en station sur des poulets Ross 308, la réponse de MiXscience est oui. En plus d’une hausse spectaculaire du poids du gésier (de plus d’un quart) les poulets ingérant du blé entier augmentent leur poids vif (de 20 à 40 g à 28 jours) et l’indice de consommation diminue de manière significative (d’environ 4 %), avec des rendements filets équivalents. La qualité des fientes est aussi améliorée, tout comme l’état des pattes et du bréchet.
P.L.D.
Troisième journée technique MiXscience
Le 8 juin, la firme services MiXscience a tenu sa journée technique à l’intention de ses clients fabricants d’aliment. Hormis le blé entier, les thèmes traités ont concerné la problématique de l’élevage « sans antibiotique », les solutions nutritionnelles (notamment les additifs « vectorisés ») en conditions d’élevage « challengées », la consommation de la poule pondeuse et l’intérêt de la bétaïne lors d’un stress thermique.