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Choix du cépage
Un vignoble en perpétuelle évolution

L´encépagement au cours du temps n´a cessé d´évoluer. Les flux migratoires, les maladies comme le phylloxera, les accidents climatiques, l´évolution des techniques culturales, les guerres aussi ont contribué à réorienter l´encépagement.


Enfin, la réglementation a joué à plein. Cela a commencé en 1935 avec la naissance de l´Inao qui a figé l´encépagement, puis s´est poursuivi avec la création des vins de pays et la définition des cépages appropriés. Les variétés sont classées en cépages autorisés et recommandés. Une manière indirecte d´orienter le potentiel viticole puisque les premiers sont condamnés peu ou prou à disparaître. Le vigneron qui prend le risque de les planter perd 30 % de ses droits de plantation.
Au total, le patrimoine viticole français compte près de 450 cépages, mais 243 ne sont pas inscrits au catalogue des variétés autorisées.
Conservatoires et nouvelles variétés contre l´uniformisation
Lutter contre l´uniformisation : c´est ce que tentent de faire les chercheurs en développant des conservatoires et en créant de nouvelles variétés.
«La diversité, le choix de personnaliser ses vins, la volonté d´augmenter leur typicité à l´aide de cépages autochtones, peu connus, sont des voies difficiles mais constituent une véritable alternative face aux risques de standardisation et de concurrence de pays étrangers », estime Jean-Michel Boursiquot. Pour continuer à offrir aux viticulteurs cette diversité, des conservatoires de variétés anciennes ont été créés en France, dont le plus important au monde est le domaine de Vassal (Hérault). Ceux-ci ont assuré la réhabilitation de certains vieux cépages comme le prunelard, le casse-tête, l´aspiran ou encore l´oillade.
Outre la conservation, l´identification de vieux cépages permet de réaliser des prospections clonales. L´étude des variétés en collection a également permis à l´Inra de créer de nouvelles variétés : le chasan, le marselan ou le caladoc. Bien adaptées aux conditions méridionales, plus faciles à conduire qu´un merlot ou qu´un petit verdot, ces variétés nouvelles ne se sont pas encore développées à hauteur de leurs mérites. « Ce que l´on reproche à ces nouvelles variétés, c´est par définition de ne pas être connues. Elles ne correspondent pas à la stratégie des vins de cépage, estime Alain Bouquet, de l´Inra. Mais si l´étiquette vient à jouer beaucoup moins, si l´aspect terroir est mis en avant, si on crée des vins de marque, ces nouvelles variétés auront sans aucun doute leur carte à jouer. »
Vignes OGM : Un risque accru de standardisation
« La réduction de la variabilité génétique au niveau variétal et clonal est le principal risque d´introduction d´OGM en viticulture », estime Alain Bouquet. En effet, poursuit-il, si un jour, des variétés génétiquement modifiées sont autorisées, ce ne pourra être que des cépages internationaux et dans la mesure où les caractéristiques qui leur auront été apportées par cette technique faciliteront leur culture, cela ne pourra que renforcer leur place sur un plan mondial. Et ces variétés OGM seront « évidemment » monoclonales comme le sont les variétés issues d´hybridation.
Merlot, syrah, mourvèdre et les autres : état des lieux
Certains cépages ont connu leur heure de gloire dans le passé. D´autres sont en pleine expansion. Petit tour d´horizon.
Au cours des quarante dernières années, seuls cinq cépages ont occupé une surface supérieure à 90 000 hectares. Le carignan a connu son apogée dans les années 70-80 avec 210 000 hectares. « Du fait du renouveau qualitatif du Languedoc, les surfaces consacrées à ce cépage vont continuer à diminuer », estime Jean-Michel Boursiquot, directeur de l´Entav. L´aramon, avec 9 000 hectares aujourd´hui, devrait encore dégringoler : il est inadapté au nouveau contexte.
Le merlot est devenu la première variété cultivée en France. « Avec la fin de la prédominance du carignan, une page de l´histoire s´est tournée, estime Jean-Michel Boursiquot. Mais cette évolution mérite réflexion, le merlot standardise trop les vins. » Le grenache, quant à lui, a atteint un plafond, selon l´Entav, avec un peu moins de 100 000 hectares. L´ugni blanc, première variété blanche, occupait 120 000 hectares en 1978. Il est descendu à 90 000 hectares. Opération séduction réussie pour la syrah : moins de 2 000 hectares en 1958 et plus de 55 000 en 2000. Elle est ainsi en sixième position devant le cabernet sauvignon. Le cabernet franc couvre 40 000 hectares. « C´est un cépage trop peu exploité et qui pourrait représenter une alternative au merlot », estime M. Boursiquot. Le chardonnay dépasse les 30 000 hectares.
Le sauvignon : un créneau à prendre
Le gamay plafonne à 38 000 hectares. Le cinsaut, à moins de 30 000 hectares en 2000, devrait continuer à régresser. Les vignerons lui préférant la syrah et ceci malgré des problèmes de mortalité des ceps encore inexpliqués. Le sémillon, en dépit de nombreux atouts, selon l´Entav, a vu ses surfaces passer de 37 000 hectares en 1958 à moins de 13 000. Le pinot noir occupe 27 000 hectares, le sauvignon à 21 000. « Il y a sans doute avec ce dernier cépage un créneau à prendre, même si sa maîtrise culturale n´est pas aisée ».
Le chenin connait un regain d´intérêt avec 10 000 hectares. Le cot (6 000 hectares) et le colombard (7000 hectares), grâce au dynamisme des vignerons du Sud-Ouest, sont à nouveau en progression. Même chose pour le mourvèdre, passé de 1 000 à 8 000 hectares, une progression en lien avec la création d´AOC dans le sud.
A la recherche de cépages « typiques »
A noter également l´évolution importante du muscat à petits grains (de 2 000 à 7 000 hectares) et du riesling (de 700 à 3 500 hectares). Certains vignerons en mal de typicité redécouvent le petit et le gros manseng qui couvrent aujourd´hui 3 000 hectares. Le vermentino suscite également la curiosité en Languedoc et Provence. « On parle beaucoup du viognier et pourtant, il ne représente que 2 500 hectares », souligne Jean-Michel Boursiquot.
Depuis 1980, on redécouvre l´intérêt de cépages tels l´aligoté, la négrette, la marsanne, avec des surfaces toutefois inférieures à 2 200 hectares. Enfin, les hybrides producteurs directs qui représentaient près de 400 000 hectares en 1958, du fait de leur classement en cépages autorisés (à l´exception du bacco) ne représentent plus qu´à peine 2 % du vignoble français.
L´Inao, garant d´une « certaine » diversité
Au nom du respect des « usages locaux, loyaux et constants », l´Inao, en fixant par décret la liste des cépages autorisés dans chacune des AOC, contribue à maintenir la diversité de l´encépagement. « Pas si sûr », estime Jean-Michel Boursiquot, car bien souvent, un ou deux cépages prennent le dessus. Pour ne prendre que l´exemple du bordelais, l´encépagement en AOC n´est pas resté figé dans le temps, obéissant à des impératifs économiques et qualitatifs. Ainsi, le merlot en 1970 occupait 38 % des surfaces dédiées aux variétés noires. En 2000, il représente 58 %, selon la DDAF de la Gironde.
Les variétés nouvelles exclues des décrets AOC
Pour René Renou, président du comité national des vins de l´Inao, l´AOC est synonyme de pérennité : « A chaque vigneron de faire exprimer au mieux son terroir avec le cépage le plus adéquat. Une chose est sûre : plus on se banalise, plus il faut être compétitif. »
Quant à imaginer que certains décrets d´AOC puissent intégrer les nouvelles variétés mises au point par l´Inra, René Renou, sur ce point est très clair : « Tant que je serai là, elles ne seront jamais inscrites. » Sans doute au nom des « usages locaux, loyaux et constants »...

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