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Un biocarburant à 95 % issu du marc de raisin

La filière vitivinicole contribue depuis longtemps à produire des biocarburants via la distillation des marcs de raisin et des lies. Un pas de plus est franchi avec le lancement en 2016 d’un biocarburant issu à 95 % de marc de raisin. Un développement prometteur mais pas sans difficultés.

Lorsqu'il alimente des camions transportant du vin ou des alcools viniques, l'ED95 contribue à limiter l'empreinte carbone de la filière. © Raisinor France
Lorsqu'il alimente des camions transportant du vin ou des alcools viniques, l'ED95 contribue à limiter l'empreinte carbone de la filière.
© Raisinor France

Acheminés dans les distilleries, le marc de raisin et les lies permettent notamment de produire de l’éthanol. La société Raisinor France basée à Coutras, en Gironde, commercialise l’éthanol produit par 25 distilleries sur la trentaine qui sont actives en France. Ce biocarburant s’écoule avant tout sur le marché de l’incorporation dans les carburants fossiles. Il s’agit d’un éthanol reconnu comme étant de 2e génération ou « de génération avancée », parce qu’il est issu d’une ressource non alimentaire. C’est l’atout sur lequel s’appuie Raisinor France Alcools, la filiale constituée en 2016, pour commercialiser en France un ED95, c’est-à-dire un Ethanol Diesel incorporant 95 % de bioéthanol. Les 5 % restants sont constitués par un additif lui aussi non pétrolier. Il a fallu six ans à cet ED95 d’origine vinique pour être homologué sur le marché français. « Nous sommes les plus gros sur le marché européen de la génération avancée », avance Jérôme Budua, directeur de Raisinor France Alcools.

Des atouts environnementaux mais des contraintes techniques

L’analyse de cycle de vie de l’ED95 lui donne d’autres atouts en termes de développement durable. « Il réduit les émissions de CO2 de 90 % par rapport au diesel fossile », expose Jérôme Budua. Il produit très peu de particules fines. Mais il ne peut alimenter un moteur « flexfuel », il lui faut un moteur dédié. À ce jour, seul le constructeur suédois Scania a relevé le défi. « Ils ont adapté leur bloc-moteur existant ce qui permet un surcoût limité », indique Jérôme Budua. Le prix des véhicules est « proche du Diesel et inférieur au véhicule roulant au gaz ».

Ce mono usage « a permis de négocier une fiscalité avantageuse », plaide Jérôme Budua. L’ED95 bénéficie d’une TICPE réduite et ses véhicules d’un suramortissement de 40 %.

Le prix actuel de l’ED95 est de 0,85 €/l hors TVA « mais il implique une surconsommation de 50 % par rapport au gazole », prévient le directeur. Un défaut qui s’atténuera si le prix du gazole augmente… ce qui n’est pas le cas en ce moment. Autre handicap, un surcoût d’entretien qui vient du fait que « l’éthanol assèche davantage que les produits pétroliers ». Raisinor travaille sur les lubrifiants pour résoudre ce problème. En attendant, un changement des injecteurs plus fréquent est à prévoir.

Une classification Crit’Air 1

Du côté des avantages, il est plus facile à utiliser que le gaz puisqu’il « se gère comme un carburant classique dans les stations ».Au final, « rouler avec l’ED95 coûte 10 à 15 % plus cher que rouler au gazole », estime Jérôme Budua. Mais les véhicules bénéficient de la classification Crit’Air 1, qui devient un sésame pour accéder aux centres-villes. Aujourd’hui 50 camions ou bus roulent en France à l’ED95 de Raisinor France, en Nouvelle-Aquitaine, Occitanie et en Paca. Un autre ED95 issu de résidus de transformation de la betterave est développé par Tereos et fait rouler 2 véhicules.

Prendre sa place sur le marché des énergies renouvelables

Côté marc de raisin, la ressource est par définition limitée. Jérôme Budua évalue le volume de marc issu de l’élaboration des vins « à 900 000 à 1 million de tonnes par an ». Selon lui « 95 % du marc issu des exploitations viticoles françaises est récupéré et traité par les distilleries ». Il estime que cet ED95 pourrait alimenter jusqu’à 1 000 véhicules. Il y a donc encore une marge de progression même si Raisinor souhaite garder un pied dans l’incorporation. L’ambition est de prendre une place dans le « mix énergétique » engendré par l’essor des énergies renouvelables. Dans le futur, Raisinor n’exclut pas de traiter d’autres matières comme des résidus de bois, ce qui augmenterait les capacités.

À quand l’ED95 dans les engins agricoles ? Le frein majeur est que l’ED95 implique « des modifications lourdes sur la motorisation », reconnaît Jérôme Budua. Pas vraiment une priorité du secteur plutôt orienté vers l’électrique, le gaz voire l’hydrogène. Le biocarburant peut tout de même revenir à la filière vitivinicole par le biais du transport. Il alimente déjà 15 véhicules de transport de liquides alimentaires du transporteur Veynat, basé en Gironde. Le produit commence à intéresser des entreprises ou des interprofessions dans le cadre d’engagements sur la réduction des émissions de CO2.

Voir plus loin

Le bioéthanol issu de marcs de raisin représente environ 3 % de la production totale de bioéthanol (1re et 2e générations).

Distiller 100 000 tonnes de marc permet d’extraire en moyenne 40 000 hl d’alcool pur (hlAP).

La distillation des marcs permet d’obtenir des coproduits comme les pépins de raisins transformés en huile, des anthocyanes, des polyphénols, du tartrate.

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